Le 2 décembre dernier, la majorité présidentielle a pris l’initiative de rencontrer au Centre International des Conférences de Bamako l’opposition politique. “Le pays traverse aujourd’hui une crise et j’ai souhaité que vous, opposition et nous majorité, nous puissions organiser des concertations sous le signe de : Sauvons le Mali d’abord”, a déclaré Dr Boulkassoum Haïdara, Président de la Coordination de la Majorité Présidentielle (CPM) au cours de cette rencontre qui n’a duré que quelques heures. Le chef de la délégation de l’opposition politique, Tiébilé Dramé, a obtenu que la gouvernance économique du pays soit ajoutée aux deux points choisis par la majorité présidentielle à savoir la sécurité et la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation. Après quelques minutes d’échanges, les deux délégations ont promis de se revoir ce 12 décembre 2015 pour des échanges autour de ces trois points.
Ces concertations entre la majorité et l’opposition sont entourées d’un flou artistique. Quel est l’agenda ? Quelle est la méthodologie adoptée par les différentes parties ? A quoi aboutiront ces discussions ? Faut-il s’attendre à une éventuelle entrée de l’opposition dans l’équipe gouvernementale à la fin des concertations ?
On ne connaît ni l’agenda encore moins la méthodologie adoptée et surtout la finalité de ces discussions. En pareille circonstance, il y a un risque réel que les débats annoncés se transforment en jougs verbaux entre les responsables de la majorité et ceux de l’opposition. Les critiques de certains opposants qui ne s’embarrassent pas de porter des gangs pour dénoncer la gouvernance actuelle du pays seront jugées très acerbes par les tenants du pouvoir. Déjà, les divergences apparues avec la volonté affichée par les ténors de l’opposition d’amener les responsables de la majorité à condamner les propos polémistes du Président du Haut conseil Islamique du Mali, l’iman Mahmoud Dicko, sur l’attaque terroriste contre l’hôtel Radisson Blu, sont suffisamment révélatrices du clivage entre les deux camps. Face à une majorité présidentielle en panne et minée par des distilles entre ses leaders, l’opposition politique s’efforce, en dépit de ses problèmes internes, à apparaitre unie.
Les points de vue sont difficilement conciliables. La crispation du climat politique est due plutôt à des questions de personnes qu’à de réelles convictions politiques de part et d’autre.
L’initiative de ces concertations est un peu boiteuse en ce sens qu’au-delà de la majorité et de l’opposition, il y a un autre courant politique qui s’appelle le Centre. Composé de plusieurs micro partis, le Centre malien ne se réclame ni de l’opposition, ni de la majorité et se veut vraiment indépendant. Il existe aussi des formations politiques à l’image de celle de l’ancien Premier Ministre, Zoumana Sacko, qui ne sont ni de la majorité, ni de l’opposition, ni du centre. Et pourtant, elles ne se privent pas de leur droit de se prononcer sur l’état de la nation.
Des concertations censées sauver le Mali devraient forcément impliquer tous les courants politiques sans aucune distinction. Les concertations ont le mérite d’instaurer un débat contradictoire sur le fond et la forme et non des escalades verbales, voire des débats de caniveaux.
Chiaka Doumbia
source : Le Challenger