L’objectif de la conférence-débat était de passer en revue les acquis et les réalisations de la IIe République sous le régime du général d’armée Moussa Traoré. La conférence-débat était couplée au lancement officiel de l’APJD-Mali. La cérémonie était parrainée par l’ancien ministre Bandiougou Gakou.
“Notre mission n’est pas de défendre qui que ce soit ou un quelconque régime. Mais il s’agit de relever les pans importants qui pourront servir la génération actuelle et future. Ce digne objectif est partagé par les auteurs du livre «Le Mali sous Moussa Traoré» depuis les origines de sa rédaction. Dans les préambules du livre, il est écrit que cette entreprise relève d’une volonté commune de témoigner sous l’impulsion d’un droit de mémoire, d’inventaire et de vérité. Les auteurs de la présente réflexion se proposent d’éclairer les jeunes générations actuelles et futures et de fournir aux historiens-chercheurs des éléments à leur investigation. La présentation de ce livre de référence est couplée au lancement officiel de l’APJD-Mali créée en 2023 et qui a pour devise : ‘dibi ka kèlè, yelen ka bange’ (que la lumière soit)”, a indiqué Oumar Koné.
Le parrain de la cérémonie, Bandiougou Gakou, a rappelé quelques réalisations principales du président Moussa Traoré. “Pour l’être humain, la chose la plus importante est sa liberté. Et c’est dans la bataille pour la liberté que Moussa Traoré était caractérisé dès le début de sa mission. Au Mali, pendant plus de 60 ans nous étions sous le joug de la colonisation dans laquelle les Maliens étaient considérés comme des sujets soumis à des travaux forcés sous la férule de l’administrateur colonial. Après la fin de la colonisation, la même pratique a continué sous un autre nom appelé les investissements humains. Ce qui consistait à faire travailler les citoyens sans salaire. J’en sais quelque chose. A l’époque j’étais au lycée Terrasson de Fougères. Les dimanches, nous étions ramassés pour aller servir de porteurs d’eau dans la construction de la Maison du peuple. Pour nous élèves, cela peut se comprendre. Mais pour les travailleurs qui recherchent le pain quotidien, pour les manœuvres qui étaient obligés d’aller tous les jours travailler pour revenir avec ce qu’il faut pour sa famille, ceux-ci retournaient les mains vides. Et le lendemain, ils reviendraient de gré ou de force. C’est le travail de Moussa Traoré qui a permis aux Maliens de jouir de cette conquête importante de liberté. Cette conquête de liberté n’est pas due au bureau du CMLN, de l’UDPM ou du général Moussa Traoré mais tout simplement au lieutenant Moussa Traoré qui venait de prendre le pouvoir. Les Maliens étaient emprisonnés avec leurs productions céréalières. Et ils ne pouvaient pas en faire ce qu’ils voulaient. Le président Moussa Traoré a libéré la circulation des céréales dans le pays, dans tous les sens. Et aucun gouvernement après lui n’a pensé à remettre en cause cette pratique. Le président Moussa Traoré a également favorisé l’éclosion des initiatives privées. Il a libéré l’entreprenariat. Cela était impossible auparavant. Parce que nous étions dans un régime socialiste dans laquelle il y a collectivisation des moyens de production.
Seul l’Etat peut créer des unités destinées à la production des biens et services. Les efforts du président Moussa Traoré en matière de cohésion sociale ont consisté surtout à rétablir l’inclusivité. Au début de l’indépendance, le Mali a commencé avec un plan quinquennal qui est allé de 1961 à 1965 mais qui a été perturbé avec la création du franc malien en 1962 en parité avec le F CFA. Mais au bout de 2 à 3 ans la dépréciation a été accélérée. Pour avoir 1000 F CFA, il fallait 2000 francs maliens.
Au Mali, on pensait que tout le monde travaillait. Mais en réalité, il y avait un chômage excessif dans les unités de production. Une unité qui devait tourner avec 40 personnes, on y trouvait le double ou le triple. Tout ce supplément était des chômeurs qui ont été placés pour camoufler le chômage”, a dit Bandiougou Gakou.
Après les conférenciers ont édifié les participants sur la vision du président Moussa Traoré. “Quand nos pères ont proclamé l’indépendance de la République du Mali, il faut le reconnaître, ils nous ont mis à l’œuvre. Tout le Mali était devenu un chantier. Il n’y a pas eu un domaine où la main n’est passée et repassée. Pendant deux ans, nous nous sommes levés pour construire le pays. Mais il y a eu des difficultés. Petit à petit, l’engouement du départ s’est estompé. Et cela a conduit aux événements du 19 novembre 1968. Pendant longtemps dans les villages, notamment après 1991, quand on parlait du Président Moussa Traoré, le sage bamanan disait que c’est le président Moussa Traoré qui a mis fin à la corvée de la recherche des céréales. Parce qu’avant Moussa Traoré, chaque fin de mois, les populations devaient faire la queue devant la coopérative de consommation avec leurs sacs et le carnet de famille. Une personne recevait 3 kilo de mil et 3 kilo de riz. Le commerce privé était interdit. L’Union soudanaise est tombée. Le Comité militaire de libération nationale (CMLN) s’est installé. Mais, le président Moussa Traoré n’avait pas 40 ans, il voyait déjà loin. Il a su ce que ceux qui sont venus après lui n’ont pas su. On n’édifie pas sur la table rase”, a témoigné Pr. Issiaka Amadou Singaré (co-auteur du livre).
Pour Pr. Oumar Kanouté (co-auteur du livre), la falsification de l’histoire, c’est soutenir que le régime de l’UDPM n’a fait que du mal. “Ceux qui le disent que c’est sous le régime de Moussa Traoré que furent liquidées toutes les sociétés et entreprises d’Etat, c’est plus que fou. La non falsification de l’histoire veut que l’on dise que toutes les sociétés et entreprises d’Etat n’ont pas été créées sous la Première République et que beaucoup d’autres ont vu le jour sous Moussa Traoré. Deuxièmement, la liquidation des sociétés et entreprises d’Etat venait des accords de 1967. C’est dans ces accords il était prévu la suppression des sociétés et des entreprises d’Etat. Et le président Modibo Kéita l’a annoncé devant le Parlement en disant que les sociétés d’Etat qui n’étaient pas rentables vont être supprimées”, a-t-il déclaré.
Selon El hadj Seydou Idrissa Traoré, ancien ministre du Développement agricole, celui qui a faim n’a point d’oreilles ni d’yeux. “Trois kilos de mil et trois kilos de riz ne pouvaient nourrir les familles. Des vieux avaient averti le président Modibo Kéita de revoir la politique de distribution des céréales. Car les populations étaient affamées. Ce sont les fonctionnaires, à la place des paysans, qui fixaient les prix des denrées. Au mois d’août, période de soudure, les paysans rachetaient ces mêmes céréales qu’ils avaient produites au double du prix qu’ils les avaient vendues à l’Etat. Ce sont toutes ces difficultés qui ont engendré le coup d’Etat de 1968. Après ce coup, les populations, durant 6 mois, ont salué et fait des bénédictions à Moussa Traoré. Ce qui fait que sa chute n’a pas été saluée par les paysans. Parce que sous son régime, Moussa Traoré a travaillé pour les paysans. C’est Moussa Traoré qui a créé la Chambre d’agriculture pour que la voix des paysans soit entendue. Les associations villageoises faisaient elles-mêmes la commercialisation de leurs productions avec l’accompagnement de la direction de la coopération. Sous le régime de Moussa Traoré, il y avait du sérieux”, a-t-il souligné.
Siaka Doumbia