André Brink est décédé vendredi 6 février 2015 en soirée, à l’âge de 79 ans. Il est l’auteur du célèbre roman Une saison blanche et sèche, qui lui avait valu le prix Médicis étranger en 1980. L’écrivain s’en est allé dans l’avion qui le ramenait de Belgique, où il venait de recevoir un diplôme honoris causa de l’Université catholique de Louvain. Cet Afrikaner blanc aura passé une grande partie de sa vie à critiquer le régime de ségrégation raciale en place dans son pays jusqu’en 1994.
L’homme qui s’est éteint vendredi soir était l’un des écrivains afrikaners les plus critiques vis-à-vis du régime d’apartheid. Il fut le premier auteur de sa communauté à être censuré par le régime blanc de ses semblables, pour son roman Au plus noir de la nuit, publié en 1973. Quelques années après, son roman le plus célèbre, Une saison blanche et sèche, était interdit dès sa publication dans le pays. Son auteur n’en recevra pas moins le prix Médicis étranger pour cet ouvrage, en 1980.
André Brink, qui bénéficiera dès lors d’une renommée mondiale, faisait partie de ce mouvement d’auteurs afrikaners qu’on appelait « die Sestigers », « les gens des années 1960 », avec Ingrid Jonker et Breyten Breytenbach. Un mouvement très marqué par le vent de liberté soufflant en France pendant ces années. C’est d’ailleurs à l’occasion de son premier voyage en France, de 1959 à 1961, au contact d’étudiants africains, qu’André Brink prend conscience des effets néfastes de la politique d’apartheid dans son pays.
« Je ne me suis rendu compte de l’apartheid, et de tout ce que cela voulait dire, que vers ma 25e année, quand j’ai quitté l’Afrique du Sud pour faire des études à Paris, avait-il confié en 2010 à nos confrères de France 24. A ce moment-là, je n’avais encore jamais eu l’occasion de rencontrer une seule personne noire qui n’était pas ouvrière ou domestique. Donc, il ne m’était jamais arrivé au cerveau de penser qu’il existe une possibilité pour qu’un Noir devienne avocat, ou médecin, ou même instituteur. »
André Brink, du noir et blanc à la couleur
Le jeune Afrikaner est alors étudiant en littérature comparée à la Sorbonne, à Paris. Il y écrit son premier roman, L’ambassadeur, un huis clos amoureux qui fait scandale en Afrique du Sud. Mais désormais écrivain engagé, André Brink passera ensuite toute une partie de sa vie a dénoncer la ségrégation raciale en Afrique du Sud. Dans Une saison blanche et sèche, il raconte la prise de conscience d’un certain Ben Du Toit, après la disparition du fils du jardinier de l’école dans laquelle il enseigne. Cet Afrikaner tranquille apprend que le jeune Noir est décédé en prison, et va alors décider de mener un combat pour la vérité et la justice.
Puis, à partir de 1994, il racontera la nouvelle Afrique du Sud arc-en-ciel et démocratique, avec ses espérances et ses turbulences. « Pour moi, c’était le sommet de ma vie, disait-il encore en 2010 au sujet de la fin de l’apartheid. Je me disais à ce moment-là : ” Maintenant je meurs “, parce qu’il n’y avait rien de plus à quoi je pouvais m’attendre, c’était le sommet de tout ! Si quelqu’un comme lui (Nelson Mandela, NDLR), qui avait passé 28 ans en prison, pouvait sortir de cette prison, dans toute la liberté de son esprit, à cause de la littérature, ça voulait quand même dire quelque chose sur le pouvoir de la littérature. »
Au total, André Brink a écrit une vingtaine de romans et d’essais en anglais et en afrikaans, la langue dominante de la minorité blanche dans le pays. Nommé à plusieurs reprises, André Brink n’a finalement jamais reçu le prix Nobel de littérature.
Source: RFI