L’Allemagne a décidé jeudi d’autoriser à nouveau les expulsions vers la Syrie, aujourd’hui interdites en raison de la situation dangereuse du pays, en les limitant, pour le moment, aux “criminels dangereux”.
Cette décision, prise lors d’une réunion des ministres de l’Intérieur des seize Länder allemands à Lübeck (nord), constitue une brèche dans l’interdiction de principe des expulsions, renouvelée tous les six mois depuis des années, vers ce pays en guerre depuis 2011.
“Il y aura une interdiction des expulsions vers la Syrie, à l’exception des crimes graves”, a affirmé Hans-Joachim Grote, le président de la conférence des ministres de l’Intérieur, selon l’agence DPA.
“Comment pouvons-nous justifier auprès des gens ici que quelqu’un qui a commis un crime grave puisse garder son statut protecteur de réfugié? A un moment donné, ces droits que nous accordons peuvent également être perdus”, a-t-il ajouté.
Cependant, cette volonté politique doit faire face à des problèmes pratiques: “Nous n’avons actuellement aucun interlocuteur en Syrie, c’est la difficulté. Mais la volonté d’expulser les criminels vers la Syrie et l’Afghanistan est bien là”, a estimé M. Grote.
Autre difficulté: si cette décision a été prise collectivement, elle constitue une position de principe qui doit encore être discutée dans chaque Land, compétent sur les questions migratoires.
Ce débat faisait rage depuis plusieurs mois, les conservateurs du parti d’Angela Merkel souhaitant de plus en plus créer cette brèche dans l’interdiction de principe pour répondre aux attentes d’une partie de leur électorat, de plus en plus tenté par le vote d’extrême droite.
Car c’est avant tout celle-ci, au travers de l’Alternative pour l’Allemagne, qui en avait fait un cheval de bataille en instrumentalisant plusieurs faits divers dans lesquels étaient impliqués des étrangers, notamment syriens.
Sur son site, le ministère des Affaires étrangères allemands continue cependant de considérer qu’aucune région en Syrie n’est sûre et que les personnes critiques à l’égard du pouvoir en place risquent “à nouveau d’en être expulsées, de subir des répressions jusqu’à mettre leur vie en danger”.
L’association d’aide aux réfugiés Pro Asyl estime de son côté que “compte tenu de la situation désastreuse des droits de l’Homme et de la situation militaire en Syrie, une extension de l’interdiction d’expulsion est essentielle”.
Elle exige une “prolongation indéfinie de l’interdiction d’expulsion pour la Syrie”.