Le peuple nigérien a adopté lors de la conférence nationale souveraine tenue en 1991, le principe de la démocratie pluraliste. Ce choix est matérialisé dans le préambule de la Constitution du 25 novembre 2010 en vigueur au Niger : « le peuple nigérien proclame son attachement aux principes de la démocratie pluraliste (…) ».
Ainsi, de l’unique parti Etat en 1991, le Niger compte en 2019, environ 120 partis politiques légalement reconnu par l’Etat. Le nombre des partis au Niger parait peu, comparativement au nombre des partis politiques du Mali (environ 200) et du Benin (250). Cependant, ce nombre parait beaucoup par rapport aux partis politiques qui existent au Nigeria et en Côte d’Ivoire (45 et 37 respectivement).
Il est évident que le Niger est attaché au principe de la démocratie pluraliste et non au principe de bicéphalisme comme dans d’autres part. La pluralité des partis politiques n’est pas, en soi un problème, si ces partis sont gouvernés de façon démocratique et participative.
Mais au fait, qu’est une gouvernance démocratique ? (I), qu’est-ce qu’un parti politique ? (II) et Existe-t-il une gouvernance participative au seins des partis politiques nigériens ?
Qu’est-ce qu’une gouvernance démocratique ?
Il n’existe aucune définition scientifique consensuelle du concept « gouvernance ». Ce concept tire son origine de mot grec « koberňan », qui signifie « gouverner ». Les grecques utilisaient ce concept pour faire allusion à la conduite du bateau (gouverner un bateau dans la mer). Ce concept a été appliquée à la gouvernance des hommes pour la première fois par Platon, qui de façon métaphorique parlait de « gouverner les hommes dans la citée ».
Sa première apparition dans la langue française fut à partir de XIIIe siècle. On parlait alors de « gouvernance » pour signifier le « gouvernement ». Il a fallu 1939, pour que des économistes américains l’utilise pour designer la gouvernance économique. Par la suite, en 1979, le premier ministre d’Angleterre Margaret Tatcher, l’utilise pour définir un désengagement des autorités locales vers des formes de privatisation.
Pour le besoin de cet article, nous adoptons les deux (2) définissons les plus acceptées et répandues dans communauté scientifique qui sont :
« La gouvernance, c’est la capacité des sociétés humaines à se doter des systèmes de représentation, d’institutions, de procédures, de moyens de mesure, de processus, de corps sociaux capables de gérer les interdépendances de manière pacifique ».
« La gouvernance est l’ensemble des mesures, des règles, des organes de décision, d’information et de surveillance qui permettent d’assurer un bon fonctionnement et le contrôle d’un Etat, d’une institution ou d’une organisation qu’elle soit publique pu privée, nationale ou internationales ».
Ainsi défini, peut-on parler de la gouvernance des partis politiques au Niger ?
Qu’est-ce qu’un parti politique ?
Un parti politique est une association organisée des personnes qui ont en commun une idéologie et poursuivant un même objectif, celui de conquérir et exercer le pouvoir politique. Il s’agit alors d’une association autours d’une idée, d’un projet et d’un objectif.
L’ordonnance portant charte des partis politiques au Niger, défini un parti politique comme :« une association à but non lucratif qui, conformément à la Constitution, regroupent des citoyens nigériens autour d’un projet de société et d’un programme politique, en vue de concourir à l’expression du suffrage universel et de participer à la vie politique par des moyens démocratiques et pacifiques ».
Mais pour qu’un parti soit reconnu, il faut remplir un certain nombre de critères prévu par l’ordonnance. Il s’agit des textes constitutifs (règlement intérieur et statut), qui régissent la vie de ces partis politiques. Ces textes précisent son organisation interne, son fonctionnement, ses structures et sa gestion. L’existence de structures est une condition nécessaire pour que les partis puissent perdurer, s’implanter dans le pays, travailler avec efficacité à la conquête du pouvoir, et convaincre les électeurs de soutenir le programme politique qu’il compte mettre en œuvre une fois qu’ils y auront accédé au pouvoir.
Pour son implantation dans l’ensemble des pays, comme l’exige la charte de partis politique, les partis ont besoin de chercher, conquérir et convaincre des citoyens à rejoindre leur association. Ainsi, ils enregistrent des adhérents, qui par la suite deviennent des militants. Les militants sont des personnes affiliées à un parti politique. Elles s’enregistrent et prennent la carte de membre.
Elles sont soumises au payement de la cotisation, généralement d’un faible montant, en guise de contribution à la gestion et la survie du parti. Il faut rappeler que l’adhésion a un parti politique par une personne est un contrat entre la personne et le parti. La personne s’engage ainsi à respecter l’idéologie, les valeurs, les principes et d’accomplir ses devoirs envers ce parti. Le parti (les dirigeants) s’engage à respecter les droits du militant vis-à-vis des textes.
Les partis politiques sont des organisations, ayant des règles de fonctionnement, des organes de décision ; des objectifs à atteindre et une orientation politique stratégique. Cependant dans leur fonctionnement actuel, peut-on affirmer qu’il y’a une bonne gouvernance dans les partis politiques nigériens ?
Existe-t-il une gouvernance participative au sein des partis politiques nigériens ?
Pour répondre à cette question, nous allons analyser trois (3) points.
Le respect de textes constitutifs
Au Niger, il existe environ 120 partis politiques qui se sont conformés à la disposition de l’ordonnance portant régime des associations au Niger, par conséquent légalement reconnu par l’Etat. Hormis le respect des lois et règlements de la République qui incombe à chaque personne physique ou morale vivant ou installé sur le territoire nigérien, les partis politiques ont l’obligation de respecter et de faire respecter leurs textes constitutifs dans leur fonctionnement interne.
Selon les partis, le règlement intérieur du parti défini la durée du mandat légal du président. Il est généralement de Cinq (5) ans renouvelable une seule fois. Même si cette durée n’est pas expressément dite dans les textes constitutifs, il est évident que chaque parti a défini une durée normale de cinq (5) ans pour la tenue de son congrès électif. C’est une instance qui en principe, permet de renouveler les instances dirigeant du parti. Qu’en est-il dans la pratique ?
De l’histoire des partis politiques au Niger, aucun parti politique n’a eu à faire une alternance démocratique à son sein. Les présidents de partis peuvent faire autant de mandat possible qu’ils le souhaitent. La seule occasion pour qu’un président d’un parti cède sa place pacifiquement à un autre, c’est lorsque ce président est élu Président de la République à l’issu des échéances électorales. Nul besoin de citer le nom d’un parti, le cas fait légion. Le rare cas où il y’a alternance c’est après une crise interne et que toutes les voies de recours judiciaires sont épuisées. En cette circonstance, le président quitte le parti en conflit et crée un nouveau parti pour en être le président.
Le parti politique est en quelque sorte la propriété de son fondateur, aucun militant n’a le droit d’oser de parler d’une alternance démocratique. Seul le président et quelques personnes acquises à sa cause ont le droit de décider du sort du parti. Toute voix discordante est taxée de rébellion ou de dissidente !!
L’égalité entre tous les militants du parti.
En principe, tous les militants ont le même droits et devoirs vis-à-vis du parti. Les hommes et les femmes devraient être traités à égalité, sans discrimination aucune. Chacun de 120 partis politiques nigériens est conscient de rôle très capital que jouent les jeunes et les femmes dans l’environnement politique nigérien.Les jeunes et les femmes sont-ils traités au même pieds d’égalité que les autres ténors du parti ? Sont-ils représentés dans les instances de prise de décision des partis politiques ? Sont-ils investi candidat des partis aux élections à tous les niveaux (présidentielles, législatives et locales) ?
Les femmes et les jeunes sont les couches les plus vulnérables et politiquement exploitées. Ils sont des forces mobilisatrices et engagées pour la défense de l’idéologie du parti. Ils mobilisent les militants pour leurs partis politiques lors des échéances électorales. Ces femmes et ces jeunes sont généralement organisées dans les organisations des masses (Organisation des femmes du parti et organisation des jeunes du parti). D’autres partis plus stratèges ont inventés d’autres structures parallèles des jeunes et des femmes pour les rediriger afin qu’ils oublient le bureau politique national. Ils ne sont pas représentés au bureau politique national qu’à travers les président (e)s des organisations de femmes et jeunes.
Représentation du parti
Le texte réglementaire exige aux partis politiques d’avoir un siège national et des représentations régionaux. Qu’ils soient implantés sur l’ensemble du territoire national. De 120 partis politiques que compte le Niger, n’est pas une vingtaine (20) qui a un siège national et est effectivement représentée sur l’ensemble du territoire ? Au Niger, certains partis n’ont comme militants que leurs présidents et leurs familles, et dont les sièges sont le « ghetto » de la résidence de leurs présidents.
Participation aux élections
L’objectif de tout parti politique est la conquête et l’exercice du pouvoir public dit-on. Telle n’est pas le cas pour tous les partis politiques du Niger. Des partis politiques sont créés juste pour soutenir le candidat d’un parti bien implanté et avoir leurs parts du gâteau une fois le candidat de ce parti est élu. Le plus pessimiste, quant à eux, créent des partis politiques pour siéger à la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI).
Au Niger, il est aisé de trouver de partis politiques qui n’ont jamais participé à aucune élection et cela à tous les niveaux (locales, législatives et présidentielles). Un parti politique qui ne participe pas aux élections et qui n’a aucun programme pour y participer, est-il vraiment un parti politique ?
La démocratie pluraliste est-elle synonyme de la création de multi-entreprise unipersonnelle à responsabilité familiale ?
Référence
Constitution du 25 novembre 2010
L’ordonnance portant charte des partis politiques au Niger
L’ordonnance portant régime des associations au Niger
G. Hermet, A. Kazancigil et J.-F. Prud’homme (dir.), La gouvernance. Un concept et ses applications, Paris, Karthala, 2005
J.-M. Châtaigner et H. Magro (dir.), États et sociétés fragiles. Entre conflits, reconstruction et développement, Paris, Karthala, 2007.
Chronique d’une conférence de citoyens : L’avenir des espaces ruraux, by Pierre-Yves Guihéneuf
Question sur la gouvernance et la subsidiarité active débats de Caire Novembre 1999, par Pierre Calame.
Source: Tamtaminfo.com