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Le Drian prend ses distances avec Macron

La crise des “Gilets jaunes” a mis en lumière le recul, voire la distance prise par Jean-Yves Le Drian, qui dit “respecter” le mouvement hostile à Emmanuel Macron, au sein d’un gouvernement où cet homme d’expérience de 71 ans est en proie aux doutes. Comme son ex-collègue de l’Intérieur Gérard Collomb, reparti à Lyon début octobre, le chef de la diplomatie française – que les tours du monde n’empêchent pas de rester viscéralement attaché à sa Bretagne natale – semble sinon déçu, du moins circonspect face aux choix de l’actuel exécutif.

Interrogé lundi sur le mouvement des “Gilets jaunes”, il a ainsi évoqué sur Europe 1 la “souffrance” de Français “qu’il faut entendre, comprendre et respecter”, là où le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner plaidait d’abord la fermeté après les violences commises en marge des rassemblements. Lors d’une crise comparable en 2014, celle des “Bonnets rouges” hostiles à l’écotaxe alors décidée par François Hollande dont il était le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, un ex-socialiste, avait joué les intermédiaires en tant que président de la région Bretagne, épicentre du conflit.

Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault avait alors reculé, ce que l’actuel Premier ministre, Edouard Philippe, considère comme une erreur. “Si aujourd’hui on a un problème de financement des infrastructures, c’est sans doute parce qu’à l’époque le gouvernement a été impressionné par les ‘Bonnets rouges’”, a-t-il déclaré dimanche sur France 2, une remarque à même de froisser son ministre des Affaires étrangères.

“TOUS LES BRETONS ONT UNE PAROLE LIBÉRÉE”

Pour le député LaRem Florian Bachelier, le franc-parler fait partie intégrante de l’ADN de Jean-Yves Le Drian. “Tous les Bretons ont une parole libérée par définition. Jean-Yves Le Drian, qui a été longtemps président du conseil régional de Bretagne, a une parole aussi libre que les élus et les membres du gouvernement”, a dit à Reuters l’élu de Rennes. Des sources dans l’entourage du ministre se font toutefois l’écho de ses doutes quant au rapport du président avec des concitoyens de plus en plus critiques à son égard et aux fissures qui émaillent l’alliance “ni droite ni gauche” scellée en 2017 au sein de La République en marche.

“Quand nous avons convergé, venus de tous horizons, il y avait une appréhension dont nous nous sommes accommodés au départ. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus difficile”, dit un proche. De l’avis de certains observateurs bretons, le charme est rompu entre Emmanuel Macron et Jean-Yves Le Drian, qui fut un des premiers ralliés à l’aventure d’En marche.

“Après avoir été ministre de la Défense, avec différents conflits à gérer, il ne se retrouve plus vraiment aux Affaires étrangères dont une bonne part est prise en charge par Emmanuel Macron”, dit-on à l’Assemblée régionale. “Sans doute a-t-il été charmé et ébloui par la personnalité du président mais celui-ci s’est révélé finalement assez loin de son histoire et de ses valeurs”, ajoute cette même source. Natif de Lorient, président de la région Bretagne de 2004 à 2017 Jean-Yves Le Drian nourrirait-il pour autant des ambitions en vue des prochaines échéances électorales ?

“FIER DE SON SUCCESSEUR” À LA RÉGION BRETAGNE

Si, en Bretagne, on évoque une lassitude dans ses fonctions, un retour aux affaires locales paraît improbable, ne serait-ce que par loyauté envers son dauphin Loïc Chesnais-Girard, 41 ans. “Il est content et fier de son successeur et s’il revient en Bretagne, ce sera plutôt pour se reposer”, dit une source à la région où Jean-Yves Le Drian, réélu en 2015 malgré les critiques sur le cumul des mandats, a conservé un mandat de conseiller.

Plus sévère, un député LaRem décrit sous couvert d’anonymat un ministre “en fin de parcours” qui devrait selon lui quitter le gouvernement après les élections européennes de mai prochain. “Il a été un bon ministre de la Défense mais, passé au Affaires étrangères, il reste centré sur ce sujet, c’est-à-dire sur les relations avec quatre ou cinq pays. Or la planète est grande”, considère cet élu au fait de l’actualité diplomatique.

Pour l’heure, Jean-Yves le Drian est à la manoeuvre pour préparer les européennes, comme le montre sa présence au dîner qui a récemment rassemblé autour d’Emmanuel Macron des figures comme les anciens Premiers ministres Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin, et le commissaire européen Pierre Moscovici. “Jean-Yves Le Drian est comme à son habitude déterminé à agir à son ministère. C’est une responsabilité importante et essentielle au moment où l’on va aborder un rendez-vous avec l’Histoire qui est celui de l’Europe”, assure Florian Bachelier.

Edité par Yves Clarisse

 REUTERS

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