INTERVIEW (PRESQUE) IMAGINAIRE
En franchissant la porte de l’immense salon, nous nous retrouvons, nez à nez, avec le président de la Rue publique, confortablement, assis à la table à manger. Devant lui, un gros plat de riz à la sauce pâte d’arachide, décoré de « fronto-bani ». Comme chez tout bon Maninka qui se respecte. C’était, samedi dernier, aux environs de 9 heures, à sa résidence privée de Sébénikoro. Interviou.
Mr le président, c’est votre petit-déjeuner ou votre déjeuner ?
Qu’est-ce que ça peut te faire ?
Pour les Maliens, c’est du rognon, du foie gras, du pain avec de la confiture… que vous prenez le matin, avant d’affronter votre journée de travail.
Toi –même, tu vois mon petit-déjeuner, non ? C’est du riz à la sauce pâte d’arachide.
Pourquoi ce régime alimentaire ?
C’est pour me mettre en forme, en attendant le sommet de Pau, en France. Car, Mahamadou Issoufou, Déby Itno, Mohamed Ould Cheick Ghazouani, Rock Marc Christian Kaboré et moi devrions cracher nos quatre vérités, les yeux dans les yeux. Cela requiert de l’énergie, beaucoup d’énergie.
Allez-vous réellement dire à Macron ce que les Maliens pensent de lui, de la France et de Barkhane ?
Pourquoi pas ? Ce sont les Maliens qui m’ont élu à plus de 77 % des voix, au second tour, en 2013, comme en 2018.
Et pourtant, c’est tout le contraire que Macron entend vous dire, à Pau, le 16 décembre prochain : réprimer toute critique à l’égard de la France ou de son armée.
La liberté d’expression est garantie par notre constitution. Voici la réponse à sa question.
Rock Marc Christian Kaboré a déclaré que « De part et d’autre nous avions des choses à clarifier ». Et vous, qu’en dites-vous ?
Je serai à Pau, inchallah, le 16 décembre prochain, pour transmettre le « Tchikan », le message du peuple malien au président français. Il est temps, vraiment temps, qu’on se disent certaines vérités. Advienne que pourra !
Au Niger, les populations ont battu le pavé pour demander au président Issoufou de ne pas se rendre à ce qu’elles appellent la « convocation » de Macron.
Pourquoi ne pas s’y rendre ? C’est l’occasion ou jamais d’affirmer et de réaffirmer la souveraineté de nos pays à la face de la France et de la communauté internationale.
Et si Macron décidait de retirer sa troupe du Mali ?
Et alors ? Avant l’arrivée de Barkhane au Mali, le Mali n’existait pas ? je rappelle à tous, que le Mandé existait avant la Gaule. En d’autres termes, quand les Egyptiens construisaient des pyramides, les Gaulois (les Français d’autrefois) s’habillaient avec des peaux d’animaux et logeaient dans des grottes.
Les réseaux sociaux annoncent un remaniement ministériel à la fin de l’année. Est-ce vrai ?
Ce sont des fadaises !
C’est à dire ?
Des conneries ! Vous ne comprenez pas français ou pas ?
Qui sera le futur Premier ministre ?
Tu ne m’écoutes pas ou quoi ? Il n’y aura remaniement ministériel que quand je l’aurais décidé.
Ce sera pour quand ?
Quand je l’aurais décidé ?
Vous le déciderez quand ?
Quand je l’aurais jugé nécessaire !
Sous d’autres cieux, le chef de la Minusma à Kidal n’aurait pas passé 24 heures de plus au Mali, après la déclaration qu’il a faite au congrès du MNLA. Pourtant, vous n’avez fait aucune déclaration à ce sujet. Pourquoi ?
Qui vivra, va verra !
Allez-vous demander à Christophe Sévillon de quitter le Mali, à votre retour de Pau ?
Qui vivra, va verra !
Votre homologue béninois, Patrice Talon, a fait la même chose avec le représentant de l’Union européenne dans son pays…
Le Mali n’est pas le Bénin, mais Christophe Sévillon apprendra, à ses dépens, que Kidal, c’est le Mali.
C’est à dire ?
Qu’il quittera Kidal, donc le Mali.
Aux dernières nouvelles, votre homologue du Niger aurait déclaré qu’il ne se rendrait pas à Pau, le 16 décembre prochain. Qu’en pensez-vous ?
Là, ça change tout !
Mieux, il aurait demandé à ce que les troupes françaises quittent son pays.
Ah bon ? Cela donne à réfléchir. Bon, on se verra le week-end prochain, inchallah.
Propos recueillis par Le Mollah Omar
Source: Journal le Canard Déchainé