Sans langue de bois, le Chef de l’Etat nigérien Mohamed Bazoum fustige la prise de pouvoir par les militaires en Afrique. Pour le N°1 nigérien, les putschistes au pouvoir au Mali et au Burkina ne sont nullement une solution ni pour lutter contre le terrorisme ni pour promouvoir la bonne gouvernance.
Le Samedi 28 Mai 2022 a eu lieu à Malabo le Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine, sur le terrorisme et les changements anticonstitutionnels de gouvernement en Afrique. Lors de ce sommet dont la pertinence du thème a donné un cachet particulier aux débats, le Président Bazoum est revenu sur les raisons qui expliquent cette corrélation entre Terrorisme et Changement anticonstitutionnel de pouvoir au Sahel principalement et les conséquences du terrorisme sur les institutions dans les États de Sahel, déjà fragiles.
Dans certaines régions du continent africain, le terrorisme est un phénomène en expansion et que les institutions sur lesquels reposent les États sont plutôt fragiles. Si les constitutions en vigueur affirment de façon unanime leur attachement aux principes de la démocratie et de l’Etat de droit, force est de reconnaître qu’entre la gouvernance telle qu’elle est proclamée et telle qu’elle est à l’œuvre, il n’est pas rare de constater un décalage de nature à exposer à des risques de déstabilisation.
La région du Sahel à laquelle appartient le Niger, est particulièrement affectée par ces deux phénomènes, et les coups d’Etat militaires survenus au Mali et au Burkina Faso ont présenté par leurs auteurs : colonel Assimi Goïta et Lieutenant-colonel Damiba, comme les moyens auxquels ils ont été contraints de recourir pour mettre notamment fin à la détresse des populations victimes des affres du terrorisme.
Le Président Bazoum estime que dans le contexte de « démocraties entachées assez souvent de pratiques de gouvernance pas toujours vertueuses, de logiques d’éternels bras de fer entre pouvoirs et oppositions, de l’activisme de sociétés civiles hyperpolitisées et de mal vivre de la jeunesse, des militaires peuvent aisément se poser en sauveurs de la nation ».
Cependant Bazoum n’a pas mâché ses mots lors de cette rencontre à l’initiative du João Lourenço, quant à ces alibis. Selon le Chef de l’Etat nigérien, les derniers coups d’Etat au Mali et au Burkina Faso ne s’expliquent pas forcément par une inefficacité dans la lutte contre le terrorisme. Ces coups d’État ont plutôt contribué malheureusement à déstabiliser encore plus les armées de ces pays et ainsi faire gagner du terrain aux terroristes.
En effet, le président nigérien a fait savoir que les effets du terrorisme ont un potentiel d’impact encore plus fort dans la déstabilisation des institutions étatiques. « Les changements anticonstitutionnels survenus au Mali en août 2020 et au Burkina Faso en janvier 2022 sont une conséquence des victoires remportées par les terroristes sur les armées de ces deux pays », a-t-il explicité.
Et le Chef de l’Etat du Niger de poursuivre : « Pour légitimer leur action, les auteurs des coups d’Etat ont invoqué le désarroi des populations face à cette agression terroriste brutale et la désolation qu’elle a provoquée. Dans leur narratif justifiant leur intervention les militaires ont promis une victoire rapide sur le terrorisme d’une part et la promotion d’une gouvernance frappée au coin de la vertu d’autre part ».
Aux dires du Chef de l’Etat nigérien, au Mali et au Burkina, « la situation sécuritaire s’est plutôt dégradée depuis lors et la promesse des changements dans la gouvernance tarde à se manifester ». Car, l’arrivée des militaires à la tête de ces deux pays a eu pour effets d’affaiblir leurs armées respectives mises sens dessus dessous, d’isoler ces pays à un degré plus ou moins important de la communauté internationale et d’affecter leur coopération financière et militaire avec celle-ci. Tous ces facteurs ont objectivement diminué leurs capacités et réduit leurs chances de l’emporter contre le terrorisme », lâche-t-il.
Le N°1 nigérien de marteler : « Quand par ailleurs on sait que les militaires conditionnent la durée de leur pouvoir à la fin totale du terrorisme sur leurs territoires, on peut affirmer sans risque de se tromper qu’ils envisagent de se maintenir en place pendant longtemps. Cette tentation éternitaire est porteuse de risques graves auxquels ces deux pays, s’ils ne prennent garde, sont condamnés à succomber à plus ou moins longue échéance ».
« L’expérience, au vu de ce qui s’est passé jusqu’ici, ces militaires en déstabilisant les institutions affaiblissent les États et renforcent les groupes terroristes. Ils ne sont donc nullement une solution ni pour lutter contre le terrorisme encore moins pour promouvoir la bonne gouvernance. Ils constituent assurément un facteur de régression pour l’Etat de droit et la démocratie et exposent les pays à des périls inédits », a martelé le Président Bazoum.
DCA
Source: Le SOFT