Non-paiement des frais d’édilité pour un montant total de 432 702 000 FCFA ; en passant par le non-paiement des frais de transfert pour un montant total de 6 750 000 FCFA et le non-reversement des recettes de la taxe municipale pour un montant total de 29 393 600 FCFA. Auxquels s’ajoutent, le non-paiement des droits de patente sur des marchés pour un montant total de 1 016 807 FCFA et les faux enregistrements de marchés publics pour un montant total de 8 798 434 FCFA…
Autant de pratiques mafieuses décelées par le Vérificateur général dans la gestion de la Commune Rurale de Moribabougou (CRM) pendant les exercices 2020, 2021, 2022 et 2023 et qui sont à l’origine de l’évaporation de 478 millions de francs CFA (478 660 841 F), sans laisser la moindre trace. Du coup, le Maire Diarha Diarra et sa bande risquent gros. Et même très gros. Leurs complices aussi. Accablant !
La Mairie de la Commune Rurale de Moribabougou, n’a pas fait l’objet d’une Offre Publique d’Achat (OPA) en vue de sa privatisation. Du moins, pas à notre connaissance. Mais tout porte à croire qu’elle a été au service exclusif du Maire Diarha Diarra et sa bande pendant les périodes 2020, 2021, 2022 et 2023. Par petite touche, ils ont sucé les caisses, érigé le népotisme en mode. L’espoir tant suscités auprès des populations de la Commune de Moribaboiugou a viré au cauchemar.
Manœuvres dolosives à tous les niveaux
L’installation du Maire Diarha Diarra, à la tête de la Mairie de Moribabougou a exorcisé la mauvaise gestion des fonds et bien d’autres phénomènes jugés diffus. En effet, le Bureau du vérificateur a décelé que le Représentant de l’Etat, (M. Issa Diallo, Secrétaire général de la Mairie) dans le Cercle de Kati ne procède pas régulièrement à l’inspection de la CRM. Le Maire et le Receveur-percepteur de Kalabancoro n’effectuent pas de contrôle sur les régies d’avances et de recettes. La Mairie de Moribabougou ne tient pas régulièrement des registres d’actes d’état civil. Elle ne dispose pas de registre pour la transcription des jugements supplétifs d’actes de mariage. Non plus, elle n’a pas pris de décision pour la nomination des agents de déclaration de l’état civil et elle a irrégulièrement nommé un Comptable-matières. Plus grave, la Mairie, ne tient pas tous les documents de la comptabilité-matières et favorise l’empiétement sur des compétences dévolues au Chef du Bureau Spécialisé des Domaines et du Cadastre. Enfin, elle ne respecte pas les modalités de gestion des fonds destinés à l’alimentation des cantines scolaires. En bloc, la gestion de la Mairie de Moribabougou, pendant les exercices 2020, 2021, 2022 et 2023 est comparable à celle d’une épicerie.
A en croire le rapport d’enquête du Vérificateur général, le Maire de la Commune Rurale de Moribabougou, Diarha Diarra, a délivré des Concession rurales à usage d’habitation (CRH) dont les bénéficiaires n’ont pas payé les frais d’édilité. Ce qui a poussé la mission de vérification a fouillé dans l’arrière-cour de la Maire. La suite est connue : les enquêteurs ont examiné les registres d’enregistrement des CRH, les cartons des CRH et les quittances relatives au paiement des frais d’édilité. Aussi, ils se sont entretenus avec le Maire Diarha Diarra et ses Adjoints ainsi que l’agent chargé de la documentation et des archives. Avant de procéder à l’inventaire des stocks de CRH.
A l’issue des travaux, l’équipe de vérification a décelé que le Maire Diarha Diarra, a délivré des CRH pour lesquelles les frais d’édilité n’ont pas été payés. En effet, il a, au cours de la période sous revue, attribué 16 740 CRH dont 5 366 bénéficiaires n’ont pas payé les frais d’édilité. Le montant total des frais d’édilité non payés s’élève à plus de 434 millions de nos francs (434 646 000 FCFA). Toutefois, suite à la transmission du rapport provisoire à la Mairie de Moribabougou, 24 bénéficiaires des CRH ont payé les frais d’édilité pour un montant total de 1 944 000 FCFA. Ainsi, le montant de l’irrégularité est de 432 702 000 FCFA.
Plus grave, le Maire Diarha Diarra a ordonné le transfert de permis pour lesquels les frais n’ont pas été payés. Afin de s’assurer du respect des dispositions, l’équipe de vérification a examiné les registres des transferts de permis. Elle a également rapproché le montant des transferts résultant des registres à celui figurant sur les quittances. Elle s’est en outre entretenue avec le Maire, le Régisseur de recettes, Hamidou Koné et les agents chargés des transferts. L’équipe de vérification a constaté que le Maire Diarha Diarra a ordonné le transfert de permis d’occuper pour lesquels les frais n’ont pas été payés. En effet, 197 permis de 2021 ont fait l’objet de transfert dans les registres au prix unitaire de 125 000 FCFA, soit un montant de 24 625 000 FCFA. Le montant total calculé à partir des quittances est de 17 875 000 FCFA, d’où un écart de 6 750 000 FCFA. Et ce n’est pas tout. Loin s’en faut. Même le Maire Diarra n’a pas ordonné (encore) la prise en charge des cotisations sociales relatives à la part patronale au titre de l’AMO (Assurance Maladie Obligatoire).
Pour se rendre à l’évidence des faits, l’équipe de vérification a examiné les pièces justificatives des cotisations sociales et s’est également entretenue avec le Receveur-percepteur de Kalabancoro et les responsables de la Commune Rurale de Moribabougou. Elle a aussi circularisé la Caisse Malienne de Sécurité Sociale (CMSS) et l’Institut National de Prévoyance Sociale (INPS) de Koulikoro. Du coup, l’équipe de vérification a constaté que le Maire Diarha Diarra n’a pas ordonné la prise en charge des cotisations sociales relatives à la part patronale au titre de l’AMO des fonctionnaires des Collectivités de la Commune Rurale de Moribabougou. En effet, il n’établit pas de mandat et ne fait pas de déclaration pour le paiement de la part patronale des cotisations sociales au titre de l’AMO des fonctionnaires des Collectivités de la CRM. Il en découle que le paiement de cette charge sociale n’était pas effectif à la Direction régionale de la Caisse Malienne de Sécurité Sociale de Koulikoro. Le montant total des cotisations sociales non payées du personnel fonctionnaire au titre de l’AMO s’élève à 6 598 993 FCFA. Toutefois, suite à la remise du rapport provisoire, la CRM a établi le mandat n°306 d’un montant de 6 598 993 FCFA à la date du 9 juillet 2024 pour le paiement de la part patronale de l’AMO des fonctionnaires de la Collectivité.
Entre magouilles et embrouilles
L’enquête financière réalisée par le vérificateur sur la gestion de la Mairie de Moribabougou, exhale une odeur de scandale et aurait eu des conséquences pour le développement communautaire de la localité. Cet audit sur les exercices 2020, 2021, 2022 et 2023, énumère pêle-mêle, les dysfonctionnements et les malversations dans la gestion des fonds dédiés à la commune rurale de Moribabougou.
Entre dépassements de budget, évasion des fonds et prestataires douteux, entre autres, tout y a passé ; au point qu’il y a plusieurs millions de nos francs qui se sont évaporés des caisses de la Mairie, sans laisser la moindre trace.
Pour ce qui est de la période sous revue, l’agent de recouvrement n’a pas reversé au Régisseur de recettes la totalité de la taxe municipale collectée. Pour s’assurer du respect des dispositions, l’équipe de vérification a examiné le registre de collecte des taxes municipales tenu par l’agent de recouvrement faisant office de caissière. Elle a également rapproché les montants figurant dans le registre à ceux des carnets de quittances. Elle s’est en outre entretenue avec le Chef du service recouvrement, Yacouba Diakité et ses agents et le Régisseur de recettes, Hamidou Koné. La mission de vérification a constaté que l’agent de recouvrement n’a pas reversé la totalité de la taxe municipale à la régie de recettes. En effet, le total des montants collectés selon les registres de collecte de ladite taxe des exercices 2020 à 2023 est de 41 897 600 FCFA et celui des quittances est de 12 504 000 FCFA, soit un écart non reversé de 29 393 600 FCFA.
Pendant ce temps, le Chef du Centre des Impôts de la Commune II du District de Bamako n’a pas recouvré les droits de patente sur des marchés publics. Pour s’assurer du respect des dispositions, l’équipe de vérification a effectué une séance de travail avec le Chef de Centre des impôts de la Commune II du District de Bamako. Elle lui a demandé de lui fournir la situation des patentes recouvrées sur la base d’un certain nombre de marchés entièrement payés par la Mairie de la commune de Moribabougou dont les droits d’enregistrement avaient été payés. Elle s’est également entretenue avec le Régisseur de recettes et de dépenses.
La suite est connue : l’équipe de vérification a constaté que le Chef du Centre des impôts de la Commune II du District de Bamako n’a pas recouvré les droits de patente sur des marchés publics. En effet, il n’a pas recouvré les droits simples ainsi que les pénalités y afférentes. Il s’agit du Marché n°0067/DRMP-DSP- 2022 Koulikoro relatif aux Travaux de Construction et de Rénovation de la clôture du Groupe Scolaire Ancien Village au compte de la Commune Rurale de Moribabougou, Cercle de Kati d’un montant de 19 197 310 FCFA TTC et du Marché n°0068/DRMP-DSP2022 Koulikoro relatif aux Achats de tables-bancs et de Mobilier de bureau au profit de la Commune Rurale de Moribabougou, Cercle de Kati d’un montant de 20 millions FCFA TTC. Le montant total des droits et amendes non recouvrés s’élève à 2 076 129 FCFA. Toutefois, suite à la remise de l’extrait du rapport provisoire au Centre des Impôts de la Commune II, l’entreprise a payé un montant de 1 059 322 FCFA correspondant au montant de droits simples et de pénalité pour le marché n°0068/DRMP-DSP62022 Koulikoro. Le montant restant à payer des droits et pénalités non recouvrés s’élève à 1 016 807 FCFA.
Par ailleurs, des titulaires de marchés publics ont procédé à de faux enregistrements. Des titulaires de marchés publics ont procédé à de faux enregistrements. En effet, il est ressorti de l’entretien et de la revue documentaire que les cachets d’enregistrement et les signatures figurant sur sept (7) marchés publics sont faux. Le montant cumulé des droits d’enregistrement compromis et des pénalités y afférentes s’élève à 9 625 214 FCFA dont 4 812 607 FCFA de pénalités. Toutefois, suite à la remise de l’extrait du rapport provisoire au Centre des Impôts de la Commune II, un montant de 826 780 FCFA a été payé correspondant au montant des droits d’enregistrement et pénalités d’un des sept marchés en cause. Le montant restant à payer des droits d’enregistrement et pénalités non payés revient à 8 798 434 FCFA.
Autant d’irrégularités financières dans la gestion de la Commune Rurale de Moribabougou et qui ont occasionné l’évaporation de plus de 478 millions de nos francs (478 660 841 FCFA).
D’où une dénonciation de faits du vérificateur général, au Procureur du Pôle National Economique et Financier et au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême ; relativement : au non-paiement des frais d’édilité pour un montant total de 432 702 000 FCFA ; au non-paiement des frais de transfert pour un montant total de 6 750 000 FCFA ; au non-reversement des recettes de la taxe municipale pour un montant total de 29 393 600 FCFA ; au non-paiement des droits de patente sur des marchés pour un montant total de 1 016 807 FCFA et aux faux enregistrements de marchés publics pour un montant total de 8 798 434 FCFA. D’où la situation inconfortable du Maire Diarha Diarra et son réseau.
Arouna Traoré