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Étienne Poudiougou : « C’est une manœuvre pour m’évincer de la mairie de Koporo-Na »

Étienne Poudiougou, maire de Koporo-Na (cercle de Koro) a été suspendu le 14 avril dernier de ses fonctions pour avoir rédigé une lettre intimant à la communauté peule de quitter sa commune. L’élu, traité de « raciste » par certains, qui vit aujourd’hui caché, a expliqué à Journal du Mali les tenants et aboutissants d’une affaire qui a secoué le pays tout entier.

Dans quelles circonstances avez-vous été amené à rédiger cette lettre ?

Je tiens d’abord à dire qu’il n’y avait pas de confrontation entre Peuls et Dogons dans mon village, pas de situation conflictuelle. Le samedi 7 avril, il y a eu une réunion sur la paix et la réconciliation à Pel Maoudé. À l’issue de la rencontre, les participants étaient convaincus que ces histoires de conflits entre Peuls et Dogons allaient prendre fin et étaient satisfaits. Parallèlement se tenait à Koro une autre réunion, rassemblant les chasseurs de Koro et de Koporo-Na. Peu de temps après, des soi-disant chasseurs de Koporo-Na sont revenus avec un papier, qu’ils ont distribué aux chefs de village, leur intimant de chasser les Peuls de leurs localités.

Il y avait donc déjà eu un appel à chasser les Peuls ?

Oui, et j’en ai été le premier surpris quand j’ai été saisi de la diffusion de cette propagande. J’ajoute que le dimanche j’avais reçu des appels disant que, pendant notre réunion, j’avais demandé à ce que l’on chasse les Peuls de la commune. Dès le lundi 9 avril, j’ai convoqué d’urgence tous les chefs de village. Je leur ai dit que cette situation était inacceptable, car nous vivons avec les Peuls depuis toujours et que les chasser était impensable. Ils étaient d’accord et nous avons décidé d’envoyer une mission à Koro pour avertir de ce qu’il se passait. Nous avons contacté les chasseurs pour qu’ils préviennent leur coordination à Koro. Il y avait 7 personnes dans la délégation, dont moi-même. Le 10 avril, tout le monde était présent, sauf les chasseurs. Nous sommes repartis. Durant notre trajet, nous les avons appelés plusieurs fois, mais ceux que nous avons contacté ont refusé de décrocher leur téléphone.

Vous pensez que les chasseurs sont derrière cette propagande ?

Le chef des chasseurs de Koporo-Na, ainsi que l’adjoint de la coordination des chasseurs, que nous avons rencontrés, nous ont fait savoir que leur confrérie n’était pas au courant et n’avait rien à voir avec cela. Je doute que ceux qui ont décidé ça soient vraiment des Dozos. Toujours est-il que je suis revenu à Koporo-Na pour y passer la nuit. J’ai été appelé par un proche qui m’a dit que deux personnes étaient venues le voir et lui avaient dit que je devais faire un communiqué demandant aux Peuls de quitter le territoire de la commune. Si je refusais, je serais tué, ainsi que ma famille et tous les Peuls. J’ai eu peur et j’ai écrit la lettre, pour me protéger, protéger ma famille et protéger les Peuls de ma commune.

Pourquoi ne pas en avoir d’abord parlé aux autorités ?

J’ai agi sous la menace et parce que je n’avais aucune protection. Je suis d’ailleurs toujours menacé. Je me désengage de cette lettre. C’est parce que j’ai refusé que le message de propagande soit diffusé partout dans ma commune que j’ai été considéré comme un ennemi. Les Peuls de Koporo-Na peuvent témoigner que ce n’est pas mon genre de tenir de tels propos. Je n’ai aucun sentiment xénophobe envers eux, nous avons toujours vécu en harmonie.

L’avis manuscrit rédigé le 12 avril dernier par Etienne Poudiougou, maire de Koporo-Na.

Selon vous, qui se cache derrière ces menaces et dans quel intérêt ?

Je suis visé par des personnes mal intentionnées. Pour que leur propagande soit crédible, elles m’ont forcé à écrire cette lettre en tant que maire. C’est une manœuvre politicienne pour m’évincer de la mairie, en faisant peser sur moi de graves accusations. Les deux personnes qui ont proféré ces menaces de mort sont connues, ce sont des émissaires de mes concurrents politiques. Je fais partie de l’UDD (Union pour la Démocratie et le Développement), le Président de la section de Koro, à laquelle j’appartiens, est Maître Hassan Barry. Comment peut-on me considérer comme raciste alors que le Président de la section locale de mon parti est un Peul ?

Qui sont ces concurrents politiques ?

Je ne peux pas les citer. Cela a commencé lorsque le maire élu est décédé. J’ai été désigné pour être le nouveau maire, ce qui a créé des contestations et des jalousies. Certains ont refusé ma nomination. L’affaire est allée jusqu’à la Cour suprême, mais leur requête n’a pas abouti. L’UDD a conservé la mairie. Les perdants n’ont jamais accepté cela malgré la décision de la Cour suprême.

La communauté peule a-t-elle commencé à quitter le commune ?

les Peuls sont toujours là , aucun chasseur n’est venu leur dire de partir. Aucun peul n’est venu me visiter à se sujet.

Craignez-vous toujours qu’on attente à votre vie et comment voyez-vous l’avenir ?

J’ai quitté Koporo-Na pour me protéger. J’ai quitté ma maison et je suis parti loin. Je ne peux pas vous dire où je me trouve. Je reviendrai, mais actuellement la situation ne le permet pas. Je suis victime d’une conspiration et je ne sais pas ce que l’avenir me réserve.

Journal du mali

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