Alors qu’une grève de 15 jours est dans le pipeline depuis le 19 octobre, les agents des collectivités territoriales n’entendent observer aucune trêve pour l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail. Ils ont déposé le même jour un autre préavis, de grève illimitée. Les opérations de révision des listes électorales, en cours depuis début octobre et pour trois mois, sont donc à l’arrêt. Si elle traine, la grève pourrait avoir des conséquences sur le calendrier électoral, voire sur la durée de la transition.
« C’est l’une des activités à laquelle nous nous attaquons. À elle seule, elle nous suffit. La révision des listes électorales se déroule dans le dernier trimestre de l’année et par séquences. Chaque période a sa particularité et d’ailleurs c’est avec ce chronogramme qu’on travaille », dévoile Ousmane Christian Diarra, porte-parole du Syndicat national des travailleurs des Collectivités territoriales (SYNTRACT).
La stratégie semble porter fruit. Le 19 octobre dernier, premier jour de la grève, les centres de révisions des listes électorales étaient déserts. Les agents sont en grève jusqu’au 6 novembre. « Il fallait voir Bamako aujourd’hui (19 octobre). Toutes les mairies ont fermé, hormis celle de la Commune III, qui, après une réunion, a également fini par fermer dans l’après-midi. Sur toute l’étendue du territoire national, la grève a été suivie, à part par le préfet de Bandiagara. Et, dans tous les services centraux rattachés, c’était quasiment à 100%, sauf à la Direction des Finances et du matériel », explique Ousmane Christian Diarra.
Il affirme que le SYNTRACT a déposé un autre préavis de grève illimitée, qui entrera en vigueur le 9 novembre prochain, étant tributaire des négociations « bâclées » du weekend entre le syndicat et le gouvernement. « Vendredi et samedi dernier, il y a eu deux jours de négociations qui ont abouti à un désaccord total. Sur les 11 points de revendications, il y a eu 11 points d’échec. Donc, comme c’est ainsi, nous avons décidé de déclencher la grève illimitée ».
Impacts Les autorités de transition ont en charge d’organiser des élections générales, dont la présidentielle, dans un délai d’un an et demi. Le processus a commencé par la révision des listes électorales, qui se retrouve ainsi bloquée par la grève des travailleurs des collectivités territoriales, qui se trouvent au début et à la fin de l’opération. Pour le politologue Salia Samaké, si une telle situation perdurait, elle aurait de forts impacts sur le processus électoral, voire sur la durée de la transition. « C’est très malheureux pour la révision des listes électorales. Ce sont les agents des collectivités territoriales qui la coordonnent et il y a des périodes précises pour les opérations. Par exemple, pour l’inscription, cela se termine normalement fin octobre. Alors s’ils sont en grève et que cette opération n’a pas lieu, cela veut dire que tous ceux qui ont juste 18 ans n’auront pas de chances d’être inscrits. Il en va aussi pratiquement de la durée de la transition. Le premier objectif de celle-ci est d’organiser des élections transparentes à la fin de son mandat. Et cela ne peut se faire que sur la base de listes électorales fiables. L’élaboration de ces listes passera nécessairement par la révision et le recensement ».
Aucune alternative ? Sans accord avec le SYNTRACT, le gouvernement a-t-il d’autres alternatives ? « Cela va être difficile, parce que la décentralisation concède une partie de l’autorité de l’État à ses collectivités », répond Salia Samaké. « Ce n’est pas envisageable », renchérit Ousmane Christian Diarra. « Ce n’est pas possible, dans la mesure où les commissions de révision des listes électorales sont mises en place par les représentants de l’État. Et elles fonctionnent avec les représentants de l’administration et des représentants des partis politiques. Si nous nous retirons, nous faisons se retirer les représentants de l’administration. Les commissions administratives siègent au niveau de chaque mairie et les secrétaires généraux qui les encadrent sont dans la même mouvance de grève que nous », poursuit-il. Contactées, les autorités n’ont pas souhaité répondre dans l’immédiat, « étant en consultations avant de communiquer ».
Boubacar Diallo
Journal du Mali