Le monde actuel est dominé par l’avancée de la technologie : l’ère de l’internet. Il s’agit d’un monde où l’amour effréné de l’écran, par le biais de l’internet, l’emporte sur celui des livres. Aujourd’hui, au Mali, tout comme dans la plupart des pays africains, l’utilisation des réseaux sociaux cultive le dégoût de la lecture : Facebook, WhatsApp, Tiktok, etc. Du coup, les jeunes ont de moins en moins de temps à se consacrer à la lecture, à la bibliothèque.
Ces faits jouent négativement sur le niveau des jeunes, des élèves, y compris les étudiants. Pourtant, ces médias sociaux peuvent être une occasion pour faciliter la culture de la lecture. Comment inculquer le goût de la lecture à la jeunesse à l’ère d’internet ?
Pour pousser quelqu’un à aimer quelque chose, il faut lui montrer son importance dans sa vie. La lecture a un grand rôle dans la vie de l’être humain. Elle améliore l’activité cérébrale de l’homme, la capacité de penser et de compréhension du monde, des faits. Elle ouvre l’esprit humain et favorise une appréhension dialectique de l’univers. Un enfant qui lit est un être libre. Il est habité par la lumière. Selon Victor Hugo, « Lire, c’est boire et manger. L’esprit qui ne lit pas maigrit comme le corps qui ne mange pas ». De son côté, Michel Saint-Denis soutient : « Lire, c’est vivre en pleine lumière ».
Être un modèle
Pour un particulier lettré qui veut susciter le goût de la lecture aux enfants ou à la jeunesse, il doit être un modèle. Vous ne pouvez pas demander à quelqu’un de lire alors que vous-même n’aimez pas lire. Il est donc impossible d’être concomitamment un bibliophobe et un rat de bibliothèque. Vous devez être un modèle, une source de motivation pour lui. Et pour influencer, il faut transformer votre perturbation en une joie pour l’enfant ou pour l’entourage.
Pour un individu qui hait les livres, la lecture ne pourrait être qu’une perturbation, un dérangement. Dans ce cas, il faut lire sans complexe, à haute voix, dans la cour devant tout le monde, avec une voix inspiratrice qui crée un goût d’imitation.
En outre, si c’est dans la famille, il faut créer votre bureau de lecture soit une chambre, soit un bureau mobile. Mais il faut éviter d’être mécanique en diversifiant vos stratégies pour plus d’influence positive sur l’entourage.
Connaître les centres d’intérêt de l’enfant ou du jeune
Quels sont les sujets qui l’intéressent ? Quelles sont les préoccupations de votre enfant, votre frère ou ami ? Bref quel est son centre d’intérêt ? Connaître les centres d’intérêt de l’enfant vous facilitera de savoir quoi faire pour l’amener à vos côtés. Pour arriver à cette fin, il faut connaître les choix de l’enfant et les accepter. Éviter de juger négativement au premier contact ses choix. Faites de ses choix votre préoccupation pour le rapprocher plus de vous. Vous avez un seul objectif : l’amener dans votre monde pour qu’il puisse épouser la culture de la lecture.
Chercher des livres simples correspondant à ses intérêts
Maintenant vous connaissez les centres d’intérêt de votre enfant ou ami. Nous l’avons dit plus haut qu’il faut diversifier vos stratégies pour plus d’influence. Dans cette lancée, vous devez, dans un premier temps, chercher et lire certains livres de ses intérêts. Ensuite, dans un second temps, vous devez discuter avec lui de vos lectures, montrer l’importance de vos lectures non seulement dans la vie, mais et surtout dans sa vie. Vous devez aussi lui proposer deux ou trois exemplaires de bouquins correspondant à ses choix parmi lesquels il doit prendre un pour lecture tout en lui faisant comprendre qu’il vous ferra un résumé.
Pour les enfants, il faut des livres simples où il y a des caricatures, des jeux. Il faut éviter les livres qui demandent plus de réflexion. Les bouquins choisis doivent être compatibles avec le niveau d’évolution de l’enfant. Il y a aussi des parents qui commettent cette erreur en voulant que leurs enfants apprennent à lire obligatoirement à partir des textes mécaniques qui se trouvent dans les programmes à l’école. Certains de ces textes dégoûtent l’enfant où ils peuvent ne pas correspondre à ses centres d’intérêt.
Avoir un programme de lecture journalier ou hebdomadaire
On ne nait pas avec le goût de la lecture. Il se cultive. C’est un apprentissage, une initiation, laquelle devient une habitude, un plaisir. On apprend à lire. De la même façon qu’un individu, qui apprend une discipline sportive à bas âge transformera la pratique de cet art en un plaisir insatiable, un enfant initié à la culture de la lecture à bas âge transformera la lecture en une habitude, en un plaisir inassouvissable. En ce sens, la lecture devient l’oxygène de son esprit. Ainsi, pour ce faire, il faut une initiation, un accompagnement des adultes, des parents. C’est pourquoi après avoir choisi les livres correspondant au centre d’intérêt de votre enfant, il faut, au départ, un programme ou un temps consacré à la lecture en famille. Par exemple chaque samedi matin tout le monde se retrouve dans le salon avec son bouquin pour lire cinq ou dix pages pendant une heure, avec des tasses de café à côté ou autres choses pour encourager les enfants. Si vous n’avez pas assez de temps, il faut inscrire votre enfant dans une médiathèque et s’assurer qu’il y aille régulièrement.
Organiser des concours de lecture et d’écriture
Pour encourager les enfants, il faut des stratégies de motivation. Dans ce cas, il serait très important d’organiser périodiquement des compétitions de lecture entre les enfants, soit en famille, soit ailleurs. N’oubliez pas que les trophées doivent correspondre aux besoins des enfants. Ce qui revient à dire que tout doit être en relation avec les centres d’intérêt des enfants. Cela les motive davantage et ils deviennent de plus en plus vos amis, vos complices. Par exemple si c’est dans la famille, l’enfant qui sera le meilleur de la compétition, vous devez ajouter un cadeau correspondant à son souhait (un ballon pour celui qui aime le football par exemple). En plus, au lieu d’aller acheter des fusils pour rendre agressif votre enfant, il faut plutôt acheter des jeux éducatifs pour stimuler son esprit.
Pour d’autres cas
Pour un analphabète qui veut inculquer le goût de la lecture à son enfant, il peut payer un précepteur pour que ce dernier fasse des séances d’initiation à ses enfants à la culture de la lecture. Il peut aussi inscrire ses enfants dans une médiathèque tout en les encourageant avec des petits cadeaux. De surcroît, il peut aussi financer des compétitions de lecture.
Certains individus confondent un analphabète à un bibliophobe. Il est vrai qu’un analphabète a plus de chance d’être un bibliophobe pour le simple fait qu’il ne sait ni lire ni écrire, mais il n’est pas à confondre à ce dernier. Pour ma part, un analphabète peut susciter le goût de la lecture aux enfants à sa manière.
Il faut reconnaître que la lecture est la base de l’apprentissage à l’école. Un enfant qui ne sait pas lire aura naturellement des problèmes pour apprendre ses leçons. Il faut que l’enfant sache lire dans la langue d’enseignement. Dans cette logique, les parents, qu’ils soient lettrés ou pas, ont un rôle important à jouer. Donc chacun doit s’impliquer selon ses moyens pour aider les futurs responsables de la communauté, du pays.
Pour un particulier lettré qui veut lire, mais qui n’a pas le temps ou ne sait pas où commencer
La plupart des gens pensent que la lecture est uniquement une affaire des élèves, des étudiants et des enseignants. C’est ce que nous observons au Mali actuel. C’est une erreur de la part de ceux qui pensent de la sorte. Tout le monde doit apprendre à lire, pas une simple lecture, mais de lire entre les lignes, c’est-à-dire être capable de s’approprier du contenu des textes sans être esclave de l’interprétation de qui que ce soit comme nous pouvons l’observer chez certains religieux qui préfèrent se contenter de l’explication du contenu des livres saints d’un guide au lieu de chercher à les lire et à les comprendre soi-même.
La constitution, les lois du pays sont écrites dans une langue. Donc sans une maîtrise de la lecture, vous ne serez pas bien informés sur les textes qui gouvernent votre pays. La culture de la lecture doit devenir monnaie courante pour tous : c’est un devoir de citoyen.
Celui qui n’a pas le goût de la lecture ou celui qui n’a pas le temps de lire aura des difficultés de lire les lois écrites de son pays. Ce dernier sera esclave des interprétations. Si vous n’avez pas le temps de lire, lisez tout le temps, a-t-on dit. Autrement dit, si vous avez du mal à choisir un temps de lecture, il faut adopter la méthode de la lecture nomade. Dans ce cas, votre livre de choix doit vous accompagner partout – dans les bus de voyage, les grins, les promenades, dans les restaurants, etc. D’ailleurs, avec les versions électroniques, nous pouvons lire dans les téléphones mobiles à chaque fois qu’on a une occasion. Par exemple, quand vous partez dans une banque pour un décaissement et que le rang est long, vous profitez pour lire quelques pages avant que votre tour arrive. Malheureusement pendant ce temps certains vagabondent entre les différents médias sociaux sans même savoir ce qu’ils veulent : une utilisation négative du temps.
Vous n’avez pas besoin de lire un livre entier en un jour, en une semaine. Il faut des stratégies pour finir avec un livre sans perturbation de votre temps ordinaire de travail. Comme cela, vous pouvez décider, soit chaque soir avant de vous coucher, soit chaque matin avant de partir au boulot, de lire deux ou quatre pages par jour. Si par exemple vous avez décidé de lire quatre pages par jour, en trente jours vous lirez cent vingt pages. Si le nombre de pages du bouquin ne vaut pas les cent vingt pages, vous venez de lire dans ce cas un livre entier dans un mois sans être perturbé.
Il faut avoir le courage de commencer, surtout de commencer par un livre que vous aimez plus. En lisant ce billet, sans transition, il faut commencer aujourd’hui. Il faut essayer l’expérience, vous me direz la suite.
Abdramane Coulibaly, écrivain