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L’anti-terrorisme, un combat nouveau en Côte d’Ivoire

Appels sur l’actualité a fait le point sur la situation en Côte d’Ivoire, où l’Onuci, la Mission des Nations unies, a déployé fin mai des troupes à sa frontière avec le Mali. Dans le même temps, quelques jours plus tard, le 3 juillet, l’Assemblée nationale adoptait une loi anti-terroriste pour contrer les mouvements jihadistes et renforcer son arsenal répressif. Depuis une dizaine de jours, l’armée malienne a multiplié les opérations dans la région de Sikasso, non loin de la frontière. Notamment le 21 juillet, où deux camps auraient été démantelés et 15 jihadistes présumés arrêtés.

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Pourquoi l’Onuci envoie-t-elle des bataillons à la frontière sans qu’il y ait eu de nouvelle résolution des Nations unies ?
D’abord, il y a une certaine opacité sur les forces déployées à la frontière nord de la Côte d’Ivoire. Le gouvernement ivoirien, comme l’Onuci, ont bien annoncé qu’ils avaient envoyé des troupes pour surveiller et protéger cette zone. Mais ni les uns ni les autres n’ont voulu dire, par exemple, combien d’hommes étaient sur place. D’après ce que l’on sait pour l’instant, les forces de l’Onuci ne participent pas aux opérations de ratissage, à la traque de jihadistes, qui se passent de l’autre côté de la frontière. Ce sont les militaires maliens qui s’en chargent. Les casques bleus n’ont pas non plus procédé à des arrestations. Là encore, elles ont lieu sur le territoire malien : une quinzaine d’interpellations ont notamment eu lieu le 21 juillet. Officiellement, il ne s’agit pour les casques bleus que de faire de la présence, de la dissuasion et, ainsi, de protéger les civils d’éventuelles attaques. Et justement, protéger les civils, assurer aussi la stabilité du pays, c’est bien dans le mandat de cette Mission des Nations unies en Côte d’Ivoire. Ce sont, d’ailleurs, les termes utilisés stricto sensu dans la résolution votée en 2004 par le Conseil de sécurité à New York. Dès lors que l’action des casques bleus dans le nord reste dans ce cadre, une nouvelle résolution n’est a priori pas nécessaire.

L’Assemblée nationale ivoirienne a adopté une loi le 3 juillet pour lutter contre le terrorisme. Quel est son contenu ?
D’abord, cette loi prévoit des peines de prison : de dix à vingt ans de détention pour terrorisme ou plus exactement pour le recrutement ou l’affiliation à un groupe criminel en vue de participer à la commission d’actes terroristes. Mais elle prévoit aussi que des suspects puissent être interrogés en garde à vue deux fois 96 heures. Et cela sans l’autorisation d’un juge, uniquement à la demande du parquet – parquet qui n’est pas indépendant puisqu’il est statutairement sous la tutelle du pouvoir politique. Le texte prévoit encore la possibilité de perquisitionner de jour comme de nuit. Jusque-là, cela n’était possible que pendant la journée. Enfin, il est désormais permis aux services de renseignement de faire des interceptions de correspondances. Plus concrètement, il s’agit d’écouter des conversations, de lire des mails, par exemple, d’intercepter du courrier.

Cette loi anti-terroriste a fait naître la crainte de dérives, notamment de la part de certaines associations de défense des droits de l’homme…
Oui, le texte a été voté à l’unanimité à l’Assemblée nationale. Mais le résultat de ce vote soulève tout de même des interrogations de certaines organisations, mais aussi de députés d’ailleurs. Lorsque la loi a été étudiée en commission, certains élus ont interpellé le gouvernement à ce sujet. Ce texte donne en effet beaucoup plus de pouvoir aux forces de l’ordre, et avec très peu de contrôle. Impossible, par exemple, de savoir qui est écouté et si c’est pour de bonnes raisons. Tout cela n’est évidemment pas rendu public, et ce n’est pas ordonné par un juge – or les juges sont sensés être indépendants. La crainte, c’est qu’une loi comme celle-ci puisse être utilisée aussi à des fins politiques, notamment contre l’opposition. Une crainte d’autant plus grande que la Côte d’Ivoire est seulement à un peu plus de trois mois de l’élection présidentielle.

Le pays a-t-il réellement les moyens de faire appliquer cette loi antiterroriste ?
Tout dépend de quoi en parle. En terme de budget, la Côte d’Ivoire a l’argent nécessaire pour éventuellement recruter et payer plus de policiers. La question, c’est plutôt celles des moyens humains, de la formation, du savoir-faire. Là, effectivement, certains bons connaisseurs estiment qu’il y a désormais urgence à renforcer le secteur du renseignement, d’autant plus depuis les dernières menaces. Mais ces services sont par définition discrets, on y a très peu ou pas accès. Difficile donc pour nous, journalistes, de dire si la Côte d’Ivoire a effectivement des renseignements efficaces. Ce qu’on sait en revanche, c’est qu’en la matière, le pays bénéficie d’aide en ce moment. Il coopère avec les pays voisins, notamment avec le Mali, et avec la France via la force française en Côte d’Ivoire, qui lui apporte elle aussi des renseignements. Elle doit également former des policiers et des militaires ivoiriens à ce combat nouveau ici qu’est l’anti-terrorisme.

 

Source: RFI

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