Le rapport indique que selon les situations d’exécution du budget, de 2017 à 2021, l’État a versé 196,095 milliards F CFA aux établissements privés d’enseignement secondaire général, technique et professionnel au titre de paiement des frais scolaires, demi-bourses et pensions alimentaires des élèves de l’État orientés dans les établissements privés.
Ce qui équivaut à environ 6,90 % du budget national de l’exercice 2021 s’élevant en dépenses à 2 841 579 700 000 F CFA et représente une moyenne annuelle de 49 milliards de F CFA sur la période de 2017 à 2021.
Au vu de l’importance des fonds publics alloués à ces établissements et suite à des dénonciations faites par plusieurs associations sur la gestion de ces fonds, l’Oclei a initié une mission afin d’avoir les éléments d’appréciation sur la gestion des ressources allouées par l’État aux établissements d’enseignements privés.
Précisément, il s’agissait d’analyser les subventions accordées par l’État aux établissements privés d’enseignement secondaire, général, technique et professionnel.
Plus spécifiquement, il s’agissait de déterminer les montants des subventions accordées ; déterminer si les sommes d’argent décaissées au titre des frais scolaires, demi-bourses et pensions alimentaires correspondent à la réalité du nombre d’élèves du secteur public orientés dans les établissements privés ; vérifier l’existence d’éventuels effectifs fictifs ; déterminer si le système actuel d’orientation des élèves dans les établissements d’enseignement privé favorise l’État ou, au contraire, s’il a avantage à prendre en charge la totalité des élèves du secteur public.
Selon le rapport, les subventions allouées par l’État aux établissements d’enseignement privé sont passées de 43 milliards de F CFA en 2017-2018 à 57 milliards de F CFA en 2020-2021, soit une augmentation de 133 %.
Sur la période de 2017-2018 à 2020-2021, le montant que l’État a versé en moyenne par an aux établissements secondaires privés (49,03 milliards de F CFA) équivaut aux coûts de construction et de fonctionnement de 80 lycées publics.
En d’autres termes, l’Etat peut construire et faire fonctionner, chaque année, un nouveau contingent de 80 lycées publics avec l’équivalent des subventions accordées aux écoles privées de l’enseignement secondaire.
Ainsi, précise le rapport, sur les 4 ans, les montants alloués au titre des subventions pouvaient construire 320 lycées publics. Ce nombre représente près de 3 fois le nombre actuel d’établissements publics d’enseignement secondaire général, technique et professionnel qui sont au nombre de 111.
Aussi, le rapport mentionne que les données financières sont incohérentes au sein du ministère de l’Éducation nationale. Car, il existe des disparités entre les données communiquées par les services techniques du ministère de l’Éducation nationale.
En effet, le montant total retracé par la DNESG est de 169 849 780 000 F CFA et celui communiqué par la CPS est de 169 806 985 000 F CFA.
Entre les données fournies par les deux services techniques, il existe un écart de 42 795 000 F CFA.
Les données de la DGB dépassent de 26,288 milliards de F CFA celles de la CPS du secteur de l’éducation.
Par ailleurs, il ressort du rapport que plus de 1000 écoles secondaires privées fonctionnent grâce à des arrêtés présumés faux. De nombreux établissements privés existent et ont reçu des élèves sans avoir au préalable les autorisations requises. Il y a 1077 écoles privées qui fonctionnent sur la base d’arrêtés d’autorisation de création et d’ouverture présentant de graves anomalies.
Les numéros et les dates d’arrêtés régulièrement enregistrés au secrétariat général du gouvernement (SGG) sont utilisés dans d’autres arrêtés sous la dénomination d’arrêtés d’autorisation de création d’établissement ou d’autorisation d’ouverture.
À titre illustratif, les références de l’arrêté n°2011-3196/Mlafu-SG du 5 août 2011 fixant la liste des titres fonciers situés dans l’emprise et les servitudes des travaux de construction de la route Kita-Sekokoto-Bafing-Falémé de la route régionale Kita-Saraya, sont reprises dans l’arrêté d’ouverture de deux établissements privés : le lycée privé Intelligentsia à Sotuba et le lycée technique Intelligentsia sis à Boulkassoumbougou dans la circonscription de l’Académie d’enseignement de Bamako Rive Gauche.
Le Rapport dévoile que plus de 15,565 milliards de F CFA ont été payés à des écoles ayant des arrêtés présumés faux.
L’évaluation de l’effectif reçu par les écoles des académies des rives gauche et droite de Bamako, de Kati, Nioro, San, Kita, Douentza, Mopti, Tombouctou, Gao, Ségou, Koutiala, Sikasso, Bougouni et Kayes, disposant d’arrêtés d’ouverture présumés faux, fait état de 105 234 élèves.
Les subventions indument perçues par ces établissements s’élèvent à 15 565 322 000 F CFA pendant les années scolaires 2017-2018, 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021.
Aussi, la mission a recensé 19 établissements qui ont un arrêté de création, mais pas d’arrêté d’ouverture. Ces établissements ont reçu 12 002 élèves de l’Etat et des subventions y afférentes pour un montant de 2 065 363 000 F CFA au titre des années scolaires 2017-2018, 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021.
La mission a également constaté l’existence d’établissements dont les promoteurs sont des fonctionnaires du ministère chargé de l’Éducation nationale. Ces établissements disposent d’arrêtés présumés faux.
En somme, il ressort du rapport définitif que dans la période 2017-2018 à 2020-2021, l’État a versé la somme de 196,095 milliards F CFA aux établissements secondaires privés de l’enseignement secondaire général, professionnel et technique au titre de paiement des frais scolaires, demi-bourses et pensions alimentaires des élèves de l’État orientés dans lesdits établissements, soit en moyenne 49,023 milliards F CFA par an.
Selon les spécialistes, avec ce montant, l’État peut construire, équiper et faire fonctionner chaque année un nouveau contingent de 80 lycées publics, toutes charges comprises, dont les dépenses de personnel.
Le rapport précise que les paiements retracés par la direction générale du budget dépassent de 26,288 milliards F CFA ceux indiqués par la Cellule de planification et de statistique (CPS) du secteur de l’éducation.
C’est pourquoi la mission estime que cette différence significative doit être expliquée par les services concernés.
‘’ L’Oclei n’a pas eu de données sur les paiements effectués de 2014-2015 à 2016-2017’’, précise le rapport.
PAR MODIBO KONE