Dans une interview qu’il a bien voulu nous accorder, le député élu à Yanfolila, Yaya Sangaré, invite le peuple Adema-PASJ “à résister à la fascination des marchands d’illusion qui ont fait irruption dans notre parti, surtout à résister farouchement à ceux et celles qui veulent transformer le cours du processus de réconfort du parti à leurs seuls avantages, à ceux et celles, par malice, qui veulent transformer son enthousiasme militant en fonds de commerce politique”.
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Ça bouillonne à l’Adema-PASJ, en cette veille de la présidentielle. Quel message avez-vous à envoyer à vos militants désemparés et aux Maliens ?
L’Adema-PASJ a réellement besoin d’aide pour se sortir de cette situation. Il est vrai que les hommes politiques ne sont parfois ni raisonnables ni parfois logiques. Mais, il faut quand même admettre qu’il est difficile de construire le pays durablement sans eux.
Nous devons nous battre pour que le banditisme politique ne prospère pas dans nos formations politiques au risque de les vider des leurs vrais militants politiques au profit des opérateurs économico-politiques. A la différence des premiers qui sont dédiés toute âme au combat politique intelligent, les seconds avec des subterfuges diaboliques entraînent nos formations politiques dans des aventures sans issue. Je rappelle à ce propos que la valeur d’un vrai homme politique ne se mesure pas forcément à son argent, ni à ses possessions, encore moins à ses accoutrements vestimentaires luxueux. Sa valeur se mesure beaucoup plus par sa personnalité, sa fidélité à des principes et valeurs moraux, son intégrité, son courage dans ses convictions, son indépendance d’esprit, sa capacité à aimer la Vérité même amère, sa maturité, sa foi, sa Droiture en toutes épreuves, ce qui est encore plus important, sa crainte d’Allah (sa foi).
J’invite donc le peuple Adema-PASJ à résister à la fascination des marchands d’illusion qui ont fait irruption dans notre parti, surtout à résister farouchement à ceux et celles qui veulent transformer le cours du processus de réconfort du parti à leurs seuls avantages, à ceux et celles, par malice, qui veulent transformer son enthousiasme militant en fonds de commerce politique. J’invite les vrais militants à poursuivre imperturbablement la voie royale qu’ils se sont tracés pour aboutir à des options politiques majeures qui n’ont d’autres déterminants que le Mali et les Maliens. J’invite chacun et chacune à œuvrer pour la concorde entre les militants, à privilégier le chemin de la paix et de la réconciliation, un chemin certes rocailleux, mais qui conduit inéluctablement à des lendemains meilleurs. Rien, encore moins personne ne doit détourner les militants de la “Ruche” de cet objectif noble. Même en politique, nous devons savoir rester sincères, honnêtes et loyaux ; la fin ne justifiant pas toujours les moyens.
Le débat sur la candidature interne ne risque-t-il pas d’affaiblir davantage l’Adema dans le jeu politique malien ?
C’est pourquoi j’appelle les responsables et militants du parti à un usage responsable et modéré des médias et réseaux sociaux dans la gestion de la situation actuelle du parti. Pour la simple raison que beaucoup parmi ceux qui sont sur ces médias pour vilipender le parti, sont ou ont été ministres, soit PDG, soit directeurs nationaux, ou encore membres de cabinet pendant l’exercice du pouvoir d’IBK, sans l’avis du parti. Si pour des raisons que les vrais militants de l’Adema-PASJ ignorent, ils ont été remerciés sans les précautions d’usage habituelles, il ne revient pas au parti d’en pâtir. Nous aurions aimé que ces personnes-là se prononcent, en son temps, de façon tout au moins objective sur les questions vitales du pays, au lieu d’attendre la veille de la présidentielle pour se positionner en justicier d’un régime auquel ils ont activement participé. Hélas ! Le peuple malien sait observer et voit tout. Arrêtons donc de tromper le peuple et le parti Adema-PASJ. Le débat sur la candidature interne est un faux débat, car le vrai enjeu qui se profile, c’est la propension de certains cadres à vouloir transformer notre parti en un instrument de propagande personnelle ou de règlement de comptes. De notre point de vue, quand un parti politique veut gagner une élection, il se doit de rassembler toutes ses forces, toutes ses intelligences, toutes ses richesses, au-dedans comme au-dehors. Quand ce minimum est bafoué par les “Plus Sages”, on ouvre les portes des dérives aux “Plus Idiots”. Et c’est la délectation pour les adversaires. Par ces mots, je ne veux rien dire pour nuire, mais je ne me tairais pas, non plus pour plaire.
Le peuple est suspendu à la décision de votre parti d’être dans la course pour la présidentielle. Seriez-vous ou pas ?
La candidature interne du parti pour la présidentielle de 2018, telle que posée dans la presse est un vrai faux problème. Quel est ce militant convaincu de l’Adema-PASJ qui s’opposerait à la conquête et l’exercice du pouvoir d’Etat par son parti, qui est de surcroît sa raison d’être ? Dans le cas présent, si l’Adema-PASJ devrait avoir son propre candidat face à une éventuelle candidature d’IBK, il lui revient, en toute responsabilité, de tirer les leçons, et toutes les leçons de son passé lointain et récent en la matière. Refuser un tel examen conduit inéluctablement à suicide collectif. La conquête du pouvoir d’Etat est un exercice méthodique qu’on mène avec plus de raison que de passion ou de simple enthousiasme militant. Elle demande plus de concentration, plus d’orientation.
Alors, pourquoi et comment l’Adema-PASJ a choisi et présenté son candidat à la présidentielle en 2002 et en 2013 ? Pourquoi, il n’a pas choisi ni présenté de candidat en 2007 ?
En 2002 comme en 2013, il en a résulté des conséquences désastreuses pour le parti qui ont occasionné des fractures séismiques, des départs importants. Il a fallu tout le génie imaginatif de certains cadres pour éviter la noyade collective au parti. Ces événements douloureux dans nos rapports politiques et sociaux sont si récents et si vivaces dans nos mémoires que chacun se doit de mesurer ses propos et ses comportements pour préserver l’essentiel. En 2002, malgré le choix du candidat à la suite des primaires âprement disputées, certains cadres, pas des moindres, sous la houlette d’IBa N’Diaye ont décidé de s’opposer ouvertement au candidat désigné ; en 2012 avec l’élection présidentielle avortée et en 2013, les choix de Dioncounda TRAORE et de Dramane DEMBELE ont laissé des plaies non encore cicatrisées. N’y revenons pas sur tout, mais il est bon de les avoir à l’esprit pour éviter les confusions.
Dans le débat sur la candidature de l’Adema-PASJ, la forme est en train de déterminer le fond de la question. En aucun cas, le parti ne devrait sortir de ce probable choix du candidat encore plus divisé, davantage affaibli, prêt à perdre qu’à gagner comme il a été observé ces dernières années. Pour rester conforme à l’esprit de la retraite du comité, si par mésaventure, le parti devrait choisir son candidat, en dehors d’une forte coalition de partis politiques, il devrait se donner les moyens de cibler en son sein, une personnalité autour de laquelle le consensus interne est possible et réussir un vaste rassemblement au-delà du parti. Une personnalité capable de faire adhérer à son nom le plus grand nombre de militants et des électeurs. En tout état de cause, notre parti doit éviter les primaires dont l’issue a toujours été le déchirement, la division et, partant l’échec aux dernières élections présidentielles. Nous ne devons aucunement nous enfermer dans une option rigide et immuable, étant entendu que le contexte, les acteurs et même les analyses, en ces temps d’instabilité socio-politique, sont en perpétuel changement. La retraite politique a proposé plusieurs options, toutes complémentaires. Aucune de ces options n’étant gagné d’avance, il convient aux militants de l’Adema-PASJ de se donner le temps et les moyens pour faire le meilleur choix possible. Dans tous les cas, quelque soit l’option à privilégier, seuls les intérêts supérieurs du Mali et du Parti doivent être sauvegardés.
Propos recueillis par Oumar Sidibé
Source: L’indicateur du Rénouveau