Le général Doucouré a distribué bons et mauvais points sur la manière dont notre armée a été gérée depuis 1961
A l’occasion des festivités marquant l’anniversaire de la création de notre armée, l’Alliance pour la démocratie au Mali a organisé samedi dernier une conférence-débat qui avait pour thème « Quel type d’armée pour le Mali ? ». La rencontre s’est déroulée à la Pyramide du souvenir en présence du président de la Transition Dioncounda Traoré, du représentant spécial de la CEDEAO au Mali Checca Abdou Touré, de nombreux généraux de l’armée et de plusieurs figures du Mouvement démocratique.
Dans son mot de bienvenue, la présidente de l’association Adema, Mme Sy Kadiatou Sow, a exprimé, au nom de tous, une pensée émue pour nos frères tombés sur le théâtre des opérations au Nord du pays. Les mêmes pensées sont allées à nos frères africains, européens et à tous les civils victimes des conflits armés. Une minute de silence a été observée en leur mémoire. La présidente a souhaité que la nouvelle année soit celle de la reprise de la situation en mains par nos forces armées et de sécurité.
A sa suite, l’ancien président de l’Assemblée nationale Ali Nouhoum Diallo a rappelé que l’association Adema, qui est la matrice dont sont issus les partis Adema-PASJ, Miria, RPM, URD et APR, avait programmé sous Moussa Traoré une conférence-débat dont le thème s’intitulait : « Alliance pour la démocratie et les forces armées et de sécurité : même combat ». La conférence avait été été interdite. Ce rappel montre combien les choses ont changé depuis.
A l’époque, l’Alliance qui était informée de la mauvaise gouvernance des forces armées voulait faire organiser une journée « portes ouvertes » dans les casernes. Le général Sékou Ly s’y était farouchement opposé. L’orateur a rappelé qu’avec les événements de Mars 1991, les forces armées ont fait irruption dans l’arène politique.
C’est au général Mamadou Amadou Doucouré qu’est revenue la responsabilité de traiter l’essentiel du thème de la rencontre en faisant l’état des lieux de l’armée et en exposant sa stratégie de sortie de crise. Pour y parvenir, il a évoqué les différents régimes politiques qui ont géré notre pays. L’armée malienne, rappellera-t-il, est née le 20 janvier 1961 dans des conditions très difficiles. L’évacuation des bases par l’armée française s’était faite au grand dépit des anciens colonisateurs qui ont tout saccagé en partant.
Les Soudanais, qui servaient dans l’armée coloniale, ont demandé à être libérés pour se mettre à la disposition de la nouvelle armée malienne. Deux ans après la proclamation de l’Indépendance, une rébellion a éclaté au nord du pays. Elle aurait été encouragée par certains milieux de l’ancienne puissance coloniale qui n’avaient aucune sympathie pour le régime politique au pouvoir à Bamako. L’armée malienne a réussi à circonscrire la rébellion armée.
Sous la Ière République, le militaire était perçu comme l’allié du civil. Le coup d’Etat intervenu en novembre 1968 allait changer les choses. Petit à petit, l’armée commença à se politiser et à se désarticuler fortement par la faute de jeunes officiers propulsés à la tête de l’Etat. Cependant et d’un autre côté, grâce aux relation très étroites entretenues avec l’Union soviétique, l’armée malienne s’était dotée d’équipements sophistiqués. L’orateur ne s’est pas trop étendu sur la IIème République et la Transition de 1991-1992. Par contre, il a sévèrement évalué l’action de la IIIème République sous laquelle l’armée sera délaissée. L’indiscipline se généralisera dans les casernes, les cadres subalternes rejetaient l’autorité de la hiérarchie et l’installation des coordinations de sous-officiers et d’hommes de rang a complètement perturbé le fonctionnement de la Grande muette. Le régime de Amadou Toumani Touré a hérité en 2002 de cette situation confuse.
Le conférencier n’a pas caché qu’il en voulait toujours au président renversé pour avoir laissé entrer dans notre pays des individus lourdement armés qui, par la suite, ont créé des caches d’armes partout et ont déclenché les hostilités contre l’Etat. Mamadou A. Doucouré a estimé que le premier principe à faire respecter dans l’armée est de doter celle-ci d’un système de recrutement impartial. Il a insisté sur le fait que l’autorité politique ne doit pas s’immiscer dans la gestion au quotidien de l’armée.
S. DOUMBIA