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En Afrique, Huawei déploie ses technologies de surveillance par reconnaissance faciale

Dans des dizaines de pays d’Afrique, des caméras intelligentes de reconnaissance faciale sont en train d’être installées par l’entreprise chinoise Huawei. Alors que le groupe technologique est accusé d’aider à traquer les opposants politiques en Ouganda et en Zambie, des inquiétudes sur la surveillance technologique “à la chinoise” voient le jour sur le continent.

La liste des pays africains avec lesquels Huawei Technologies a passé des accords dans le cadre de son initiative “safe city” (villes sécurisées par les technologies connectées) est impressionnante.
Le groupe technologique doit en effet équiper plus de 200 villes, dans 50 pays, avec ses systèmes de surveillance par intelligence artificielle (IA). Le continent africain est en bonne place, puisque 13 pays au moins sont d’ores et déjà concernés :

Huawei, champion des réseaux et de la technologie 5G, mais aussi des systèmes de reconnaissance faciale, est une entreprise technologique chinoise accusée d’espionner pour le compte de Pékin, au point d’avoir été interdite du territoire américain.

Les systèmes de surveillance par caméras de rue de Huawei, couplés à des logiciels de détection de comportements et de reconnaissance faciale, séduisent malgré tout de plus en plus de décideurs politiques, bien au delà de la Chine. L’idée de la “ville sécurisée — par des technologies de surveillance intelligente—, la “safe city”, se vend visiblement très bien en Afrique…

Ces algorithmes de reconnaissance vérifient quels vêtements vous portez, quelles chaussures sont à vos pieds. Ils vérifient réellement votre démarche, car la démarche de tout le monde est unique.Christo Abrahams, responsable technique de Huawei, lors de la conférence de Mombasa du 14 novembre 2019.

Les Etats africains sous le charme de Huawei

Une récente conférence des maires de toute l’Afrique — dont Huawei était l’invité d’honneur — organisée au Kenya, a permis de mieux envisager l’ampleur du réseau de surveillance par caméras intelligentes que l’entreprise chinoise compte déployer… ou a déjà déployé. Le journaliste sud-africain Simon Allison s’en est alarmé dans un article du Mail & Guardian. Huawei a couvert le centre de Nairobi — la capitale du Kenya — de ses caméras de surveillance par intelligence artificielle, tout comme Kampala, la capitale de l’Ouganda. Cette dernière est désormais sous surveillance automatisée par les CCTV (caméras de télévision en circuit fermé, terme technique pour les réseaux de caméras urbaines de surveillance) chinoises à 85%, selon les autorités.

Mais qu’est-ce que recouvrent les systèmes de surveillance automatisés de rue qu’installe Huawei en Afrique ? Un intervenant sud-africain, travaillant pour le groupe chinois, Christo Abrahams, a expliqué au journaliste du Mail & Guardian à l’issue de la conférence de Mombasa, que “ces algorithmes de reconnaissance vérifient quels vêtements vous portez, quelles chaussures sont à vos pieds. Ils vérifient réellement votre démarche, car la démarche de tout le monde est unique (…) Ce qui est bien, c’est que votre passé peut vous rattraper, désormais. Les algorithmes peuvent prendre une image d’un seul côté de vous et restituer tout votre visage, puis le faire passer par le système de caméras, et ils seront alors capables de dire où vous en étiez depuis deux semaines (…) Quel était le centre commercial où vous étiez, quelle voiture vous conduisiez, qui était avec vous au centre commercial. Toutes ces associations se font par l’intelligence artificielle seule“.

A écouter Christo Abrahams, les capacités de surveillance des populations par les systèmes de Huawei sont à la mesure de leur potentiel totalitaire : immenses, comme le souligne le journaliste Simon Allison, visiblement très destabilisé à la suite de cet échange. Le journaliste résume les objectifs de Huawei ainsi :”Leur vision s’articule autour de la surveillance, de l’intelligence artificielle et des réseaux de communication 5G, créant ainsi un monde où chacun de vos mouvements est suivi, enregistré et consultable.”

Dépendance technologique chinoise

Huawei continue de nier son implication dans deux affaires de surveillance d’opposants politiques en Ouganda et en Zambie, révélées par le Wall Street Journal en août 2019. Le groupe chinois est intervenu, selon le journal américain, pour récupérer des informations confidentielles d’opposants politiques — sur Skype et WhatsApp — pour le compte des gouvernements ougandais et zambiens. Ces derniers nient ces piratages. Le groupe chinois nie les y avoir aidés.

Les caméras avec reconnaissance faciale et intelligence artificielle, transforment déjà la police moderne en Ouganda.Fred Enanga, porte-parole de la police ougandaise

Ces méthodes rappellent celles de Pékin, particulièrement dans la région du Xinjang, où la surveillance technologique de masse s’exerce en permanence. Un million de Ouïghours sont internés dans des camps, sur simples soupçons d’exercer leur religion… notamment grâce à des systèmes de surveillance par intelligence artificielle de Huawei.

Huawei est le principal acteur sur le marché des “backbones” (liaisons de cœurs de réseaux par fibres optiques, le plus souvent) de télécommunications en Afrique. De plus, 70% des infrastructures réseaux installées et gérées sur le continent le sont par cette seule entreprise. Avec l’aide de deux autres groupes technologiques, ZTE et China Telecom Global, la quasi totalité du marché des infrastructures connectées du continent africain sont aujourd’hui sous contrôle chinois. La surveillance policière et étatique africaine, dans le cadre des projets de smart cities (villes connectées) qui fleurissent un peu partout sur le continent, est donc en passe d’être assurée par ces entreprises technologiques issues de la plus grande dictature au monde, la Chine.

Répression politique par caméras intelligentes ?

En Ouganda — où la police a investi 126 millions de dollars dans son réseau de caméras de surveillance par reconnaissance faciale auprès de Huawei — les réactions d’inquiétude des militants politiques se font entendre. Les déclarations d’un porte-parole de la police, Fred Enanga, s’enthousiasmant sur cette technologie à la fin de l’été, n’ont pas rassuré, au contraire : “Les caméras de reconnaissance faciale par intelligence artificielle  transforment déjà la police moderne en Ouganda, dans le cadre du maintien de l’ordre et de la sécurité.” Ingrid Turinawe, une dirigeante du Forum for Democratic Chang, le plus grand parti d’opposition ougandais, a répondu à Enanga en écho : “Le projet de vidéosurveillance [ougandais] n’est qu’un outil pour nous suivre, nous chasser et nous persécuter

Les systèmes de surveillance par intelligence artificielle chinois en Afrique font aussi réagir à travers le monde, jusqu’aux Etats-Unis. L’ONG américaine Freedom House, a accusé la Chine et ses entreprises de poursuivre une politique d ‘”expansionnisme techno-dystopique”. Pour l’organisation de défense des libertés, “les autorités chinoises vendent aux responsables politiques locaux non seulement des produits pour contrôler leurs sociétés, mais également une vision de la manière de construire un État prospère et stable sans devoir céder le pouvoir aux citoyens.

TV5

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