Lancée en grande pompe le mercredi 20 juin à Bamako, à travers une cérémonie officielle présidée par le Gouverneur du district de Bamako, l’opération de distribution de la nouvelle carte d’électeur connaît un franc succès en raison de l’enthousiasme des populations. Cependant, si l’Etat ne résout pas à temps les premiers couacs constatés, cette opération risquera de terminer en eau de boudin. Toute chose qui fera chuter le taux de participation à l’élection présidentielle du 29 Juillet prochain.
Sans conteste, l’annonce du début de la distribution des nouvelles cartes d’électeur biométriques a suscité de réel engouement chez les Maliens. Aux premiers jours de cette opération, le constat laissait apparaître une véritable ruée des populations vers les centres de retrait des cartes électeurs. Cela malgré une relative situation de désordre généralisé des membres des commissions de distribution et des défaillances de certaines structures communales ou locales. Parmi les manquements que nous avons constaté lors de notre passage dans certains centres, comme ceux de Kalaban Coro, de Torokorobougou et de Magnambougou, il y’a entre autres : l’absence des listes d’émargement contrairement aux cartes, confits de représentativité des titulaires et suppléants des partis, non maîtrise des textes par des présidents des centres et retard des agents dans le processus de délivrance des cartes d’électeur biométriques. D’où des longues files d’attente devant les salles de distribution des cartes et des prises de bec entre les populations et les agents de distribution. Lesquels sont pour la plupart à leur première expérience, sans aucune formation au préalable sur le processus.
Au centre de distribution de Kalaban coro, un citoyen témoigne : « Je suis venu récupérer ma carte. Je suis là depuis 7H30mn, il est 10h 30mn, je dois faire encore une heure d’attente, ma journée est finie. Je ne sais pas quel sera mon sort au niveau de mon service. Car je n’ai pas pris de permission ». D’un ton ferme, notre interlocuteur a affirmé que le processus est lent et n’encourage pas les citoyens à effectuer leur devoir citoyen. « On a l’impression qu’ils font exprès pour décourager les gens » a-t-il lancé. Dans un même état d’âme, A.D une étudiante, résidente à Kalaban Kouloubleni, sa carte Nina dans sa main était en train de rebrousser chemin, après avoir recherché en vain sur la liste. « On m’a fait savoir que mon nom n’est pas sur la liste. Je ne retournerais plus ici après ce calvaire vécu » a-t-elle conclu en tournant le dos. Comme elle de nombreuses personnes frustrées ont continué à faire des bruits dans les différents centres, notamment en Commune III.
« Je suis de Ouolofobougou Bolibana. Pour un seul centre on a regroupé les populations de trois quartiers, Ouolofobougou, Dravela et Ouolofobougou Bolibana, c’est un véritable parcours de combattant. Une seule personne peut faire 30 mn avant de sortir. Les agents ne viennent pas à l’heure et sont lents » affirme Malamine Sanogo, qui demande aux autorités de revoir cette situation.
En réponse, un élu sous anonymat a tenté de donner des réponses aux supplices évoqués. « Pour le retard, cela est dû au fait que la mairie ne dispose que d’un seul véhicule qui doit faire le tour des dix centres pour déposer les matériels. Aussi pour désengorger le centre de l’école Camp Digue, nous avons décidé d’ouvrir un autre centre à l’école Syndicat de Dravela pour les populations de ce quartier » a-t-il fait savoir.
La grogne des agents de distribution !
En plus des complaintes des citoyens, l’autre problème qui restera de porter atteinte à ce processus de retrait des cartes d’électeur biométriques, relève de la grogne des agents de distribution. Lesquels se plaignent des conditions de traitement. « Nous sommes là tous les jours de 8H à 17H sans repas, ni rémunération. On nous a dit que les autorités vont donner quelque chose, mais nous ne savons pas le montant et le jour ou cela sera remis », déplore O. Doumbia, un agent de distribution. Pour d’autres c’est l’indifférence de leur parti politique qui leur donne le sentiment d’être laissé pour compte.
« Nous sommes à quatre jours de l’opération. Aucun membre de notre parti n’est venu nous voir pour savoir dans quelle condition nous travaillons. La mairie a dit que ce qui sera donné n’est pas suffisant pour une personne à fortiori pour moi et mon suppléant. D’ici à la semaine prochaine, si nous n’aurions pas de suite favorable, nous avons décidé de tout arrêter » martèle I.Diarra du centre du Badialan.
Au-delà des agents de distribution, certains présidents de centre et membres de la commission ont déploré leurs conditions de travail. D’ailleurs les agents relevant du corps des administrateurs civils ont mis en exécution leur mot d’ordre de grève.
A l’allure où vont les choses plusieurs, si les plus hautes autorités ne prennent pas le taureau par les cornes, un blocage du processus n’est pas à exclure. Que Dieu nous en préserve.
Bokoum Abdoul Momini
Source: Le Sursaut