La rareté des ressources naturelles, à la suite des sécheresses successives, a une grande part de responsabilité dans la crise sécuritaire que traverse le Mali. Pour résoudre les conflits dans le centre du Mali, il faut agir aussi sur les facteurs climatiques.
« […] L’augmentation de la durée et de la rigueur de la saison sèche entraîne une réduction toujours plus importante des zones de pâturage et contraint les éleveurs à migrer continuellement vers de nouvelles zones, causant des dégâts sur les espaces agricoles. » Ce passage d’une note d’analyse rédigée par Baba Dakono, chercheur à l’Institut d’études de sécurité (ISS), pour le Comité d’organisation du Dialogue national inclusif est assez révélateur. Le réchauffement climatique n’est pas un aspect à négliger dans la compréhension et la résolution de la crise sécuritaire au Mali.
Depuis 2015, celle-ci s’est étendue au centre du pays, notamment dans la région de Mopti. Elle reste en grande partie liée à l’exploitation des ressources naturelles qui deviennent de plus en plus rares due aux effets de la détérioration du climat. Cette raréfaction des ressources engendre une compétition autour des points d’eau, des espaces de pâturage, des fruits sauvages, etc.
« Oppositions communautaires »
La note d’analyse du Comité d’organisation du Dialogue national inclusif, publiée en novembre 2019, est à mon avis on ne peut plus clair sur cet aspect : « Les agriculteurs ont tendance à développer leurs activités dans les zones initialement consacrées à la divagation du bétail. Ensuite, les tensions entre éleveurs et agriculteurs se multiplient et tendent à se transformer, au fil du temps, en oppositions communautaires. » Cette problématique constitue une réalité dans plusieurs zones agricoles du Mali depuis quelques années.
Alice Baillat, chercheuse à l’IRIS, dans une interview publiée le 3 mai 2017 sur la page de son centre de recherche indiquait : « Le changement climatique est un multiplicateur de menaces, au sens où il agit de manière indirecte sur les facteurs d’instabilité et de violence. »
Cette corrélation entre le réchauffement climatique et les conflits n’est pas ignorée par les autorités maliennes. Le chargé de communication du ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable du Mali, M. Lamine, m’a expliqué que les aléas et le changement climatique ont une part remarquable dans l’aggravation de la crise malienne. « La rareté des ressources naturelles, la pauvreté alimentent les conflits », souligne-t-il.
Corrélation
Les facteurs climatiques se répercutant sur les ressources naturelles, les populations sont confrontées à la pauvreté. Une situation qui pousse beaucoup d’entre elles à s’allier aux groupes terroristes. C’est d’ailleurs cette difficulté dans la résolution du conflit malien qu’a soulignée l’ex-Premier ministre du Mali, Soumeylou Boubeye Maiga, au cours d’une intervention sur la chaîne Africable, le 3 décembre dernier.
Dans la vision du ministre de l’Environnement du Mali, Housseyni Amion Guindo, il convient de lutter contre la pauvreté afin de réussir la lutte contre le terrorisme. Cette lutte est une condition sine qua non pour empêcher les populations de se jeter dans les mains des terroristes. Or, cette bataille contre la pauvreté doit, au préalable, passer par la lutte contre le réchauffement climatique. La corrélation est bien tissée.
Source : BENBERE