Alors que les hiérarques de la Coordination des mouvements armés (CMA) n’attendent que l’on touche à l’Accord pour la paix et la réconciliation, à des fins de relecture, tel que recommandé par le Dialogue National Inclusif (DNI), pour en sortir ; la troisième compagnie du Bataillon des Forces Armées Reconstituées (BAT-FAR), arrive à Kidal. A la sauce de quel deal entre les militaires et les ex-rebelles, les Maliens ont-ils été mangés ?
Pour des raisons de sécurité, plus précisément pour se prémunir d’hypothétiques embuscades ou de pose d’engins explosifs improvisés (EEI), par les jihadistes, la hiérarchie militaire, apprend-on, a gardé low profile, durant toute la phase de préparation et de déploiement de cette troisième compagnie qui est composée de soldats de l’armée régulière, de combattants de la Plateforme des mouvements du 14 Juin d’Alger et de la Coordination des mouvements de l’Azawad.
C’est au terme de l’opération que les sources militaires ont porté l’information à la connaissance de l’opinion nationale et internationale.
« La Troisième Compagnie du Bataillon des Forces Armées Reconstituées (BAT FAR) a pris le départ sur Kidal, le mercredi 23 juin 2021 pour y arriver le vendredi 25 juin 2021. Le départ a été fait en présence du Com-Théâtre Est de l’Opération Maliko, le colonel-major Toumany KONE et des conseillers du CEM-GA et du CEM-AT, les colonels Mamadou S. TRAORE et Saybou KANTE chargés de coordonner ce départ.
Après une première et une deuxième compagnie, la troisième composée de 139 éléments est enfin arrivée dans la capitale de l’Adrar des Ifogas. Et cela malgré les attaques aux EEI des groupes armés terroristes.
Il s’agit d’une étape décisive dans la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation nationale issu du processus d’Alger », lit-on dans le communiqué rendu public a posteriori.
Si l’on peut se réjouir de cette nouvelle avancée dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, l’enthousiasme est tempéré dès lors qu’il s’agit d’un processus de déploiement enclenché, il y a plus d’un an. Et pour cause.
‘’La troisième compagnie du Bataillon des Forces Armées Reconstituées a pris le départ pour Kidal, le mardi 5 mai 2020, devant la cour du Mécanisme Opérationnel de Coordination (MOC) de Gao. C’était en présence du commandant des théâtres des opérations «Maliko» de Gao, le général de Brigade Ouahoun Koné.
Après le départ des deux premières compagnies sur Kidal, en février dernier, la troisième compagnie a mis le cap sur la capitale de l’Adrar des Ifoghas (Kidal). Ce retour des FAMa reconstituées à Kidal s’inscrit dans le cadre de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger’’.
Mais, cette 3e compagnie du BAT-FAR n’a pas mis pied à terre à Kidal, en raison de fortes résistances de la Coordination des mouvements de l’Azawad. En effet, apprend-on, la compagnie a été stoppée en chemin, non loin d’Anefif, par des groupes armés de la CMA, à cause d’un problème de commandement, a expliqué un responsable de la Plateforme.
«Les gens de la CMA pensent que dans le commandement, il devrait avoir un capitaine. Et que leur capitaine qui a fait le processus DDR a été déclaré inapte », déclare Fahad Ag Almahmoud.
Il ajoute aussi que la CMA souhaite que le bataillon soit dirigé par « le même capitaine qui a été blessé lors de l’attentat du MOC de Gao».
Il existe un problème dans la chaîne de commandement mais aussi de logistique, affirme un responsable de la CMA.
Toutefois, «on devrait avoir 45 officiers qui devraient intégrer ce bataillon. Les services de santé de l’armée ont dit que 21 de nos officiers sont inaptes », souligne Mohamed Ould Mahmoud, porte-parole de la CMA.
«Nous avons demandé à remplacer ces 21 soldats avant tout redéploiement. Même si on a le chef du bataillon, il faudrait au moins qu’on complète la chaîne du commandement », a-t-il déclaré.
Ce blocage dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation n’a suscité aucune réaction de la part des autorités nationales.
Seul l’ambassadeur de France au Mali a jugé bon de protester face à ce blocage.
‘’Aujourd’hui (mercredi 27 mai 2020), il y a la réunion de la CTS (NDLR : Commission Technique Mixte de Sécurité), c’est le représentant de l’ambassade de France qui a affirmé son incompréhension du fait que la CMA a refoulé la 3e compagnie de l’armée dite reconstituée. Selon le compte-rendu qui m’a été fait, aucun représentant du gouvernement n’a bronché sur ce sujet.
Demain les mêmes officiers vont nous dire le problème c’est tel pays, tel État pendant qu’eux avaient raté juste l’occasion de dire: ce n’est pas NORMAL’’, a publié un observateur.
Mais, la 3e compagnie du BAT-FAR étant rentrée à Kidal, c’est logique que l’on s’interroge sur la sauce à laquelle les Maliens ont été mangés. Est-ce la Commission DDR a capitulé et intégré des combattants déclarés inaptes par les services de santé de l’Armée ? Cette hypothèse n’est pas à écarter. Est-ce qu’il y a eu un deal secret entre les militaires qui se sont fait un point d’honneur d’appliquer l’Accord dès leur avènement et la CMA ? Cette hypothèse est également des plus plausibles, dès lors que l’on sait qu’on peut presque tout obtenir de la CMA dès lors qu’on sait se montrer persuasif par ses largesses.
Il faut rappeler que c’est le 10 février 2020 que les premières unités de l’armée reconstituée quittaient Gao pour la ville de Kidal. Le13 février elles sont arrivées à Kidal et dans le camp N°1 où elles se sont installées.
PAR BERTIN DAKOUO
Source : INFO-MATIN