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Contribution: Tous au chevet de l’école malienne malade pour la sauver d’une mort certaine

L’école malienne a connu une chute vertigineuse ces trois dernières décennies et a atteint un degré de décrépitude inquiétant qui nous fait douter de l’avenir de notre nation. Les maux sont connus et les raisons du marasme bien identifiées, il faut un diagnostic sans complaisance et rapidement appliquer les remèdes adéquats pour que notre pays reprenne la tête de peloton dans le domaine de l’enseignement dans la sous-région ouest-africaine, place qu’elle n’aurait jamais dû quitter. Il est donc temps de s’interroger sur la situation chaotique et désastreuse dans laquelle vit notre école où les apprenants s’occupent passionnément de tout sauf de l’acquisition du savoir. De ces maux qui minent l’école, chacun de nous porte une part de responsabilité à des degrés divers.

Les parents ont abdiqué toute autorité devant leurs enfants. Ils ont lamentablement failli à leur devoir de surveillance et d’éducation de leurs progénitures, une responsabilité qui leur incombe au premier chef. Les contentieux entre l’État et les syndicats d’enseignants conduisent à des grèves et crises interminables qui affectent négativement la qualité de l’enseignement.

L’incapacité du gouvernement à remédier aux crises récurrentes qui secouent l’école est un manquement à une obligation constitutionnelle, celle relative au droit à l’éducation et à la formation. Les débrayages intempestifs pour les raisons les plus dérisoires et très souvent fallacieuses de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) pour laquelle tous les prétextes sont bons pour empêcher, s’il le faut, par la violence toute activité académique des jours durant. La présence d’objets contondants et d’armes à feu sur le campus universitaire, les scènes de bagarre d’une rare violence entre étudiants, entraînant souvent la mort, sont devenues des pratiques si courantes qu’elles ne nous émeuvent plus.

Le silence assourdissant des gouvernants devant un tel drame est tout simplement inacceptable et assimilable à un désintérêt profond vis-à-vis de la question scolaire et universitaire. Depuis plus d’un an, le débat public est essentiellement centré sur la durée du gouvernement de Transition et les futures échéances électorales. On parle peu ou presque pas des graves crises dont souffre terriblement le secteur de l’éducation et de la formation qui, à moyen terme, conduiront à un « génocide intellectuel ».

Voilà le visage hideux de l’école malienne qui semble ne plus être une réelle priorité politique urgente, une préoccupation majeure pour les pouvoirs publics et la société civile. J’éprouve un sentiment de profonde amertume et d’indignation à chaque fois que j’en parle. Il est de notre responsabilité à tous de redonner à notre école ses lettres de noblesse et de lui restituer sa pureté originelle, c’est-à-dire donner à l’enfant malien sa chance à l’épanouissement ; un impératif majeur au développement et à la survie de toute nation. Cette citation positive et inspirante de Nelson Mandela «l’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde» exprime mieux l’importance de l’école.

Il est communément admis que sans une bonne éducation, sans les ressources humaines nationales de qualité, le développement est un rêve impossible. Hélas, trois fois hélas, nous sommes loin des années glorieuses de l’école malienne.

C’est un euphémisme ou même de la lapalissade d’affirmer que nos diplômés ne sont plus compétitifs sur le marché du travail, un truisme que de dire que notre système éducatif est défaillant. Sans vouloir jouer les Cassandre, l’école malienne est très malade et a besoin d’une thérapie de choc pour la sauver d’une mort certaine. Dieu nous en préserve.

S’est-elle donc éteinte, cette noble et belle race d’enseignants-éducateurs exemplaires à tout point de vue, dévoués et moralement irréprochables? Les Assises nationales sur la refondation de l’État offrent donc aisément l’impérieuse nécessité de la refondation de notre système éducatif défaillant. Un cadre idéal au débat, à l’échange, à la réflexion sur les valeurs, enjeux et perspectives de l’école de notre rêve dans le « Mali Koura ».

Ces Assises ne manqueront certainement pas de répondre de façon précise et satisfaisante à d’éventuelles questions telles : Comment et pourquoi refonder l’école malienne ? Comment améliorer la qualité de l’enseignement et la formation du personnel enseignant ? Comment bannir définitivement la violence de l’école ? Quelle stratégie pour l’intégration des langues nationales dans le système éducatif ? Voilà autant de questions et bien d’autres encore non moins pertinentes qui seront soulevées auxquelles les Assises se doivent de répondre.

De par sa mission d’éducation et de formation qui lui a été confiée par l’État du Mali, l’école s’occupe de ce qu’une nation a de plus précieux : sa jeunesse. En synergie avec la famille, l’école donne le sens des valeurs cardinales à l’enfant telles le courage, la dignité, le goût de l’effort personnel et du travail bien fait, l’honnêteté, la justice, l’humilité, l’amour de la patrie et développe en lui le sens social.

Ces valeurs morales et sociales défendues inlassablement par nos ancêtres sur lesquelles repose toute gouvernance vertueuse ont perdu, au fil des années, la charge émotionnelle qu’elles portaient. Elles sont continuellement foulées aux pieds et considérées de nos jours comme des délits, tout au moins des défauts.

La refondation se fait absolument avec l’école ou ne se fera pas, une vérité apodictique. Au-delà de l’école, c’est l’Homme malien à la dérive qui est à refonder. C’est la société malienne où la morale est dépréciée et la ruse magnifiée qui est à refonder. Mobilisons-nous pour sauver notre école, seule alternative pour sauver la nation malienne.


Macki Samaké
Professeur (retraité)
Ancien recteur d’Université.

Source : L’ESSOR
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