Les dernières élections législatives vont-elles sonner le glas pour le parti de Soumaïla Cissé ? Douloureuse question à un moment où le chef de file de l’opposition se trouve toujours, depuis bientôt deux mois entre les mains de ses ravisseurs qui ne sont pas prêts de le relâcher si tôt.
La nouvelle Assemblée nationale n’a même pas encore fini d’installer son bureau et ses commissions de travail que la question existentielle se pose pour l’Urd. Beaucoup en sont déjà à se demander si le parti pourra résister à l’absence de son leader charismatique. Ce soupçon d’aléatoire survie a de bonnes raisons d’être. En effet, dans une sorte de correspondance datée du 15 mai, qui est destinée aux militants intitulée simplement « Note d’information », du reste signé par le premier vice-président, Pr. Salikou Sanogo, la direction de l’Urd bat sa coulpe et se contraint à des justifications qui en disent long sur le malaise qui traverse désormais la formation politique. On y apprend qu’à l’occasion de la session inaugurale de la 6ème législature de l’Assemblée nationale du Mali, tenue le lundi 11 mai 2020 au C.I.C.B., le parti a donné consigne à ses députés de voter blanc. La note poursuit : « Il est apparu qu’à la fin du processus de vote, nos militants ont en grand nombre manifesté leur étonnement et leur mécontentement face au choix de nos députés. Le parti a essuyé de nombreuses critiques suite à ce vote ». En clair, il y a, d’une part, entre la direction du parti et les députés un désaccord flagrant dans les conduites à tenir, et d’autre part, entre cette même direction et les militants, un hiatus tel que les derniers sont étonnés et mécontents et le font savoir.
Au demeurant, qu’est-ce qui a bien pu motiver la direction actuelle de l’Urd à donner à ses députés la consigne de voter blanc ? Qu’est-ce qui a alors poussé les députés à n’en faire qu’à leur tête ? Que la direction du parti se doive d’accepter humblement les critiques de ses militants, sympathisants et aussi de ses alliés, comme le dit la note d’information, à quoi cela rime dans la conjoncture politique actuelle ?
Assurément, il y a problème au sein de l’Urd et il n’est pas petit. Dans l’affaire du vote pour l’élection du président de l’Assemblée nationale, Pr. Salikou Sanogo ne dit pas la vérité quand il évoque des alliés. Ceux-ci existeraient, que c’est en amont qu’ils auraient désavoué le vote blanc, et non s’en plaindre après coup. Le goulot d’étranglement, c’est l’honorable Hassan Sidibé, député Yéléma élu en Commune IV du district de Bamako, qui l’a révélé à sa façon depuis la salle du C.I.C.B. : « Ma conclusion est la suivante : notre position de centriste et de réformateur est justifiée aujourd’hui par ce résultat : 134 voix pour Moussa Timbiné, 8 voix pour Moussa Mara, 3 bulletins nuls. En regardant de près ces résultats, même l’Urd a voté pour le Rpm. Donc, cette histoire de majorité et d’opposition n’est que pure mascarade… »
Entre les lignes, il faut comprendre que l’Urd n’a plus de positionnement clair, lisible ; il est même en train de se faire porter disparu. Ce qui a été déjà mal ressenti quand Soumaïla Cissé a été enlevé. L’Urd, à part des communiqués classiques du genre naturel, n’a réussi à susciter aucun mouvement populaire de soutien à son leader, chef de file de l’opposition. Le parti fait peut-être des alliances au moment de certaines élections, mais sa vraie nature est qu’il n’est désormais plus qu’un parti d’accompagnement. Sa direction n’est de toute évidence pas capable de le positionner fortement sur l’échiquier politique national. Sans compter sur les possibles compagnonnages suspects qui peuvent exister entre des dirigeants en perte de vitesse et les tenants du pouvoir qui ont la haute main sur les nécessaires finances. Soumaïla Cissé absent, l’Urd, entre être et disparaître, n’est en tout cas plus qu’un serpent dont on a coupé la tête. C’est le deuxième rapt du malheureux chef de file de l’opposition.
Bogodana Isidore Théra
LE COMBAT