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Le difficile combat de la Tunisie contre ses jihadistes

L’attaque du Bardo a mis en lumière la lutte que doit mener la Tunisie contre l’islamisme radical, un problème qui a ressurgi depuis la révolution, il y a quatre ans.

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La Tunisie est encore sous le choc. En “état de guerre”, même, selon le président Béji Caïd Essebsi. Frappé au cœur de Tunis, mercredi 18 mars, à quelques mètres de ses parlementaires justement rassemblés pour débattre du projet de loi antiterroriste, le pays du jasmin doit lui aussi faire face à l’islamisme radical.

L’attentat du musée du Bardo, revendiqué par l’organisation Etat islamique, n’est pas la première attaque à toucher le pays. Depuis la révolution de 2011 et l’émergence du nouveau régime tunisien, des opposants à l’islamisme ont été visés, comme Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, assassinés en 2013. Aux frontières, de nombreux soldats ont aussi trouvé la mort après des incursions de groupes de jihadistes.

La Tunisie fournit enfin le plus gros contingent de combattants étrangers aux groupes jihadistes de Libye, de Syrie ou d’Irak. Avec près de 3 000 ressortissants sur place pour un peu moins de onze millions d’habitants, elle affiche le deuxième ratio le plus important avec 273 jihadistes par million d’habitants, après la Jordanie (321 par million d’habitants, soit 2 089 combattants).

Des centaines de salafistes libérés à la chute de Ben Ali

Pour comprendre cette situation, il faut revenir à la révolution du Jasmin. En décembre 2010, après l’immolation de Mohamed Bouazizi, un jeune Tunisien, à Sidi Bouzid, le pays se soulève contre la misère sociale. Quatre semaines plus tard, Ben Ali quitte le pouvoir. Avec lui, tombent les barreaux des geôles de son régime autoritaire. Des barreaux derrière lesquels croupissaient plus d’un millier d’islamistes. La loi d’amnistie, votée dans un élan de réconciliation, permet à “1 200 salafistes, dont 300 ont combattu en Afghanistan, en Irak, au Yémen et en Somalie”, de recouvrer la liberté, selon un haut responsable des brigades d’intervention spéciales cité par l’International Crisis Group (ICG). Au même moment, rentrent au pays de nombreux exilés, opposants politiques aussi bien que cheikhs et jihadistes.

Opprimés pendant cinquante ans, les islamistes s’exposent au grand jour. Abou Iyadh, proche d’Al-Qaïda ayant combattu en Afghanistan et condamné en 2003 à 43 ans de prison avant de bénéficier de l’amnistie, fonde Ansar Al-Charia (“Défenseurs” ou “Partisans de la charia”). Cette organisation, principalement active dans les domaines de l’aide sociale et de la prédication, entre dans la clandestinité en 2013, soupçonnée d’être à l’origine de l’attaque contre l’ambassade américaine en 2012 puis des assassinats de Chokri Belaïd et deMohamed Brahmi l’année suivante.

Des frontières poreuses avec l’Algérie et la Libye

Dans le même temps, la situation se dégrade en Libye. Le Conseil national de transition (CNT) libyen ne parvient pas à contrôler le territoire que Kadhafi dirigeait auparavant avec l’aide des tribus. Les armes du régime passent les frontières, les mercenaires se dispersent. Cet exode frappe de plein fouet le Mali et, dans une moindre mesure, la Tunisie. Mais la porosité des frontières reste un problème pour Tunis.

La frontière avec l’Algérie, notamment, est le théâtre d’attaques régulières. Ses 965 kilomètres mal sécurisés permettent de régulières incursions jihadistes. En août 2013, huit militaires tunisiens trouvent la mort sur le mont Chaambi. L’année suivante, c’est le domicile du ministre de l’Intérieur qui est visé, au pied du même massif. Juste avant de nouveaux affrontements, à l’été 2014, qui font quinze nouvelles victimes parmi les soldats.

A cela s’ajoute la difficulté, pour le gouvernement, de surveiller les combattants du groupe terroriste Etat islamique rentrés au bercail, au nombre d’un demi-millier selon Rafik Chelly, secrétaire d’Etat à la sécurité. Faute de preuves, beaucoup doivent être relâchés dans la nature. Avec un risque de passage à l’acte.

Lutte antiterroriste et Etat de droit

La jeune démocratie tunisienne est face à un défi de taille : “combattre les groupes jihadistes sans porter atteinte aux droits fondamentaux de ses citoyens”, résume le chercheur Vincent Geisser, de l’Institut français du Proche-Orient de Beyrouth, sur le site Jol Press. Pour cela, il faut se débarrasser de la précédente loi antiterroriste, votée en 2003 par le régime de Ben Ali et dénoncée par Human Rights Watch. Mais la nouvelle loi a du mal à être adoptée : une première mouture a été mise entre parenthèses après le meurtre de Mohamed Brahmi et le changement de gouvernement qui a suivi les élections législatives. Le texte venait d’arriver devant le nouveau Parlement quand l’attaque du Bardo a eu lieu.

Elle a frappé le pays au cœur de son économie, en visant le tourisme. Ce secteur représentait 7% du PIB avant la révolution et, depuis, le pays peine à attirer de nouveau les visiteurs. Le taux de chômage oscille autour de 15% et la misère offre un terreau propice à la radicalisation d’une jeunesse privée de perspectives. Et contre cela, le plus puissant arsenal législatif antiterroriste reste impuissant.

source : francetvinfo

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