Un convoi militaire français se rendant au Mali en transitant par le Burkina Faso, était toujours bloqué jeudi dans ce pays à la suite de manifestations de colère contre la France, après être entré en territoire burkinabè la semaine dernière.
Parti de Côte d’Ivoire, ce convoi logistique de plusieurs dizaines de véhicules doit ravitailler la base militaire française de Gao au Mali, en passant dans un premier temps par le Burkina Faso, puis par le Niger.
A son entrée en territoire burkinabè la semaine dernière, le convoi a d’abord été ralenti dans sa progression par des manifestants à Bobo Dioulasso (sud-ouest), puis dans la capitale Ouagadougou (centre).
Mais c’est vendredi à Kaya, à une centaine de km au nord-est de Ouagadougou, que les manifestants se sont le plus mobilisés contre son passage.
Portant des écriteaux anti-Français – “Armée française dégage”, “Libérez le Sahel” – des milliers de personnes, poings levés, ont entonné l’hymne national burkinabè face au convoi qui a dû se retirer sur un terrain vague près de la ville.
Plusieurs manifestants l’accusaient de transporter des armes pour les groupes jihadistes qui terrorisent depuis des années plusieurs pays du Sahel et sont combattus sur le terrain par l’armée française dans le cadre de l’opération Barkhane.
Le lendemain samedi, quatre personnes ont été blessés par balle à Kaya dans des circonstances indéterminées: soldats français et burkinabé ont effectué des tirs de sommation pour disperser des manifestants.
Ces manifestations dans les villes de passage du convoi au Burkina Faso, ont été organisées par la Coalition des Patriotes africains du Burkina Faso (Copa BF).
“Nous avons décidé de faire barrage, parce malgré les accords signés avec la France, nous continuons à enregistrer des morts et nos pays demeurent sous-armés”, a déclaré son porte-parole, Roland Bayala. Il a affirmé avoir “appelé les populations qui se trouvent sur l’itinéraire de ce convoi à se mobiliser”.
Le convoi attendait toujours jeudi dans une enclave militaire située à une trentaine de km au nord-est de Ouagadougou de pouvoir reprendre sa route.
Des négociations ont lieu entre le gouvernement burkinabè et les organisateurs des manifestations pour qu’ils le laissent repartir sans nouvelles entraves à sa progression vers la frontière avec le Niger.
– “Ne pas se tromper d’ennemi” –
Mercredi, le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Alpha Barry, a dit espérer un “aboutissement rapide des discussions”.
Il a tenu à réfuter les accusations de certains manifestants – abondamment relayées par les réseaux sociaux – sur des armes pour les jihadistes transportées par ce convoi “escorté par la gendarmerie nationale”. “On ne peut pas imaginer que notre armée escorte un convoi pour aller livrer (des armes) aux terroristes”, s’est-il insugé
Alpha Barry a également tenu à vanter les “relations historiques”, entre la France et le Burkina Faso, notamment “une coopération militaire très importante qui remonte à l’époque coloniale”.
“Il ne faut pas qu’on se trompe d’ennemi, car la France est toujours intervenue à nos côtés lorsque nous lui en avons fait la demande”, a déclaré M. Barry.
Il a indiqué que des opérations logistiques ont lieu avec l’armée française, notamment pour acheminer des soldats burkinabè dans des zones reculées et attaquées par des groupes jihadistes.
Ce fut le cas après l’attaque sanglante du 14 novembre contre un détachement de gendarmerie d’Inata dans le nord, qui a fait au moins 57 morts, dont 53 gendarmes, a-t-il indiqué.
Le Burkina Faso fait face depuis 2015 à des attaques jihadistes régulières et meurtrières, en particulier dans les régions du nord et de l’est, dans la zone dites des “trois frontières”, aux confins du Mali et du Niger, deux pays également confrontés aux opérations des jihadistes armés.
Les violences qui frappent civils et militaires, parfois mêlées à des affrontements intercommunautaires, ont fait environ 2.000 morts et contraint 1,4 million de personnes à fuir leur foyer.
Excédés par cette situation, des milliers de Burkinabè manifestent régulièrement à travers tout le pays pour dénoncer “l’incapacité” et “l’impuissance” du président Roch Marc Christian Kaboré à faire face à la violence jihadiste.
AFP