Au Mali comme dans d’autres pays musulmans, la fin du mois de ramadan a été toujours célébrée avec brio par les fidèles. L’approche de la fête a toujours suscité la prise d’assaut des différents marchés, singulièrement ceux de Bamako par des marchands de bœufs qui viennent de tous les coins du pays. Mais à cause de la cherté de la vie, la fête de ramadan 2023 sera célébrée dans un contexte ardu ce, tant pour les vendeurs que la clientèle qui peine à se procurer des bœufs.
Autant que les clients, les vendeurs de bœufs se plaignent. Comme pour dire que la crise à laquelle le pays demeure toujours confronter est sentie par presque tous les citoyens. À l’orée de la fête de ramadan, prévue pour cette semaine partout dans le pays, de nombreux pères de familles se battent corps et âme afin d’avoir de la viande pour les enfants, épouses, les parents et les connaissances. Pour alors s’imprégner de la situation, l’équipe de la rédaction ‘’Le Pays’’ est allée à la rencontre de certains vendeurs de bœufs et clients. Tel est exactement le cas de El-Hadji Moussa Goro, président du Garbal de Faladié. Selon le responsable, les vendeurs se plaignent au même titre que les acheteurs, cette année. « Les bœufs viennent de toutes les zones du pays pour la fête. Il y en a à vendre partout sur le marché, mais le prix n’est pas accessible pour tout le monde. Il est difficile de trouver un bœuf à moins de 250.000F. Les discussions autour des bœufs bien nourris commencent à partir de 350.000F, 400.000f, 500.000….», témoigne le président. D’après lui, l’exorbitance des prix dépasse la compétence des vendeurs et de l’Etat. Le problème, dit-il, c’est que les aliments du bétail coûtent présentement chers. L’année dernière, ajoute-t-il, un sac était vendu à 7000 F. Mais présentement, avance-t-il, il est cédé 8500F. Ce n’est pas tout. Le sac du tourteau du coton était cédé à 12000 F l’année dernière. Mais cela est présentement vendu à 15.000F. « Ce sont les commerçants qui ont tout gâché. Beaucoup parmi eux font de nombreuses commandes dans les usines. Ils les stockent dans leurs magasins et les revendent au prix qu’ils désirent aux vendeurs de bétail. Ces derniers n’ont pas d’argent pour pouvoir passer des commandes dans les usines. D’où les difficultés d’accès au tourteau du coton et aliments du bétail », explique le président. Puis de soutenir que des mesures appropriées doivent être prises, pour le contrôle des prix, par le gouvernement contre les usines privées et les commerçants qui rendent les marchés ardus. Interrogé sur la question, Ousmane Dolo déplore le manque d’affluence sur le marché. « Nous sommes à quelques jours de la fête, mais les clients ne viennent toujours pas. Par le passé, les gens commencent les achats bien avant le 27ème jour du mois de ramadan. Cette année, on est maintenant arrivé au 28ème jour mais les clients se font jours rares sur le marché », ajoute le vendeur travaillant au Garbal de Faladié. Malgré la cherté constatée, Boubacar Diakité a pu néanmoins avoir sa part. « Ce veau (bœuf qu’il a acheté) que vous voyez vient d’être acheté par moi. Cela me fait deux tours sur ce marché à bétail de Faladié sans parvenir à faire mon achat à cause du prix. J’ai finalement acheté ce veau à 300.000F », confie le chef de famille.
Du jamais vu pour certains vendeurs !
A Sabalibougou, un quartier sis en commune V du district de Bamako, Vieux Cissé se débrouille dans la vente du bétail depuis les années 1991. « Je le faisais depuis que j’étais petit. Je me suis marié grâce à ce boulot. Mais je n’ai jamais vécu de situation pareille depuis que j’ai commencé ce travail ». « Par le passé, dit-il, mes clients m’appelaient afin de s’enquérir du prix des bœufs à partir du 20ème jour jusqu’à l’arrivée de la fête. Beaucoup faisaient d’ailleurs leurs commandes. Mais me voilà assis présentement, aucun parmi eux ne m’a appelé encore, alors que nous sommes au 28ème jour du mois », a-t-il indiqué. Partis pour acheter un bœuf à partager entre les employés de leur service, M. Kanté et son collègue annoncent se voir dans l’obligation de retourner chez eux avec les mains vides. « Notre patron nous a donné 250.000F afin d’acheter un bœuf à partager entre nous (employés du service). Mais nous allons retourner avec l’argent, puisqu’on n’arrive pas à avoir du bœuf avec cet argent », déclarent le sieur Kanté et son compagnon croisés sur le marché à bétail (Garbal) de Sabalibougou. Ces difficultés sont signalées quelques jours après le lancement, le 15 avril dernier, de la 15ème édition de l’opération de vente promotionnelle des bovins dans le district de Bamako. L’activité a été organisée par le ministère du Développement rural et des organisations professionnelles de la filière bétail viande. Elle se déroule du 12 au 21 avril 2023 à Bamako et dans les capitales régionales et vise à mettre sur le marché près de 3200 têtes, dont 1770 dans le district de Bamako, 470 pour la région de Kayes, 270 pour Sikasso, 220 pour la région de Ségou et 260 pour la région de Mopti. Suivant les données communiquées par le ministère du Développement rural, il ressort que les fourchettes de prix varient, dans le district de Bamako, entre 200.000 et 350.000 F CFA. En tout état de cause, certains chefs de familles ont plutôt préféré acheter des béliers et des chèvres afin de pouvoir sobrement célébrer l’évènement attendu.
Mamadou Diarra
Source : LE PAYS