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Et si l’élection présidentielle n’était pas possible en juillet 2018 ?

Le réalisme doit nous amener collectivement à envisager le pire et à nous y préparer. Pour éviter le scénario catastrophe, qui peut subvenir, tous les acteurs politiques et sociaux du pays, partisans et non partisans, devraient travailler dès à présent à rendre possibles, même pour un temps, les convergences en érigeant des ponts à la place des frontières qui les éloignent les uns des autres.

ousmane sy ancien ministre malien

Conformément à la Constitution en vigueur, le 28 juillet 2018 les électeurs maliens seront appelés à se rendre aux urnes pour élire le Président de la République. Déjà l’effervescence commence à se faire sentir dans les différents états-majors politiques à travers les discours et les mouvements des leaders. Mais comme en juillet 2013, cette élection présidentielle se tiendra dans un pays plongé dans une profonde crise politico-institutionnelle, économique et sociale qui est loin de se résorber.

L’Accord de Ouagadougou signé en 2013 avec les mouvements armés de l’époque suivi des rencontres que le Président Dioncounda Traoré a eues avec l’ensemble des acteurs politiques, sociaux et institutionnels du pays ont rendu possible la tenue des présidentielles et des législatives sur toutes les parties du territoire national et au final l’acceptation des résultats par toutes les parties en compétition. Mais en 2018, si les tendances actuelles se poursuivent, l’aggravation et extension de l’insécurité et l’exacerbation des antagonismes qui s’aiguisent de plus en plus porteront de grandes incertitudes sur la possibilité de tenir des élections dans des conditions acceptables.

En 2013, c’est l’absence de l’administration d’Etat en raison de l’insécurité dans les régions de Kidal, Gao, Tombouctou et les cercles de Tenenkou, de Douentza et de Youwarou qui rendait incertaine la tenue des élections. L’aggravation des tendances actuelles, que rien ne semble inverser, risque d’élargir fortement la liste des circonscriptions administratives où aucune élection avec des résultats acceptables ne sera possible. Aux régions et aux cercles déjà cités, qui sont loin d’être stabilisés, s’ajoutent de nos jours tous les cercles de la région de Mopti, des parties de plus en grandes des cercles de San, Tominian, Niono et Macina dans la région de Ségou et des parties des cercles de Banamba et de Nara dans la région de Koulikoro. Au total et en dehors des villes chef-lieu de cercle ou de communes, l’administration d’Etat n’a de présence territoriale effective que sur moins de 50% des 49 cercles du pays. Rien n’indique qu’une amélioration est envisageable à court terme.

En toute lucidité, l’ensemble des acteurs de la scène politique, partisans et non partisans, devrait envisager le scénario de la non possibilité d’organiser les élections en juillet 2018. Si cette hypothèse se confirmait, que faudrait-il faire pour éviter à notre pays une nouvelle aventure ? D’ailleurs, sans le mettre au cœur du débat, les promoteurs de la révision constitutionnelle avortée avaient tenté une réponse en mettant dans leur projet la possibilité pour le Président en place de continuer jusqu’à ce que l’élection soit possible (le schéma de la RD Congo). La Constitution en vigueur n’ayant rien prévu en dehors de la tenue à date de la présidentielle, seule une transition imposée ou consensuelle  peut être envisagée si d’aventure la tenue de l’élection n’était pas possible.

Si nous écartons le scénario d’une transition imposée par des putschistes militaires ou civils, seul celui d’une transition républicaine est envisageable. Ne rien entendre, ne rien dire et surtout ne rien voir venir nous a valu la bande de Sanogo et l’offensive des groupes armés qui ont ouvert les portes du pays aux hordes jihadistes en 2012.

Ne m’interrogez pas sur les tenants et les aboutissants de cette transition que je ne souhaite pas. Cependant le réalisme doit nous amener collectivement à envisager le pire et à nous y préparer. Pour éviter le scénario catastrophe, qui peut subvenir, les acteurs politiques et sociaux du pays, partisans et non partisans, devraient travailler dès à présent à rendre possibles, même pour un temps, des convergences en érigeant des ponts à la place des frontières qui les éloignent les uns des autres.

Une sagesse de chez nous dit : « si tu te mets devant ta porte en ne sachant pas où aller; il se trouvera toujours un passant qui te prendra par la main pour te conduire où il veut ». Donnons une destination collectivement discutée et acceptée à notre pays pendant qu’il est encore temps.

*http://ousmanesy.

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Par Ousmane Sy

Le Challenger

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