Au cours de sa traditionnelle rencontre mensuelle avec les hommes de média, tenue le week-end dernier, le président de l’Alliance démocratique du peuple malien (Adepm) et non moins membre du Conseil national de transition (CNT), Dr. Aboubacar Siddick Fomba s’est prononcé sur les questions brûlantes de l’heure notamment celle des exonérations accordées aux sociétés minières implantées au Mali, le discours d’investiture du tout nouveau président de la République du Niger, Mohamed Bazoum. Aussi, il a dégagé des pistes de solutions à la grave crise multidimensionnelle qui secoue notre pays depuis 2012.
A l’entame de ses propos, il dira qu’il revient à la charge sur le refus d’accorder des exonérations aux sociétés minières implantées au Mali, ajoutant qu’au début des années 2000 jusqu’au début des années 2010, le prix du gramme de l’once d’or avait varié de 400 à 800 dollars soit de 12,87 dollars par gramme à 25,72 dollars par gramme approximativement. Il a souligné que les coûts de production ont varié de 5 dollars par gramme d’or à 11 dollars par gramme selon les sites d’exploitation.
A l’en croire, aujourd’hui le prix a plus que doublé pour un fixing de Londres variant entre 1600 dollars l’once et 1900 dollars l’once (soit 51,45 dollars par gramme et 61,09 dollars par grammes. Ainsi, il indiquera qu’au regard de ces chiffres, un pays en déficit budgétaire comme le nôtre ne doit pas accorder d’exonérations sauf si c’est dans l’optique d’appauvrir le pays. Car, selon lui, le Mali accorde près de 40 milliards d’exonérations sur les hydrocarbures des sociétés minières. “La refondation commence par la protection de nos ressources”, a-t-il martelé.
Se prononçant sur le discours d’investiture du tout nouveau président nigérien, il a saisi l’occasion pour adresser ses félicitations à Mohamed Bazoum pour sa brillante élection à la tête de la République sœur du Niger et aussi au peuple du Niger. “Contrairement à plusieurs de nos compatriotes, j’ai beaucoup apprécié le discours hautement diplomatique et républicain de Mohamed Bazoum. Je partage son analyse et la maîtrise du foyer de refuge de l’Etat islamique dans le grand Sahel (EIGS)”, a-t-il laissé entendre. Il a dit avoir bien noté la partie du discours où Bazoum dit que “le combat contre le terrorisme sera difficile aussi longtemps que l’Etat malien n’aura pas exercé la plénitude de sa souveraineté sur les régions de Gao et Ménaka”. “Peut-on comprendre que la plénitude de la souveraineté de l’Etat malien doit épargner la région de Kidal”, s’est-t-il interrogé. Et de poursuivre qu’occulter la région de Kidal de la plénitude de la souveraineté de l’Etat malien n’est-il pas une contradiction entre Bazoum et son prédécesseur qui avait qualifié Kidal de sanctuaire et de point de préparation des attaques contre le Niger.
La France responsable de la sanctuarisation de Kidal
Pour le conférencier, la plénitude de la souveraineté de l’Etat malien ne doit pas être sélective, mais totale sur toutes les régions du Mali sans épargner celle de Kidal. “Je partage le cri de cœur de Bazoum demandant aux Maliens de s’entendre, d’appliquer l’accord d’Alger et même aller au-delà donc une approche inclusive”, a-t-il poursuivi.
Cependant, il notera que la contradiction à ce niveau est la réception de la délégation de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) de façon particulière qui constitue une violation de la charte pour la paix qui précise que le gouvernement malien est le chef de file par rapport aux questions de l’accord d’Alger. En effet, il a estimé que cette approche est sélective surtout que les membres de la CMA sont représentés dans tous les organes de la Transition. “Alors quelles sont les motivations de cette réception et bien avant l’investiture”, s’est-il interrogé.
S’adressant au président Bazoum, il rappellera que cette crise a été imposée au peuple malien à travers la guerre de Libye dont la France assume l’entière responsabilité. “Nous ne devons pas occulter la responsabilité de la France de la présence du groupe terroriste, l’EIGS dans les régions du Mali y compris la sanctuarisation de Kidal si nous voulons faire une analyse sans complaisance”, a renchéri le président de l’Adepm.
Des poursuites contre des anciens ministres impliqués dans les détournements de fonds
Par rapport à la question de l’absence de la Haute Cour de justice, il a noté que le Conseil national de transition (CNT) a mis en place une commission composée de plusieurs de ses membres. Cette commission est chargée d’élaborer une loi spécifique afin de permettre d’engager des poursuites judiciaires contre les anciens ministres impliqués dans les dossiers de détournement des fonds publics, de délinquance financière et autres.
Evoquant la crise au Mali et ses proposions de pistes de solutions, il précisera que pour lutter contre les actions de développement économique durable contribueront à la lutte contre l’insécurité à 70 % et les Forces de défense et de sécurité contribueront à 30 %.
A ses dires, le détournement du denier public, le clientélisme, la corruption, le bradage des biens publics… sont des obstacles au développement économique donc constituent en même temps causes et facteurs favorisant de l’insécurité. S’y ajoutent l’injustice sociale, l’impunité et la justice à géométrie variable qui sont à l’origine de 50 % des cas d’insécurité.
A la lumière de ces analyses, il a proposé qu’il faut, entre autres, faire l’état des lieux de la nation malienne ; mettre en place d’un système éducatif associé à une bonne formation citoyenne, patriotique dont l’objectif sera la formation d’un nouveau capital humain au Mali ; lutter contre l’impunité et la corruption, la bonne justice et la lutte contre L’injustice sociale et le clientélisme ; mettre en œuvre des actions de développement économique durable soutenant la création de nos entreprises publiques et privées et la réhabilitation des entreprises sociales de l’Etat (UMPP, Comatex, Huicoma, Usine de thé de Farako, Sopam…) ; reconstruire l’armée à travers une Politique nationale claire sans interférence politique ; relire les accords commerciaux et tous les accords nationaux et internationaux ; moraliser la vie politique ; élaborer et adopter une nouvelle Constitution en phase avec les réalités sociétales à travers l’interrogation du peuple malien sur le régime et le contenu ; valoriser le travail et le citoyen malien. Aussi, il a proposé de mettre l’accent sur la redevabilité des autorités dirigeantes.
“La nomination aux postes techniques doit être basée sur les critères de compétence et d’intégrité intellectuelle et morale”, a-t-il terminé. Boubacar Païtao