Capter autant que possible la valeur ajoutée pour les différentes productions du pays, c’est l’ambition des autorités ivoiriennes. Parmi ces productions, il y a le coton, dont la fibre est essentiellement vendue à des négociants pour l’exportation, mais une partie des graines est transformée sur place par des triturateurs, pour faire de l’huile et des tourteaux, destinés à l’alimentation du bétail. Mais parmi ces triturateurs, Olheol Industries se plaint de manquer de matières premières.
Ayant racheté l’ex-société Trituraf de Bouaké en 2009, Olheol Industries a du mal à faire tourner ses machines depuis 2016, faute de graines de coton, « alors que l’État avait promis de [lui] garantir » l’achat de la matière première localement. La réaction de Frédéric Komenan, directeur général de l’activité industrielle au ministère du Commerce et de l’Industrie.
« Lorsque le problème nous a été posé, nous avons initié, en collaboration avec le ministère de l’Agriculture, des concertations entre égreneurs et triturateurs, pour faire en sorte qu’il y ait une meilleure entente entre aux. Donc, sous notre égide, nous avons facilité ces relations, qui ont permis d’avoir un accord-cadre signé entre les égreneurs et les triturateurs. L’État n’en est pas signataire ! »
Selon Frédéric Komenan, la Côte d’Ivoire est un pays qui a une « économie libérale ». Il renvoie donc la balle aux égreneurs et aux triturateurs, qui doivent s’entendre. Jean-François Touré, Président d’APROCOT, l’Association professionnelle des sociétés cotonnières de Côte d’Ivoire.
« Nous n’avons aucun avantage à vendre à l’extérieur, si le prix du marché est respecté. Parce que nous devons assurer aux producteurs le paiement du prix convenu, du coton graine. Je pense que pour l’instant, Olheol Industries n’a pas trouvé les conditions commerciales qui lui conviennent. Nous sommes disposés à vendre à l’industrie nationale, si les conditions commerciales agréent les parties. »
En général, les triturateurs payent d’avance et vont chercher eux-mêmes les graines de coton dans les entrepôts des égreneurs. Les graines ne doivent pas être entreposées trop longtemps, sinon elles sont perdues. Aux arguments de Jean-François Touré, Sékou Keita, Directeur général d’Olheol Industries, pointe plutôt une organisation de la filière faite pour décourager les initiatives locales.
« Les sociétés cotonnières négocient avec les banques pour avoir des crédits de campagne, elles n’attendent pas la veille de la campagne pour faire leurs dossiers financiers. Un dossier financier doit comporter et le prix et la quantité qu’on achète. Ils disent qu’ils ne nous vendent pas parce qu’on n’a pas d’argent. Pour nous, ce n’est pas un problème d’argent. Pour acheter la moitié de notre capacité, il nous faut presque 12 milliards de francs CFA. Ça ne se trouve pas dans un coffre-fort ! C’est un dossier financier qu’on monte. Mais un dossier financier pour décaisser 12 milliards, sans compter les intrants qu’on commande en Europe, on ne peut pas en un mois ! »
Il y a aujourd’hui 6 sociétés cotonnières en Côte d’Ivoire qui encadrent près de 100 000 producteurs. Elles assurent aussi l’égrenage. Le manque de graines de coton pour Olheol Industries a mis au chômage technique 600 personnes à Bouaké depuis 2016.
RFI