Deux morts dont le commissaire de police de Niono et de nombreux blessés : c’est le bilan des incidents violents qui ont secoué cette localité (région de Ségou) où les populations ont, le mercredi dernier, manifesté contre les éléments de la police. Pourquoi ces incidents ? Le député Amadou A Doumbia, élu de Niono, donne sa version. Il pointe un doigt accusateur sur le général Salif Traoré, ministre de la Sécurité et de la protection civile.
«Tout à commencer par une opération de contrôle de vignette initiée par le maire de Niono à la veille de fête de Tabaski. Pour mener à bien cette opération, les services du commissariat ont été sollicités pour appuyer les agents de la mairie. Lors du contrôle, un motocycliste, qui a filé entre les agents de la mairie en discussion avec un propriétaire de tricycle, a été pourchassé et appréhendé par un policier avant de se voir agressé. Le motocycliste s’en est sorti avec une jambe fracturée. Lorsque la nouvelle a été apprise par la population, une manifestation de dénonciation a été initiée devant la mairie. Quand les manifestants étaient à la mairie pour manifester leur mécontentement, le commissaire a envoyé ses éléments qui ont démarque sur les lieux pour gazer les manifestants. Cette réaction de la police n’a pas du tout été cautionnée par la population qui s’est ensuite livrée à des actes de mécontentements sur les principales voies publiques de la ville. Par la grâce de Dieu, elle n’a pas touché ce jour aux bâtiments du commissariat.
Le lendemain, la mairie a décidé de sursoir au contrôle des vignettes en présentant ses excuses à la population en reconnaissant que l’opération a été mal organisée et que le policier avait outrepassé ses pouvoirs. Les manifestants ont été rencontrés par la mairie dans ce sens. Mais, lors de la rencontre avec la mairie, la population a exigé à ce que le policier réponde de son acte devant la justice. En plus, elle a dénoncé la complicité du commissaire qui a ordonné l’ordre d’aller gazer les manifestants à la mairie au lieu de sanctionner le policier fautif. Par conséquent, elle a dit que le commissaire n’est plus une source de sécurité pour la population en demandant aussi que ce dernier soit relevé. La population a aussi dénoncé le temps des patrouilles nocturnes qui commencent à 20 heures et terminent à 5 heures du matin en demandant de ramener ce temps de 00 heure à 5 heures du matin. L’argument avancé par la population était que les gens avaient beaucoup de courses à faire à la veille de la fête de Tabaski et que c’est la période des cultures qui laissent les citoyens mobilisés tard dans la nuit. L’autre argument de la population était que malgré les patrouilles de la police, leurs motos volées estimées à des centaines restent toujours introuvables. En disant que la population ne tire bénéficient des patrouilles exagérées du commissariat. L’avis de la population était que les policiers les font coucher tôt pour aider les voleurs à leur dépouiller de leurs biens. C’est ce message qui m’est parvenu. J’ai aussitôt appelé le ministre de la Sécurité intérieure et de la Protection civile, le Général Salif Traoré.
Mais, je ne l’ai pas eu au téléphone. Je l’ai donc laissé un message pour l’informer et lui demander les mesures qu’il a prises pour calmer les esprits. Pour rappel, avant ce message, j’avais personnellement attiré son attention sur l’affaire dans un précédent appel téléphonique. Dans son message, il m’a dit que depuis l’incident qu’il a dépêché sur les lieux le Gouverneur et le Directeur régional de la police de Ségou. Il m’a dit dans le message qu’il s’apprêtait aussi à envoyer le Directeur national de la Police. En fonction de son message très peu rassurant au regard de la gravité de la situation, je lui ai donné mon avis qui était de lui demander de tout faire pour relever le commissaire de Niono et que l’agent de police fautif soit sanctionné conformément à la loi. Sa réponse a été que s’il accédait à la demande de la population ce serait l’encourager la population à demander la révocation de tous les agents de polices qui seront envoyés là-bas à chaque qu’elle n’est pas satisfaite.
J’ai essayé de lui faire comprendre que la police est là pour rendre service à la population. Et que si la population n’est pas satisfaite de façon objective du service rendu par les policiers en demandant son départ, qu’elle mérite d’être entendue. Malheureusement, ce jour, nous ne nous sommes pas compris. Avant de se quitter, il m’a dit qu’il a envoyé une mission en demandant au commissaire de faire son rapport et qu’il pendrait sa démission après la réception de celle-ci. Après l’échange avec le ministre, j’ai fait le compte rendu à la population en l’a appelant au calme et que le ministre était sur l’affaire.
Entre temps, j’ai voyagé pour la France. Mais avant le maire m’a appelé pour m’informer que le commissaire a été interpellé à Bamako avec son adjoint. Quelques temps après, l’adjoint au commissaire est revenu pour reprendre le service sans le commissaire. Pour moi, c’était un début de solution par rapport au problème. A ma grande surprise, le jeudi, dans la soirée, j’ai reçu un message comme quoi le commissaire de Niono a été tué par des manifestants. Dès réception du message, j’ai contacté le maire qui a confirmé l’information.
Le seul responsable dans cette affaire est le Général Salif Traoré. Salif a fui sa responsabilité. Si non lui demande aujourd’hui, il vous dira en âme et en conscience que l’Honorable Raba Doumbia a tout dit et a tout fait pour éviter cette situation. C’est regrattage ! On ne peut pas bâtir un pays dans ces situations. L’un du rôle du député est d’attirer l’attention des autorités sur les problèmes à la base. Mais, il ne faudrait pas que les autorités négligent les informations. C’est une habitude chez Salif Traoré de négliger les informations. Il n’est pas à son premier acte de négligence. Par rapport à l’attaque de Yorosso, j’ai été informé une semaine à l’avance qu’il est probable que Yorosso fasse l’objet d’une attaque durant le mois de carême. Aussitôt l’information reçue, j’ai été voir le Général Salif Traoré dans son service pour lui présenter la situation. Il était assisté d’un de ses Conseillers techniques, un certain Kanté. Le Général m’a dit qu’il a pris note et qu’ils sont là-dessus. Je lui ai aussi dit que les hommes sur place sont en nombre insuffisant et qu’ils n’ont même pas de véhicules pour transporter les troupes. C’est après que j’ai appris que finalement l’attaque a eu lieu. Et quand je suis rentré en contact avec son Conseiller technique, celui-ci me dit qu’ils ont envoyé le renfort. Après j’ai recoupé l’information auprès du maire de Yorosso qui m’a dit qu’aucun renfort n’a été envoyé. Je me demande quel type de dirigeant Salif est. On doit s’interroger ! Ce que je peux vous confirmer, c’est que la population de Niono n’est pas une population violente. Elle est respectueuse de l’Etat de droit. C’est une population très docile, mais qui a une dignité à défendre. Mais, comme on le dit : trop c’est trop. On ne l’a pas pris au sérieux. Et voilà le résultat ! Nous regrettons les morts. Nous regrettons la perte du commissaire qui pouvait être utile ailleurs et qui pouvait tirer les leçons du cas de Niono. Et qui pouvait être un policier valable dans d’autres localités du Mali. Les paisibles citoyens qui sont sortis pour protester étaient sortis pour dire qu’ils doivent aussi être respectés, qu’ils méritent d’être respectés. Le Malien ne mérite pas ça ! C’est une perte de bras valide, une perte pour Niono, une perte pour le Mali. Qu’il reconnaisse que ce qui est arrivé est en grande partie sa faute ! Ce n’est pas la police de Niono. Ce n’est pas la population de Niono. Le premier responsable de situation est Salif Traoré. Le parti Sadi est avec la population de Niono qu’elle sache qu’elle n’est pas orphéline. Le parti Sadi est avec la police nationale comme toujours. Mais, le parti Sadi est contre l’injustice ! Qu’elle sache que la justice sera rendue ! ».
Honorable Amadou A Doumbia