En mars 2022, le Cadre stratégique permanent (CSP) devait laisser place au Cadre stratégique permanent pour la réconciliation (CSPR). Entre le gouvernement, qui a la ferme volonté de prendre la tête de ce Cadre, et les mouvements signataires de l’Accord de 2015, qui veulent en garder la gestion, l’organisation peine à prendre forme.
Depuis la création du CSP, en avril 2021, il n’a cessé de faire polémique. Pour ses initiateurs, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014 d’Alger, il s’agissait, entre autres, de concrétiser la mise en synergie des efforts en faveur de la mise en œuvre diligente de l’Accord pour la paix… Malgré les justifications de ces groupes armés, signataires de l’Accord de 2015, au début le gouvernement du Mali n’était pas favorable à ce Cadre, qu’il percevait comme « une structure de trop qui n’apporte pas de plus-value ». Notamment le ministre de la Réconciliation, de la paix et de la cohésion nationale, le Colonel-major Ismaël Wagué, qui, lors de la réunion du Comité de suivi de l’Accord (CSA) du 5 octobre 2021, dans le but de faire arrêter une série de rencontres qu’avait débuté le CSP avec des représentants de la communauté internationale, avait notifié à ces derniers de ne plus les recevoir.
« Fructueuses discussions »
Par la suite, de l’eau a coulé sous les ponts. Les parties prenantes se sont retrouvées à Rome en février dernier, dans le but « de s’entendre sur les modalités d’adhésion, de direction et de participation au dit Cadre ». C’est ainsi qu’après trois jours « d’intenses mais fructueuses discussions, un document intitulé Accord de principe de Rome a été signé », avait expliqué le Comité d’orientation politique du CSP dans un communiqué. Plusieurs points d’accord avaient été notés : une large ouverture du CSP à d’autres composantes, l’adoption d’une devise, l’accélération de la mise en œuvre de l’Accord et une présidence tournante entre les parties membres du CSP. Ce dernier point constitue la principale raison du retard et a été également le motif de l’échec de la dernière rencontre entre le gouvernement et les « Mouvements », en mars dernier à Gao. « L’État entend jouer un rôle dans cette structure, qui va dans le cadre du développement, de la paix et qui prend compte les aspects sécuritaires. C’est pourquoi il exige non seulement une participation mais aussi d’avoir une vision de ce Cadre, pour comprendre et orienter la stratégie. Au regard de cette situation, il est important que l’État puisse en prendre la tête dans un premier temps ». Une justification du ministre Wagué qui n’a pas convaincu les « Mouvements » et qui a « empêché la mise en place d’un organe consensuel », même si les parties ont assuré être toujours ouvertes au dialogue. Ainsi, le CSP s’est vu dans « l’obligation juridique » de procéder à la passation de service entre son Président sortant, Bilal Ag Acherif, Président en exercice de la CMA et Fahad Ag Almahmoud, Président de la Plateforme, pour un mandat de six mois, tout en gardant son nom initial.
Consensus
À défaut d’obtenir un consensus pour une reconfiguration avec l’État, le CSP a tout de même permis un rapprochement entre la CMA et la Plateforme. Selon son actuel Président, les deux entités avaient beaucoup de différends, malgré la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation. « Les problèmes existaient jusqu’au 20 septembre 2017, où il y a eu des engagements sécuritaires. Depuis, il n’y a pas eu d’affrontements entre les deux entités. Avec l’insécurité qui gagnait du terrain au Nord, nous avons donc décidé de nous rapprocher pour lutter. C’est ce qui a donné naissance au Cadre d’échanges stratégique permanent, le 6 avril 2021 », explique-t-il. Pour l’instant, c’est à cette collaboration que se limite le CSP, même si, ses initiateurs l’assurent, le contact est en train d’être renoué avec le ministre de la Réconciliation.
Aly Asmane Ascofaré
Source : Journal du Mali