François Hollande a célébré samedi l’unité et défendu les “valeurs” de la France, la “liberté d’expression”, face aux manifestations parfois très violentes qui ont continué d’agiter le monde musulman contre la caricature du prophète Mahomet en Une de Charlie Hebdo.
L’enquête sur les attentats de la semaine dernière, qui ont tué dix-sept personnes dont douze dans l’attaque contre l’hebdomadaire satirique, se concentre sur les douze personnes arrêtées dans la nuit de jeudi à vendredi en région parisienne. Leurs gardes à vue ont été prolongées samedi de 24 heures et pourraient l’être encore pour 48 heures dimanche.
Ces huit hommes et quatre femmes sont interrogés sur le “possible soutien logistique” qu’ils sont susceptibles d’avoir apporté – notamment des armes et des véhicules – à Amédy Coulibaly, l’auteur de la prise d’otages sanglante au supermarché casher, selon une source judiciaire.
De source proche de l’enquête, on a expliqué samedi qu’ils nient à ce stade avoir été au courant des desseins de Coulibaly.
Selon une source policière, les enquêteurs ont effectué ces derniers jours de nombreuses filatures de personnes repérées à partir d’éléments ADN et d’écoutes téléphoniques dans l’entourage présumé des frères Kouachi – les tueurs de Charlie Hebdo – et surtout de Coulibaly.
Au Yémen, deux Français liés à Al-Qaïda dans la péninsule arabique, qui a revendiqué l’attaque contre Charlie Hebdo, ont été arrêtés, sans que l’on sache s’il étaient en lien avec les jihadistes parisiens.
L’un des trois auteurs des attaques, Saïd Kouachi, a été enterré vendredi à Reims, où il était installé, en présence de membres de sa famille et sous surveillance policière. La sépulture est anonyme, pour éviter qu’elle ne se transforme en lieu de pèlerinage. Son frère Chérif devrait être enterré à Gennevilliers (Hauts-de-Seine).
– ‘Unité nationale’ –
L’édition des “survivants” de Charlie Hebdo continue de s’arracher: près de 2,7 millions de copies ont déjà été vendues depuis mercredi, et elle va être réimprimée pour atteindre le record de sept millions d’exemplaires.
Mais dans plusieurs pays musulmans, la caricature de Mahomet, la larme à l??il et une pancarte “Je suis Charlie” dans les mains, passe mal.
De nouvelles manifestations ont eu lieu samedi, notamment au Yémen et surtout au Niger, où la contestation continuait de se propager à travers Niamey. Au moins sept églises, pour la plupart évangéliques, ont été incendiées dans la capitale nigérienne. Des bars, hôtels ou commerces appartenant à des non-musulmans ou tenant enseigne pour des entreprises françaises ont été détruits.
Face à ces émeutes, l’ambassade de France a appelé ses ressortissants à “éviter toute sortie”.
Après la prière du vendredi, plusieurs manifestations avaient déjà eu lieu contre cette nouvelle caricature du prophète. Elles ont parfois dégénéré. Quatre personnes sont mortes et 45 ont été blessées à Zinder, deuxième ville du Niger.
A Nouakchott (Mauritanie) et Dakar (Sénégal), un drapeau français a été brûlé.
En visite samedi dans son fief corrézien de Tulle, François Hollande a rappelé, notamment aux pays “soutenus” par Paris “dans la lutte contre le terrorisme”, que la France avait “des principes, des valeurs”, “notamment la liberté d’expression”. Il a jugé “intolérable” que des drapeaux français soient brûlés.
Le président a aussi condamné les “tensions” à l’origine de “comportements inadmissibles”, alors que la justice française a multiplié depuis dix jours les procédures, notamment pour apologie du terrorisme ou actes contre des mosquées.
En dépit du traumatisme des attentats, dont la menace a atteint la Belgique voisine où une cellule jihadiste a été démantelée jeudi, le chef de l?État a surtout voulu faire passer le message que “la vie continue”. Il a invoqué “l’esprit du 11 janvier”, quand près de 4 millions de personnes ont marché dans toute la France contre le terrorisme, et célébré “l’unité” de la “communauté nationale”.
A droite, le président de l’UMP Nicolas Sarkozy a aussi défendu “le devoir d’unité nationale” face au “fanatisme de l’islam radical” et à la “barbarie jihadiste”.
Mais près de huit Français sur dix voient la mobilisation citoyenne comme “un mouvement ponctuel lié à l’émotion”, selon un sondage publié samedi. Et 76% seraient favorables à des “mesures d’exception” quitte à limiter les libertés, selon cette étude Odoxa pour Le Parisien/Aujourd’hui et iTÉLÉ.
Par Rémy BELLON et Jacques CLEMENT | AFP
Source: AFP