Le gouvernement s’est auto évaluée le mardi dernier en concluant avoir réalisé près de 80% de son programme d’action de la transition. Un autosatisfecit qui a tout l’air de flatter l’ego qui peine à se mettre à la hauteur des défis et des attentes du Peuple. Car, visiblement, à ce stade de la transition, exception faite à la situation sécuritaire, il est impossible pour d’indiquer un secteur où les objectifs sont atteints.
C’est sans surprise, le Conseil national de Transition (CNT) avait approuvé le Plan d’Action du gouvernement conduit par le Premier ministre Choguel Kokalla MAIGA par 102 voix pour, 2 contre et 9 abstentions. Une étape cruciale franchie à l’époque par le chef du gouvernement issu du rang des contestataires du régime IBK.
Ce plan d’action est bâti sur 4 axes à savoir : le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national, les réformes politiques et institutionnelles, l’organisation des élections et promotion de la bonne gouvernance et d’adoption d’un pacte de stabilité repartie en neuf (9) objectifs.
Ce document politique du gouvernement établi conformément à la feuille de route du président de la Transition Assimi GOITA était au cœur d’une réunion ministérielle tenue le mardi 1er mars en vue de l’évaluer. Il s’agit de l’évaluation du 2e semestre de ce Plan d’action gouvernement.
Dans son auto-évaluation, le gouvernement, à travers son porte-parole Abdoulaye MAIGA, s’est dit satisfait de la mise en œuvre du PAG exécuté à hauteur de 80%, selon la note publiée sur la page Facebook de la Primature.
Cette autosatisfaction du gouvernement est jugée indécente, par bon nombre d’observateurs, au regard de la situation de notre pays qui reste dramatique sur le plan économique social et même politique.
En effet, sur les 4 axes principaux, on note seulement une amélioration au plan sécuritaire. Et d’ailleurs, l’intervalle indiqué pour le 2e semestre ne prend pas en compte de cette période de la montée en puissance des forces armées maliennes(FAMa) devenues palpables à partir de décembre. Toutefois, en termes d’équipements, de recrutement au sein de l’armée nationale et des forces de l’ordre, le gouvernement de la transition a accompli des résultats forts encourageants.
Sur budget propre, la Transition a doté les FAMa des nouvelles acquisitions d’engins de combat.
Hormis ce secteur, le gouvernement est à la traîne sur les autres axes du PAG. En clair, rien n’y bouge.
Comment expliquer le gouvernement peut se réjouir de ses actions réussies alors qu’il se trouve dans l’impossible de mettre en œuvre son propre planning ?
L’équipe conduite par Choguel Kokalla MAIGA a été incapable de tenir les élections programmées en février dernier en arguant notamment que le contexte sécuritaire ne permet pas l’organisation de ces scrutins.
Parce qu’en réalité malgré le renforcement de la capacité des militaires et leur montée en puissance, il y a encore de nombreuses localités qui échappent au contrôle de l’État où la sécurité reste précaire.
À cause de cette situation, l’administration publique est absente dans plusieurs zones du pays où des habitants se sentent abandonnés par l’État. Ils affirment être laissés pour compte.
Dans ces conditions, exprimer son satisfecit après une évaluation de la situation est aberrant et relève, de notre avis, d’un déni de réalité ou une malice trompeuse du gouvernement.
Quant aux réformes institutionnelles et politiques, au stade du 2e semestre, il n’y a aucune lisibilité des actions envisagées.
Le processus de la réorganisation territoriale est presque suspendu de fait avec les contestations de la population.
Les nouvelles régions créées demeurent à l’état des cercles parce que le processus n’est pas achevé.
L’adoption d’une nouvelle constitutionnelle très attendue pour corriger les faiblesses de notre pratique démocratique tout en prenant en compte l’évolution du contexte politique et les nouvelles doléances de la population se fait toujours désirer. En somme aucune évolution.
Malgré cela, le gouvernement nous sort un chiffre pour se satisfaire de son travail.
Idem également pour la bonne gouvernance. Là aussi, des Maliens sont restés sur leur faim dans la lutte contre l’impunité, le favoritisme, l’injustice au nom du Mali Kura.
Les récentes affaires de soupçons de favoritisme et de clanisme dans l’attribution des logements sociaux et dans le recrutement à la CANAM ont galvaudé la confiance des Maliens très attachés à ce nouveau départ du Mali qui a un succès funeste à cause de l’ampleur de la corruption.
Même si ces faits ne se sont pas déroulés dans la période indiquée, il n’en demeure pas moins qu’ils constituent, d’une certaine manière, la manifestation du manque de rigueur dans la gouvernance.
Pendant ce temps, de nombreuses personnalités ont été arrêtées dans les affaires de détournements de deniers publics.
Là aussi, le hic est que ces affaires sont toujours au niveau de l’instruction, selon des sources judiciaires.
Enfin, le gouvernement a promis l’adoption d’un pacte de stabilité en vue d’apaiser notamment le climat social qui était en ébullition avec les grèves à répétition des syndicats des travailleurs.
Il s’agit notamment de la grève de l’UNTM, du collectif des enseignants, du syndicat de la direction générale du commerce et de la concurrence.
Si l’État a fourni des efforts, à travers l’harmonisation des grilles de salaires, cela n’a pas été suffisant pour calmer la colère de certains syndicalistes, à l’image des enseignants.
Le pacte de stabilité promis n’a pas encore vu le jour.
L’accalmie actuelle a été obtenue à la suite des sanctions imposées par la CEDEAO à notre pays qui a vu des syndicats prendre la décision de surseoir aux différents mots d’ordre de grèves qui étaient annoncés.
Au regard de tout ce qui précède, le gouvernement ne devait avoir aucune prétention de mission accomplie sauf si pour flatter l’ego de quelqu’un ?
Cependant, qui est indéniable, c’est qu’au cours 2e semestre, la Transition a eu le mérite d’ébranler la France qui n’avait eu d’autres choix que de se retirer du pays, à travers son opération militaire Barkhane.
Par la même occasion, le gouvernement a fait revivre le sentiment nationaliste pour la défense de la souveraineté du pays face à la France notamment.
Pour autant, cette audace à elle seule ne saurait justifier la note que le gouvernement s’est donnée.
PAR SIKOU BAH
Source : Info-Matin