Cela fait maintenant longtemps que les forces françaises réclament des hélicoptères de transport lourd [HTL], dont la plupart de leurs homologues européennes sont pourtant équipées, alors qu’elles ne connaissent pas le même degré d’engagement opérationnel. Et si l’hypothèse de s’en procurer a été avancée lors de l’élaboration de l’actuelle Loi de programmation militaire [LPM], il n’en a finalement rien été. Ce qui visiblement contrarié le général Jean-Pierre Bosser, l’ex-chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT]…
Pourtant, le besoin est avéré, comme le démontre quotidiennement l’engagement de trois CH-47D Chinook de la Royal Air Force [RAF] depuis Gao [Mali], au profit de la force française Barkhane.
Depuis leur arrivée au Sahel, en juillet 2018, ces trois appareils ont en effet effectué 1.600 heures de vol pour transporter 800 tonnes de fret et 11.000 militaires. Outre ces missions de transport, les CH-47D Chinook britanniques apportent plus de flexibilité dans les opérations menées par Barkhane, comme par exemple avec la procédure dite du « Kangourou ». Pouvant emporter jusqu’à 2.000 litres de caburtant grâce à des bacs souples, ces machines permettent le ravitaillement d’autres hélicoptères sans qu’il y ait besoin de déployer un plot logistique par voie terrestre.
« Cette capacité nous permet de nous consacrer à des missions d’aérocombat pendant que nos camarades britanniques assurent logistique, ravitaillement et transport de troupes », a fait valoir le commandant Groupement tactique désert aérocombat [GTD-A] de Barkhane, auprès de l’AFP. Sans les moyens de la RAF, « nous serions obligés d’attribuer d’autres hélicoptères ou de revenir à des convois routiers plus lents, forcément plus risqués. » Et d’ajouter : « Pour nous, ce serait un réel plus si cette capacité restait au-delà de l’été 2020 ».
L’officier de l’Aviation légère de l’armée de Terre [ALAT] s’exprimait à l’occasion d’un déplacement à Gao des généraux Philippe Lavigne et Mike Wigston, respectivement chefs d’état-major de l’armée de l’Air et de la Royal Air Force.
Or, en juillet dernier, Londres a déjà a annoncé la prolongation, pour au moins six mois, de l’engagement de ses trois CH-47D Chinook au Sahel. Et rien ne dit, pour le moment, que cette mission sera à nouveau prolongée, comme le souhaitent les forces françaises.
« Le Royaume-Uni reconnaît que le Sahel est actuellement la ligne de front de l’instabilité. Notre présence vise à sécuriser le Sahel mais aussi à protéger l’Europe », a commenté le général Wigston. « Nous faisons une vraie différence ici et je suis heureux d’entendre à quel point cet apport est vital pour Barkhane. Je transmettrai le message aux autorités à Londres », a-t-il ajouté.
Reste que le Royaume-Uni a déjà annoncé le déploiement, en 2020, de 250 militaires au sein de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali [MINUSMA]. Aussi, d’après l’AFP, on s’interroge à Londres pour savoir s’il sera possible de maintenir en même temps l’engagement des trois hélicoptères de la RAF auprès de Barkhane. En clair, la décision sera politique, à l’heure où la France et le Royaume-Uni célébreront, l’an prochain, le 10e anniversaire des accords de Lancaster House, qui ont renforcé leur coopération militaire.
Par ailleurs, les deux hélicoptères de transport lourd AgustaWestland AW101 promis par le Danemark à la force Barkhane sont arrivés à Gao. Ils devraient être opérationnels d’ici janvier.
Quoi qu’il en soit, lors d’une récente audition à l’Assemblée nationale, le général Philippe Lavigne avait souligné « tout le bénéfice des hélicoptères de transport lourd [HTL] dans le cadre de l’opération Barkhane. » Et d’ajouter : « En liaison avec des partenaires comme l’Allemagne, le Canada et le Royaume-Uni, nous examinons la possibilité de former des pilotes et réfléchissons en parallèle à la location de ce type de capacité. »
Source : Zone militaire