Presque chaque jour que Dieu fait, on apprend davantage sur l’exploitation scandaleuse de nos richesses minières, de l’or notamment. C’est une manière financière, qui aurait énormément contribué au développement socioéconomique de notre, que nous perdons régulièrement cause de l’exploitation illégale et la commercialisation frauduleuse de notre or.
Lorsque l’on consulte les statistiques du commerce extérieur du Mali à travers les rapports de l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives (ITIE), l’on apprend que les trois pays destinataires des exportations de l’or produit de manière industrielle et légale sont l’Afrique du Sud, la Suisse et l’Australie. Par contre, lorsque l’on analyse les flux du commerce extérieur malien dans sa globalité et dans le détail on se rend compte que le Mali exporte des quantités extraordinaires vers les Emirats Arabes Unies (EAU). C’est ce que l’économiste Abdoulaye Shaka Bagayogo nous rappelle dans un rapport d’investigation intitulé, «Orpaillage dans la région de Kayes : Enjeux économiques, sécuritaires et stratégiques».
Selon cet expert très sollicité lors des colloques économiques, les importations atteignent des montants gigantesques lorsque les Chinois entrent dans la partie. De 2012 à 2021, le Mali a exporté plus de 25 milliards de dollars d’or vers les EAU. Pendant la même période, notre pays n’a déclaré exporter vers les mêmes Emirats moins de 217 millions de dollars. Ainsi, dénonce M. Bagayogo, «moins de 1% des exportations issues de l’orpaillage a été déclaré». Évalués en francs Cfa, les montants correspondants donnent le tournis. Ainsi, ce sont environ 14.000 milliards de F CFA d’or qui ont été exportés à l’insu des autorités de la République du Mali. Aux cours mondiaux annuels, explique l’économiste, cela correspond à une production d’environ 532 tonnes.
Pour la seule année 2021, environ 127 tonnes d’or ont été exportées du Mali à destination des EAU pour une valeur monétaire d’environ 4062 milliards de FCFA. Ces exportations illégales ont entraîné une perte financière d’environ 990 milliards de FCFA en 2021 et 3408 milliards de F Cfa sur la période 2012-2021.
Malheureusement, il n’y pas seulement que l’or qui est abusivement exploité et frauduleusement exporté. «Les dernières réserves floristiques du Mali sont dans la région de Kayes et elles font l’objet d’exploitation sauvage par des exploitants chinois qui y font venir des ouvriers d’autres régions du Mali pour les aider à la destruction du couvert végétal», déplore Abdoulaye Shaka Bagayogo. Entre 2017 et 2022, rappelle l’économiste, «les exportations de bois à destination de la Chine totalisent plus de 250 millions de dollars». Le hic, dénonce-t-il, «ces exportations se font en violation flagrante de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES)».
Comment peut-on alors aspirer au développement alors que l’essentielle de nos richesses sont exploitées au profit d’autres pays au vu et au su de nos autorités ?
M.B