CHALLENGE. Contrairement au leader de l’UPADS, principale formation d’opposition, Guy-Brice Parfait Kolélas et Albert Oniangué vont participer au scrutin du 21 mars.
e boycott ne convainc pas tous les acteurs politiques du Congo. Si Pascal Tsaty Mabiala, premier secrétaire de l’Union panafricaine pour la démocratie sociale (UPADS), première formation d’opposition à l’Assemblée nationale congolaise, a décidé de ne pas prendre part au scrutin du 21 mars, il n’en est pas de même de Guy-Brice Parfait Kolélas, leader de l’Union des démocrates humanistes (UDH-Yuki), qui a demandé à ses militants de s’inscrire massivement sur les listes électorales dont l’opération de révision va être officiellement clôturée le 16 février prochain. Il est rejoint sur la ligne de départ de la prochaine présidentielle par le candidat indépendant Albert Oniangué, pasteur et ex-colonel de l’armée congolaise, qui se veut porteur d’un message de restauration de justice et d’équité.
Guy-Brice Parfait Kolélas engage un deuxième round
À 60 ans, Guy-Brice Parfait Kolélas remet le couvert et aspire pour la seconde fois à la magistrature suprême. En 2016, il était arrivé deuxième du scrutin avec 15 % des voix, derrière le président Denis Sassou N’Guesso réélu au premier tour. Un résultat que son soutien Frédéric Bintsamo alias pasteur Ntumi n’a pas hésité à contester par les armes en lançant une rébellion dans la région du Pool, dix-sept ans après la guerre du même nom. Un accord de cessez-le-feu a finalement mis fin aux troubles engendrés le 23 décembre 2017. Il s’est accompagné d’un programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) sous le contrôle des Nations unies.
Bien connu des Congolais, Guy-Brice Parfait Kolélas est le fils de Bernard Kolélas qui était Premier ministre en 1997 au moment de la guerre civile qui a déchiré le pays. Il a par ailleurs été de 2007 à 2009 ministre de la Pêche puis ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l’État. Cela dit, auparavant, il avait déjà eu son pied dans la politique très jeune alors qu’il vivait en France. En effet, de 1983 à 1993, il a été membre du Parti communiste français (PCF) avant de faire volte-face quelques années plus tard et de se rapprocher du Front national devenu depuis Rassemblement national (RN). Il assume d’ailleurs son amitié avec l’ex-secrétaire général puis vice-président de ce parti, Louis Aliot. Celui-ci, en 2015, s’était publiquement insurgé contre le référendum sur la modification de la Constitution congolaise.
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Ce lundi, au siège de son parti, l’Union des démocrates humanistes (UDH-Yuki), Guy-Brice Parfait Kolélas a déclaré vouloir « libérer certaines libertés fondamentales ». « Je veux redonner espoir au peuple congolais parce qu’aujourd’hui la jeunesse congolaise vacille sur ses bases », a-t-il affirmé, se présentant comme « le candidat du changement ». Et de dévoiler les contours de son « Plan Parfait pour le redressement du Congo » centré sur « le développement des provinces avec la mise en place d’ entités viables pour la bonne marche du Congo ». « Je me bats pour que les mamans qui vendent dans les marchés aient la retraite et surtout résoudre l’épineux problème des retraités qui cumulent de nombreux mois sans pension », a-t-il assuré appelant à « arrêter la violence » et précisant que « le combat est un combat d’idées ».
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Albert Oniangué va connaître son baptême du feu politique
Dans cette bataille pour ravir à Denis Sassou-Nguesso son fauteuil, Guy-Brice Parfait Kolélas devra compter avec un adversaire tout nouveau dans l’arène politique parce que jamais affilié à aucune écurie. Son nom : Albert Oniangué, 66 ans, dont la candidature a été officiellement déclarée le 1er février.
C’est une vraie première pour cet ancien colonel de l’armée congolaise, formé à l’école militaire préparatoire Général Leclerc à Brazzaville. Se définissant comme « un citoyen ordinaire », Albert Oniangué a pourtant bien pu observer les arcanes du pouvoir pour avoir été aide de camp de l’ancien président aujourd’hui décédé Joachim Yhombi Opango mais aussi de Denis Sassou Nguesso de 1979 à 1992. Avec l’actuel chef de l’État, il assure ne pas avoir « de rapport conflictuel ». « Il a son projet, j’ai le mien », soutient-il, ajoutant : « Je ne me bats contre personne. Il faut cesser les oppositions stériles. Cette élection n’est pas à propos d’une compétition entre personnes, mais à propos d’un naufrage. Je porte un message de transformation d’habitude, de comportement, de chaque Congolais et Congolaise ».
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Albert Oniangué, en bon ex-enfant de troupe de Brazzaville, a choisi comme devise de « s’élever par l’effort ». « Mon éducation militaire a forgé ma personnalité », confie-t-il avant de poursuivre que l’armée (lui) a inculqué la discipline, la rigueur et la passion pour (sa) patrie. Colonel à la retraite, Albert Oniangué s’est engagé sur une voie spirituelle en devenant pasteur en 2000. Une voie qui n’est pas sans rappeler le premier président du Congo indépendant, l’abbé Fulbert Youlou. Selon lui, cette reconversion lui a permis de « parcourir le pays », d’avoir un regard neuf sur le Congo et de constater le « naufrage collectif » dans lequel le pays s’enfonce, et dont « les élites se rendent complices ». Albert Oniangué fait aujourd’hui un amer constat : « Pas un seul Congolais ne vous dira que la situation est positive dans le pays. La population souffre. De la plus petite famille au sommet de l’État, le vice est devenu vertu. » Avec le Mouvement des engagés aux exigences de la nouvelle alliance (MEENA) qu’il a fondé, Albert Oniangué propose une « révolution morale » fondée sur la justice sociale. Son objectif : « En finir avec les pratiques anciennes » et « restaurer la droiture » pour un réel « changement politique ».
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Un sacré challenge dans un contexte sur lequel les évêques du Congo tiennent des propos pas des plus rassurants. « À cause d’un fichier électoral non maîtrisé avec entre autres des personnes décédées, et d’institutions chargées des élections dont l’indépendance est encore à démontrer, il y a fort à craindre que les résultats de ces élections soient de nouveau contestés. »
Source: lepoint