« La lutte que nous menons doit être une préoccupation pour tous, surtout le Sénégal, unique pays limitrophe de la Gambie », a déclaré l’ancien ministre et opposant gambien, Amadou Scattered Janneh, jeudi 2 juin à l’issue d’un forum de deux jours à Dakar, réunissant notamment des opposants et des activistes gambiens.
Amadou Scattered Janneh a qualifié de « tragique la situation des droits de l’Homme » sous le président gambien Yahya Jammeh et prôné des moyens « pacifiques » et des « sanctions contre son régime, mais pas forcément économiques, pour éviter de nuire à la population ».
« Lorsque la case de votre voisin brûle, si vous avez de l’eau, allez éteindre le feu », a renchéri l’activiste gambienne Fatoumatta Tambanjang, en appelant au Nigeria, principale puissance régionale, et à son président Muhammadu Buhari. Mme Tambanjang a dit privilégier des sanctions ciblées comme « le gel de leurs avoirs (de Jammeh et de ses proches), les empêcher de voyager ».
À six mois de la présidentielle
Amnesty International a pour sa part appelé la communauté internationale en général, et la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) Cedeao en particulier, à accroître la pression sur la Gambie.
Outre une commission d’enquête qui serait chargée de se pencher sur la répression récente de manifestations de l’opposition, Amnesty International demande à la Cedeao d’envisager la possibilité de suspendre la Gambie si aucune avancée n’est réalisée sur le terrain des droits humains, selon un communiqué de l’ONG jeudi.
Dans son rapport rendu public à l’avant-veille d’un sommet de la Cedeao dans la capitale sénégalaise et à six mois de l’élection présidentielle en Gambie à laquelle Jammeh est candidat, Amnesty affirme que l’espace déjà très réduit concédé à toute forme de dissidence en Gambie s’est encore rétréci sous l’effet d’une répression accrue.
Au moins 36 personnes arrêtées lors d’une manifestation le 9 mai sont actuellement détenues sans inculpation
« Les atteintes répétées visant les médias, l’opposition et les militants des droits de l’Homme ont instauré un climat de peur qui s’est propagé à d’autres composantes de la société dans lesquelles l’autocensure s’impose largement », selon le document.
« Le prix à payer de la dissidence en Gambie est apparu clairement lors de larépression de rares manifestations en avril, qui se sont soldées par l’arrestation de dizaines de personnes, dont le chef du Parti démocratique uni (UDP), Ousainou Darboe, et la mort en détention d’un autre dirigeant de ce parti d’opposition, Solo Sandeng », indique l’ONG.
« Une longue histoire de répression brutale »
« À l’heure actuelle, 51 personnes sont en cours de jugement », selon le document, ajoutant que « Solo Sandeng est mort en détention des suites de tortures perpétrées à l’Agence nationale de renseignement (NIA) ».
« La Gambie a une longue histoire de répression brutale des voix critiques, et des manifestants tels que Solo Sandeng ont payé un prix élevé pour avoir mené des actions de protestation pacifiques », déplore Amnesty.
Selon le rapport, d’autres personnes ont été gravement blessées et torturées à la NIA alors qu’au moins 36 personnes arrêtées lors d’une manifestation le 9 mai sont actuellement détenues sans inculpation.