Des chercheurs maliens du Centre de recherche et de formation sur le paludisme (MRCT-Parasito) ont séquencé pour la première fois, deux virus SARS-COV-2 responsables de la COVID-19 au Mali et prévoient, l’élaboration d’une cartographie de tous les virus qui circulent dans le pays.
Imaginer un Mali capable de fabriquer ses propres vaccins contre le virus SARS-COV-2 responsable de la COVID-19 dans le pays. Et oui, cela pourrait être possible à partir de la connaissance parfaite du génome du virus.
Cette connaissance du virus, passe obligatoirement par le séquençage de son matériel génétique, car, explique professeur Abdoulaye Djimdé, Responsable du MRTC-Parasito (Malaria Research and Training Center), « c’est le matériel génétique du virus qui détermine toute sa vie et donne les informations sur son mode de transmission, son mode d’infection, et aussi montre comment le virus peut être détruit par les vaccins ou les médicaments. »
Le Mardi, 08 décembre 2020, une équipe de chercheurs dirigée par le professeur Abdoulaye Djimdé est parvenue à révéler la composition du génome du virus de la COVID 19 présent au Mali.
Pour rappel, « le séquençage du matériel génétique n’était pas encore possible au Mali. C’est la première fois que nous avons réussi à séquencer ce virus », confie Pr Djimdé au Journal Scientifique et Technique du Mali.
« Cette découverte s’inscrit dans la continuité de l’action de feu Professeur Ogobara Doumbo qui a toujours prôné des solutions locales pour nos problèmes locaux », indique docteur Antoine Dara, chef du laboratoire de génomique des pathogènes du MRTC-Parasito.
Deux virus séquencés, Bamako et Tombouctou
« Lorsque la pandémie est arrivée, nous avons adapté les outils que nous avions sur la recherche contre le parasite du paludisme dans le domaine de la COVID, et nous avons pu obtenir un séquenceur de dernière génération (MiSeq system) offert par l’Agence française de Développement », souligne le responsable du MRCT-Parasito, dont le centre est l’un des meilleurs centres de recherche sur le paludisme en Afrique.
Ce séquenceur “MiSeq system” indique Dr Dara, a facilité le séquençage des virus prélevés à Bamako et à Tombouctou. Les résultats des travaux montrent que les virus sont totalement différents l’un de l’autre et « qu’il y a des mutations que l’on retrouve dans ces virus au Mali par rapport aux virus observés ailleurs, en Chine, France, USA, etc. »
« Nous avons remarqué que le virus responsable de la COVID-19 à Bamako est différent de celui de Tombouctou », expose Dr Antoine Dara.
Avec le soutien du Centre de contrôle et de prévention des maladies en Afrique (Africa CDC), les chercheurs maliens ont pu représenter le génome des virus étudiés en une suite de vingt-neuf milles bases azotées.
Surveillance de la pandémie
Depuis quelques semaines, le Mali enregistre une résurgence de cas de Covid-19. 814 nouveaux cas positifs de Covid-19 et 24 décès enregistrés entre le 1er au 10 décembre. Cette augmentation de cas positifs, avec un pic de 155 cas en un jour, correspond à la 4e phase de la pandémie au Mali.
« Cette quatrième phase est beaucoup plus importante que les autres phases depuis l’entrée du virus sur le territoire malien », a précisé Pr Akory Ag Iknane, Coordinateur national de la lutte contre la pandémie.
En effet, « Si nous prenons le cas de la première vague, comparé à la seconde, c’est le séquençage qui va nous permettre de savoir si les virus ont subis des modifications ou mutations qui les rendent plus virulents ou plus transmissibles ou qui répondent moins aux traitements existants », explique Dr Dara au Journal Scientifique et Technique du Mali.
Ainsi, les résultats des chercheurs maliens serviront donc à développer de nouveaux outils mieux adaptés aux contextes et conditions du système de santé du Mali. Et aboutiront à «l’élaboration d’ une cartographie des virus qui circulent à travers le Mali», promet Pr Djimdé.
«Grâce à l’étude, nous pourrons savoir, si le virus que nous avons au Mali est suffisamment similaire au virus qui est dans le vaccin mis au point par les puissances occidentales, afin de prédire une certaine efficacité de ce vaccin chez nous », se réjouit Dr Antoine Dara.
Entre-temps, les cas positifs ne font que s’augmenter car les autorités maliennes en charge de la lutte contre la pandémie n’ont pas encore identifié les foyers pour savoir d’où viennent les transmissions.
Mardochée BOLI
Source: jstm