Ce n’était pas gagné et je pense que la reine était consciente de cet enjeu : elle devait devenir la cheffe d’une union moderne et il s’agissait alors de convaincre les nouveaux dirigeants africains. La reine a accompagné l’évolution du Commewealth vers l’organisation mondiale qu’elle est aujourd’hui. La préservation de cette « famille » comme l’appelait Elizabeth II sera l’œuvre de son règne.

Elisabeth II s’est rendue vingt et une fois en Afrique. Quel bilan tirez-vous de ces voyages, sur le plan diplomatique et politique ?

En 1957, le Ghana indépendant devient membre du Commonwealth. Mais Accra est également attirée par le bloc de l’Est. La reine va jouer un rôle diplomatique extrêmement important pour maintenir le pays dans la « famille ». Lors de sa visite au Ghana en 1961, elle danse avec le président Kwame Nkrumah et se place sur un pied d’égalité avec un homme de couleur qui était peu de temps auparavant le ressortissant d’une colonie. Elle le fait à une époque où, en Afrique du Sud, l’apartheid se replie sur lui-même et où la ségrégation existe encore aux Etats-Unis.

Le Commonwealth, lui, devient multiracial. C’est à travers ses actes, qu’on devine les positions de la reine. Même si elle a souvent eu une action discrète, de l’ordre du symbole, une confiance s’est installée avec les pays africains et cela a fait d’elle une cheffe du Commonwealth légitime.

En 1979, elle se rend également au sommet de Lusaka contre l’avis de la première ministre de l’époque Margaret Thatcher et préside la signature de la déclaration contre le racisme et l’apartheid…

Source : Le Monde