- INTRODUCTION
L’élection présidentielle de 2018 marque un tournant dans l’histoire électorale et démocratique du Mali. Elle intervient quelques mois après le rejet par la population du projet de révision constitutionnelle dans lequel, un nouvel article 36 prévoyait qu’«en cas de force majeure», le président de la République resterait en place «jusqu’à l’élection de son successeur».
N’ayant pu réussir ce passage en force constitutionnel, le Pouvoir s’est vu contraint de préparer l’organisation des élections. Il s’y attèle, dès janvier 2018, dans le but avéré de faire passer par les urnes ce qu’il n’a pu obtenir par révision constitutionnelle. Ensuite, l’élection s’est déroulée dans un contexte sécuritaire particulièrement difficile au Nord où, les populations, les forces maliennes et internationales sont confrontées aux attaques terroristes et au Centre où, le pourrissement de la situation sécuritaire engendre des violences intercommunautaires. Enfin, avec une partialité affichée, le Gouvernement
s’est mis en devoir de faire réélire le président sortant. Or, dans toute démocratie, c’est d’une élection honnête, crédible et transparente que le pouvoir politique tire sa légitimité.
L’analyse à posteriori des péripéties et des résultats des scrutins du 29 juillet et du 12 août, nous permet d’établir, sans aucun doute possible, que l’élection est entachée de règles du jeu inéquitables et de fraudes manifestes. Cette situation est rendue possible par le fait qu’au Mali, cas rare en Afrique, l’Etat est omniprésent dans toute la chaîne de décisions du processus électoral, à la fois juge et partie. La Commission électorale nationale indépendante (CENI) qui a la responsabilité de superviser le processus électoral, du début à la fin, laisse le Ministère en charge des élections administrer le processus de façon partisane
et, se contente de faire un rapport, six mois après. Quand, de son côté, la Cour Constitutionnelle, comme une caisse de résonnance, valide systématiquement tous les résultats provisoires fournis par le Gouvernement et rejette, dans le même temps, toutes les requêtes de l’opposition, il y a de quoi s’inquiéter sérieusement pour notre démocratie. C’est pour cette raison, qu’au-delà des contingences partisanes, nous partageons notre analyse des scrutins du 29 juillet et du 12 août 2018 pour en relever les dysfonctionnements et les incohérences. Notre démarche se veut factuelle et vise à porter à l’attention de l’opinion les faits majeurs qui ont marqué cette élection et qui risquent, si on n’y prend pas garde, de travestir notre démocratie au point d’élire des dirigeants, dans l’illégalité et sans légitimité.
- ANTICIPATION ET INQUIETUDE
L’élection présidentielle de 2013, qui a été organisée sous l’autorité de la junte militaire au pouvoir, avait été marquée par des fraudes massives et des dysfonctionnements importants du processus électoral. Nous avions pris la pleine mesure du problème et avons produit un livre blanc pour souligner les dysfonctionnements, en nous en tenant aux faits et rien qu’aux faits. Sur la base de ce document, nous avons mobilisé la classe politique et avons établi un
dialogue avec le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation
(MATD), en charge des élections, pour une relecture de la loi électorale. De ces travaux réunissant pouvoir et opposition, il est ressorti deux innovations majeures venues enrichir la loi. Il s’agit de la traçabilité des bulletins de votes par leur numérotation et les signatures du président du bureau de vote et des deux assesseurs désignés par les parties, ainsi que de la possibilité, désormais accordée aux partis politiques, de désigner eux-mêmes leurs assesseurs. Ces innovations ont été mises en application au cours de ce scrutin et on voit déjà les limites de leur mise en œuvre, en particulier sur les aspects d’authentification des signatures. Au chapitre de ces nouveautés, les partis politiques doivent être, désormais, impliqués dans le choix de l’emplacement et du nombre de bureaux de vote. Force est de reconnaitre que cette disposition de la loi électorale a été allégrement ignorée par les préfets, avec la complicité du MATD, au cours des scrutins du 29 juillet et du 12 août.
III.CERTIFICATION DES RESULTATS DU VOTE
Constatant la situation d’insécurité au Nord et l’enchainement des violences intercommunautaires au Centre du pays, nous avons toujours considéré que ce serait un immense défi pour le Gouvernement d’organiser les élections dans ces conditions. Encore plus, après l’échec du projet de révision constitutionnelle qui prévoyait en son article 36 qu’« en cas de force majeure», le président de la République resterait en place «jusqu’à l’élection de son successeur». Aussi, plusieurs mois avant l’élection, nous avons, au nom de l’opposition politique du Mali, demandé expressément au Conseil de sécurité des Nations Unies de renforcer le volet politique de la MINUSMA pour soutenir les préparatifs des élections en y intégrant la certification des résultats.
Ceci était d’autant plus nécessaire que sur plusieurs parties du territoire national, seuls les groupes armés y ont accès et peuvent, alors, organiser les élections à leur guise. L’illustration la plus évidente de cette iniquité dans le traitement des candidats est que ce sont dans ces zones de non sécurité où on retrouve les taux de participation les plus élevés avec 90 à 100 % de suffrages exprimés en faveur du candidat du pouvoir. Vu la gravité de la situation dans le pays, le niveau d’engagement de l’ONU à travers la MINUSMA, celui de la France à travers Barkane, une certification des résultats aurait permis de protéger le vote des Maliens pour assurer au président élu une légitimité politique incontestable. Seule une élection sincère, crédible et sans tache peut assurer cette garantie. Malgré notre insistance, malgré nos rappels, notre demande de certification est restée sans suite. Cela nous aurait évité toutes les contestations actuelles, constitutives des ingrédients d’une vraie crise post-électorale.
- DECOUVERTE D’UN FICHIER PARALLELE
Nous avions déjà dénoncé, le 20 juillet 2018, avant le premier tour, le risque de fraudes massives avec la mise en ligne par le Gouvernement d’un fichier électoral différent de celui qui a été audité par les experts de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et validé par les partis politiques et les organisations représentatives de la société civile malienne. Censé contenir
8.000.462 inscrits, le fichier mis en ligne contenait 8.105.654 inscrits et plusieurs anomalies, au nombre desquelles on peut citer:
Le retour des doublons: le fichier électoral contient de nombreux électeurs dont le numéro NINA apparait à plusieurs reprises dans la liste électorale. Sur l’ensemble du fichier électoral, cette anomalie laisse supposer un potentiel de 275.761 voix fictives;
Des électeurs supplémentaires: le nombre d’électeurs indiqués dans les statistiques du fichier électoral ne correspond pas au nombre d’électeurs réellement inscrits. Sur l’ensemble du fichier électoral, cette anomalie laisse supposer un potentiel de 488.761 voix
Centres et bureaux de vote additionnels: dans certaines communes, le nombre de
centres et de bureaux de vote ventilés par village, fraction ou quartier (VFQ) ne correspond pas avec le chiffre consolidé. Sur l’ensemble du fichier électoral, cette anomalie laisse supposer un potentiel de 477.000 voix fictives;
Fichier électoral pour les circonscriptions à l‘étranger non documenté: alors que le fichier électoral fournit toutes les informations sur la liste des enrôlés au Mali (nom, prénom, sexe, photo, localité, date, et lieu de naissance, centre et bureau de vote), il ne contient aucune de ces informations pour les électeurs de la diaspora. Cela concerne 452.000 électeurs.
A l’étude de ces cas analysés, vérifiés et documentés, il est ressorti un potentiel de fraude de plus d’un million deux cents milles voix. Aussi, de façon responsable, nous avons sollicité une audience auprès du Premier ministre pour lui présenter ce que notre cellule informatique a découvert sur le fichier électoral en ligne. C’est après cette audience, seulement, que nous avons alerté l’opinion nationale et internationale sur les dérives du pouvoir en place. Un collectif de vingt candidats sur les vingt-quatre en compétition s’est formé pour amener le Gouvernement à donner des assurances et à faire le plus rapidement les correctifs nécessaires au bon déroulement du scrutin. En présence des représentants de la Communauté internationale, le Premier ministre s’est engagé à fournir, aux candidats à l’élection présidentielle, les bons de commande et de livraison des cartes d’électeurs confectionnées par l’Imprimerie de France, afin que chacun puisse vérifier si le nombre de cartes correspond bien au nombre d’électeurs inscrit dans le fichier électoral. Jusqu’à la date d’aujourd’hui, c’est dire après les élections, rien de ce que le gouvernement avait promis de faire pour garantir la sincérité du scrutin n’a été fait. Pire encore, personne n’a pu faire la corrélation entre les cartes d’électeurs et les listes électorales fournies aux bureaux de vote et dont l’impression a été confiée à un autre fournisseur. De plus, il convient de souligner que plusieurs bureaux de vote ont ouvert sans liste électorale affichée.
Chacun a pu voir dans quelles conditions s’est déroulé le vote. Malgré nos alertes sur le fichier électoral mis en ligne et sur les conditions de préparation et de déroulement du scrutin; malgré notre demande restée sans réponse d’une certification internationale du processus électoral, tout ce que nous avions prédit s’est malheureusement réalisé : l’élection a été émaillée d’irrégularités, de violations délibérées de la loi et de bourrages d’urnes.
V.DES CENTAINES DE MILLIERS DE PROCURATIONS
Dans toute élection, la part de vote par procuration est limitée. La norme internationale situe le niveau acceptable des procurations à 2% du nombre total de votants. Mais au Mali, originalité locale, on a atteint, à l’élection présidentielle de 2013, le chiffre de 403 milles votes par procuration, qui représente 11,46% du nombre total des votants. C’est hallucinant et cela n’avait profité qu’au candidat Ibrahim Boubacar Keita. Dans nos discussions avec le gouvernement sur le processus électoral, nous avons, avec la classe politique, toujours posé le problème des procurations pour redéterminer les conditions de leur utilisation et en restreindre l’usage abusif. Le Gouvernement a prétendu, un moment, vouloir moraliser l’usage des procurations en adoptant un nouveau spécimen et en excluant les mandataires de son champ d’application. Cela n’a pas suffi. Au contraire, à la veille du premier tour, le MATD publie un arrêté élargissant encore davantage le champ d’application des procurations. Il y eut une levée de boucliers des candidats à l’élection présidentielle qui avec l’intercession des représentants de la communauté internationale ont pu, le 28 juillet dans l’après-midi, faire reculer le Gouvernement, alors que l’élection commençait le 29 juillet à 8 heures du matin. C’était peine perdue puisque le camp du président sortant avait fait le plein de procurations illégalement utilisées, par centaines de milliers, le jour du scrutin. Nous considérons que le nombre et l’usage presque exclusif des procurations, faites au profit du candidat du pouvoir, constituent des motifs suffisants de rejet du résultat des urnes.
- ASSESSEURS REFUSES DANS 8750 BUREAUX
Si la loi électorale permet, désormais, aux candidats de désigner eux-mêmes leurs assesseurs dans les bureaux de vote, il est important de souligner que les représentants de l’Administration territoriale sont régulièrement instrumentalisés pour rendre la mise en œuvre difficile. Quand, tirant les leçons du premier tour et des nouvelles alliances, en vue du second tour, le Directoire de campagne de Soumaila Cissé a voulu remplacer ses assesseurs, les préfets ont refusé sous prétexte que les délais administratifs requis n’étaient pas respectés. Là aussi, le Ministère attendra le 11 août en fin d’après-midi pour, dit-il, donner des instructions aux préfets, alors que le second tour démarrait le 12 août, à 8 heures.
Conséquence, 8750 bureaux de vote n’avaient pas d’assesseurs représentant le candidat Soumaila Cissé. Ainsi, il devient aisé, dans de telles circonstances, de bourrer sans risque de se faire prendre et d’inscrire ce qu’on veut sur les PV des bureaux concernés.
VII.UTILISATION ABUSIVE DES MOYENS DE L’ETAT ET PARTIALITE DU GOUVERNEMENT
Jamais dans une élection au Mali, les services de l’Etat n’ont été autant sollicités et utilisés que lors de cette campagne électorale. Les moyens et la logistique de l’Etat ont été mis au service exclusif du candidat du pouvoir. Les ministres étaient omniprésents sur le terrain et sur les affiches aux côtés du Président candidat, en violation totale de l’obligation de réserve que leur impose la fonction. Le Premier ministre organisant et animant des meetings politiques, le ministre de l’Administration territoriale en campagne électorale dans le Nord,
celui de l’Industrie pavant la ville de Bamako d’affiches de propagande pour le président sortant ou débarquant entre les deux tours dans la région de Tombouctou avec une cinquantaine de véhicules.
Le ministre de l’Énergie accompagné de militaires a fait irruption dans plusieurs bureaux de vote pendant les deux tours. L’utilisation abusive du bien public au profit d’une personne, d’une famille ou d’un clan a, aussi, été la règle d’or à l’office de la radio-télévision du Mali où, les temps d’antennes ont été dédiés, exclusivement, à la gloire du président sortant.
Malgré les dénonciations publiques et les rappels à l’équité des représentants de la communauté internationale, le Comité national d’égal accès aux médias d’Etat, est resté impuissant face à la perversion du service public et à son détournement à des fins partisanes et personnelles. Ne se suffisant pas de son emprise sur le service public, le camp du pouvoir a ordonné la fermeture illégale, pendant la campagne électorale, de la radio privée RENOUVEAU, parce qu’elle constitue un espace d’expression plurielle. A cela s’ajoutent les restrictions régulièrement imposées au réseau Internet pour limiter les communications entre le Mali et le reste du monde, ainsi que l’accès aux réseaux sociaux. Sans oublier les dérives de la police politique de l’Etat qui a opéré un raid dans les locaux de l’agence de communication du candidat Soumaila Cissé, SMART MEDIA, pour y effectuer des arrestations, confisquer les équipements informatiques et téléphoniques des agents et attaquer notre système de centralisation des résultats. Une véritable chasse à l’homme a été menée à Bamako contre des travailleurs et responsables de l’agence dont, l’un a été séquestré et torturé pendant 48 heures, à la sécurité d’Etat
VIII. ANALYSE DES RESULTATS DU VOTE
Il est important de préciser que toute notre analyse est faite sur la base du fichier électoral mis en ligne par le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD), en charge des élections. Notre démarche a consisté à faire l’analyse des résultats par bureau de vote mis en ligne par le Gouvernement, qui n’étant pas, lui-même, sûr de ce qu’il annonce, avertit le lecteur en lui précisant que le document public qu’il soumet à l’attention du monde et qui porte sur une question aussi importante que l’élection présidentielle, n’avait pas de «valeur juridique». Ce qui est édifiant, quant à la crédibilité du scrutin. Toutefois, nous allons nous contenter de relever quelques-unes des nombreuses invraisemblances qui attestent toutes et, sans aucune ambigüité, que ce scrutin a été frauduleux et que les chiffres sont manipulés.
Tableau1: Chiffre officiel du Ministère
Le nombre total de bureaux de vote dont les résultats sont affichés est de 22.675, alors que le nombre de bureaux de votes dans le fichier est de 23.041. Si on ajoute au total des bureaux de vote dont les résultats sont affichés le total de bureaux où le vote n’a pu se tenir, nous n’obtenons pas non plus le total des bureaux inscrits dans le fichier électoral. Il en est de même pour le nombre de votants au second tour. Le total affiché est 2.763.441. Or l’addition des bulletins nuls (85.536) + les bulletins d’Ibrahim Boubakar Keita (1.798.632) + les bulletins de Soumaila Cissé (879.235) donnent 2.763.403
Tableau 2 : Les écarts
Dans le cadre d’une élection, chaque vote compte. Il ne peut y avoir de différence pour le calcul de suffrages valablement exprimés. Les résultats proclamés par le MATD, au premier tour, attestent qu’il y a un écart de 19.040 voix entre votants et suffrages exprimés. Jusqu’ici, le Ministère n’a pu justifier cet écart. C’est la preuve que de petites mains se sont mises à tripoter dans les chiffres pour influencer le résultat publié
- Deuxième invraisemblance: 613 bureaux où il n’y a pas eu de vote (II)
Le Ministère de l’Administration du Territoire et Décentralisation et le Ministère de la
Sécurité ont annoncé qu’il y a 499 bureaux où le vote n’a pu se tenir, en raison de problème de sécurité. Pourtant, aussi surprenant que cela puisse paraître, il y a bien dans les résultats affichés, 613 bureaux où il n’ y a pas eu de vote pour aucun des deux candidats. Cette liste de bureaux ne correspond pas à celle du MATD. Alors à quoi correspond-elle? Comment expliquer sa présence sur le fichier? Ces questions sont d’autant plus importantes que tous les résultats affichés des bureaux de vote doivent se justifier
-REGION NOMBRE DE BUREAUX
KAYES 1
KOULIKORO 2
SEGOU 30
MOPTI 542
TOMBOUCTOU/TAOUDENI 37
ETRANGER 1
TOTAL 613
Tableau 3: Répartition par région des 613 bureaux qui n’ont aucun suffrage
Extrait des bureaux de vote (présentation des 100 premiers) en annexe 1
- Troisième invraisemblance: analyse du temps de vote par bureau (III et IV)
La loi électorale au Mali considère qu’un bureau de vote peut avoir au minimum
50 votants et au maximum 500 votants. Ce maximum est atteignable si on prolonge de plusieurs heures la fermeture des bureaux de vote. Même dans ce cas, le chiffre de 500 est difficilement atteignable. Au Mali, on ouvre à 8h et on ferme les bureaux de vote à 18h. Le temps de vote est de 10h, donc 600minutes. Rappelons que dans chaque bureau de vote au Mali, il n’y a qu’un isoloir et une urne. Si on vote à flux tendu, c’est à dire sans arrêt, sans perturbations, sans pause et sans relâche et, qu’on obtient, après 600minutes de vote, 250 suffrages exprimés, cela signifie que le temps de vote de chaque électeur est de 2mn 24 secondes
. Par comparaison, en France où il y a plus de lettrés et où les gens sont plus habitués à voter, le temps de vote est de 4mn 44 secondes
. Si nous prenons l’hypothèse la plus optimiste, à savoir que les Maliens sont plus efficaces que les Français au temps de vote, le maximum de suffrages valablement exprimés dans un bureau de vote ouvert de 8 heures à 18 heures ne peut excéder 250votants. Or, pour plus de 2000 bureaux de votes dont les résultats sont affichés, le nombre de votants par bureau dépasse largement les 250. Ce qui ne peut être possible que par bourrage physique ou par falsification de PV dont les chiffres sont non conformes au nombre de bulletins dans les urnes concernées
TEMPS DE VOTE NBRE BUREAUX IBK SCISSE
Inférieur a
1mn30s 150 90 507 78% 25 764 22%
Inférieur a 2mn 528 192 743 79% 51053 21%
Inférieur a 3mn 2 094 417 497 70% 177 126 30%
Inférieur a 4mn 6 256 856 176 67% 420 587 33%
Tableau 5 : Nombre de bureaux de vote en fonction des temps de vote
Extrait des bureaux de vote (présentation de quelques bureaux) en annexe 2
- Quatrième invraisemblance: Taux de participation compris entre 80 et 100% (V)
S’il est évalué à 43,06% au premier tour, le taux de participation est tombé à 34,54% au second tour. Mais, le plus étonnant dans ce scrutin est que ce sont dans les zones grises du Nord et du Centre qu’on atteint les taux les plus élevés. Ils sont entre 75 et 100% les zones qui sont sous influences des groupes armés, ainsi que dans les zones de la CMDT et de l’Office du Niger où les emplois et l’activité économique dépendent beaucoup des subventions gouvernementales. Il est également instructif de voir, dans les résultats affichés, comment le vote en faveur du Président sortant est boosté par ces taux de participation en opposition avec les tendances générales du vote de Maliens
TX PARTICIPATION NBRE BUREAUX IBK SCISSE
Supérieur ou égal a
100% 316 64 812 89% 8 156 11%
Supérieur ou égal a 90% 895 205 615 85% 37 462 15%
Supérieur ou égal a 80% 1174 242 317 82% 54 588 18%
Tableau 6 : Nombre de bureaux de vote en fonction des taux de participation
Cf. Extrait des bureaux de vote (présentation de quelques bureaux) en annexe 3
- Cinquième invraisemblance : 2649 bureaux de vote où Soumaila Cissé a entre 0 et 5 voix (VI)
NBRE DE BUREAUX IBK SCISSE
2 649 189 422 97% 5 810 3%
NBRE DE VOTANTS 195 232
Tableau 7 : 2 649 bureaux de vote qui ont voté entre 0 et 5 pour Soumaïla
Cf. Extrait des bureaux de vote (présentation de quelques bureaux) en annexe 4
Il est surprenant pour un candidat comme Soumaila Cissé qui participe à sa troisième élection présidentielle, qui dispose d’une représentation nationale conséquente à travers des conseillers municipaux et des députés et qui est arrivé au second tour de toutes les élections auxquelles il a participé, de ne recueillir que moins de 5 voix dans, 2194 bureaux de votes. Le plus intrigant est que dans tous les bureaux de vote où il a la moyenne de zéro voix, le taux de participation y est de 95 à 100%, en faveur du candidat Ibrahim Boubacar Keita.
- Sixième invraisemblance: 570 bureaux de vote où IBK a 100%
A l’inverse, il est tout aussi étonnant de voir Ibrahim Boubacar Keita gagner
100% du vote dans 816 bureaux de vote, avec des taux de participation de
95 à 100%. Ce qui est totalement hors norme par rapport à l’habitude du vote au Mali et, en rapport avec les tendances nationales. Mieux ces bureaux se trouvent pour l’essentiel dans les zones grises du Nord et du Centre où les conditions de sécurité découragent les citoyens d’accomplir leurs devoirs civique
NBRE DE BUREAUX IBK SCISSE
570 112 777 100% 0 0%
NBRE DE VOTANTS 112 777
Tableau 8 : 570 bureaux de vote où IBK fait 100%
Extrait des bureaux de vote (présentation des 100 premiers) en annexe 5
- Septième invraisemblance: 31% des bureaux qui votent plus de 80% pour un candidat
Il est étonnant de constater qu’au deuxième tour, 7073 bureaux ont voté à plus de 80% en faveur d’Ibrahim Boubacar Keita. Ce qui représente un total de 791.808 suffrages exprimés représentant 90%, alors que Soumaila Cissé obtient 86.259, soit 10% des votes. Autre fait inédit, c’est toujours dans ces bureaux où l’on bat les records de taux de participation. La coalition citoyenne pour l’observation des élections au Mali, une plateforme d’organisations nationales de la Société civile a publié, à ce propos, une étude intéressante qui montre un bond notoire du nombre de bureaux avec plus de 80% de voix en faveur d’un candidat, qui était de 1326 bureaux au premier tour pour atteindre les 8050 bureauxau second tour. Les questions à se poser sont: à qui profite ce grand bond en avant? Comment est-il possible, avec un taux de participation de 34,54% à l’échelle nationale, d’obtenir 791.808 voix, soient plus de 46% du total des votes accordées à Ibrahim Boubacar Keita, en s’appuyant uniquement sur 31% des bureaux de votes? L’impact de ce vote inattendu est énorme sur le scrutin
Tableau 9 : 7073 bureaux de vote où IBK fait plus de 80% soit 791 808
- Huitième invraisemblance : Le taux anormalement bas dans le fief de Soumaila Cissé
Un fief électoral est une circonscription qu’un candidat gagne deux fois de suite. Aux élections présidentielles de 2002, 2013, ainsi qu’aux élections législatives et municipales qui se sont déroulées depuis la création de l’URD, il y a plusieurs fiefs électoraux qui votent régulièrement en faveur du candidat Soumaila Cissé. Au cours de cette élection et, comme par hasard, les taux de participation sont particulièrement bas dans ces fiefs. On note que dans des fiefs habituellement favorables à Soumaila Cissé comme Djénné, Douenza, Ténenkou et Youwarou, les taux de retrait des cartes d’électeurs étaient, en date du 16 juillet, successivement de 12,51%, 18,46%, 17,05% et 8,15%. Ce qui laisse penser qu’il y a eu une rétention systématique des cartes dans les zones traditionnellement favorables au candidat de l’URD. Sinon, comment peut- on expliquer que dans ces zones les gens ne se soient pas déplacés pour aller voter alors que dans les zones d’insécurité où, il n’y a plus grand monde, les gens se soient mobilisés en masse, pour voter à plus de 90% en faveur du candidat Ibrahim Boubacar Keita?
9.Neuvième invraisemblance: Corrélation entre le taux de participation et le pourcentage reçu par IBK
A l’analyse des résultats affichés du premier et du second tour, l’élection apparait comme un exercice de couture sur mesure où le taux de participation issu des zones grises du Nord et du Centre (vidées par les populations pour des raisons de sécurité et contrôlées par les groupes armés) dope à des taux inquiétants les suffrages exprimés en faveur du président sortant. L’impact global de ces taux, dans le résultat annoncé en sa faveur, repose essentiellement sur ce vote sur mesure. Cela pose un vrai débat sur le poids du vote de chaque citoyen. Quand on fait la corrélation entre le taux de participation et le pourcentage reçu par Ibrahim Boubacar Keita, on voit qu’il n’y a dans l’histoire électorale du Mali, aucun exemple comparable. On pourrait dire que ce sont de grands couturiers de la fraude qui l’ont élu président contre la volonté du peuple malien. Une raison supplémentaire pour rejeter les résultats de la mascarade.
- Dixième invraisemblance: Les incohérences sur le nombre de cartes reçues en rapport avec le nombre d’inscrits sur les listes électorales
L’analyse comparative du nombre de carte reçue, versus le nombre d’inscrits et les résultats affichés présentent d’incroyables incohérences. A titre illustratif, dans le cercle de Kidal, le nombre de cartes d’électeurs reçues s’élève à 18290 quand le nombre d’inscrits sur la liste électorale est de 10543. Selon la situation de retrait des cartes d’électeurs biométriques par cercle, par région et à l’étranger faite en date du 10 août 2018, il y a plusieurs cercles où le nombre de cartes reçues est bien plus important que le nombre d’inscrits. Ce qui démontre très clairement que le nombre de cartes en circulation est supérieur au nombre d’inscrits du fichier électoral. Pour rappel, nous avions dénoncé la mise en ligne du fichier parallèle où le nombre d’inscrits était différent de celui du fichier audité. Aussi, avions-nous exigé, avant le premier tour, que les bons de commande et de livraison des cartes biométriques soient remis aux candidats à l’élection présidentielle pour qu’ils vérifient si le nombre de cartes commandées correspondait au nombre d’inscrits sur le fichier électoral. Malgré les engagements du Premier ministre devant les représentants de la communauté internationale, cette promesse n’a jamais était tenue. Aussi, les incohérences sont telles que nous sommes à nous demander si toute la classe politique et toute la communauté internationale impliquée dans le processus électoral, n’ont pas été, toutes flouées sur l’authenticité du fichier utilisé.
Le Combat