Le président du Comite de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (CSA), Ahmed Boutache a fait ses adieux, dans une correspondance, à ses collègues le lundi dernier. Nommé ambassadeur de l’Algérie en Italie, Ahmed Boutache quitte la présidence du CSA à un moment où la structure, qui est chargée de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, est dans l’impasse.
Si l’on ne peut dire que le diplomate algérien Ahmed Boutache a jeté l’éponge, les mots qu’il a choisis pour annoncer son départ de la présidence du Comité de Suivi de l’Accord (CSA) sont crus et symptomatiques de la grave crise qui secoue l’instance chargée de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation issue du processus d’Alger. Selon l’ambassadeur Boutache, le contexte actuel « marqué par davantage de complexité des difficultés qui caractérisent le processus de mise en œuvre de l’Accord nécessite sérénité, patience et persévérance dans l’effort afin de passer ce cap qui n’augure pas de jours meilleurs pour l’application de l’Accord menée si patiemment et avec foi et conviction, tout au long de ces cinq dernières années.»
Parmi les difficultés auxquelles Ahmed Boutache fait allusion, il y a la décision d’annuler la tenue de la 38ème session du CSA, ce 17 septembre, à Kidal. Selon Tiébilé Dramé, le Ministre des affaires étrangères et de la Coopération internationale du Mali, c’est au regard d’éléments nouveaux que le président de la République a souhaité que le CSA ne se tient pas à Kidal. A ses dires, les plus hautes autorités du Mali ont décidé de reporter la 38ème session du CSA à une date ultérieure afin que toutes les conditions soient réunies à Kidal pour ce faire. « Suite à la décision prise souverainement par le gouvernement de la République du Mali en raison d’impératifs qui lui sont propres, que la 38ème session statutaire du CSA se tienne à Bamako et non pas à Kidal, comme initialement prévu et décidé par le CSA, conformément aux dispositions pertinentes de l’Accord, en l’occurrence la CMA, partie signataire de l’Accord, a publié, ce jour, un communiqué officiel par lequel elle élève une protestation contre l’annulation de la tenue de la 38ème session du CSA à Kidal et introduit une demande pour la tenue d’une réunion urgente avant toute autre étape avec la communauté internationale et les autres parties à l’Accord dans un lieu neutre en vue de clarifier l’ensemble des questions pendantes, notamment la raison d’Etat impérative qui a motivé l’annulation de la 38ème session du CSA… », explique Ahmed Boutache. Dans sa démarche, précise le diplomate algérien, la CMA conditionne, sans ambiguïté aucune, un retour aux activités statutaires ordinaires des organes de mises en œuvre de l’Accord par l’organisation d’une réunion urgente, dans un lieu neutre, avec tous les acteurs de la mise en œuvre de l’Accord.
« Devant ce sérieux développement, signe avant-coureur d’obstacles non négligeables qui viendront, dans un avenir non lointain, obérer et affaiblir le processus de mise en œuvre de l’Accord qui, au lieu d’être accéléré comme ne cesse de le réclamer la communauté internationale, risque de connaitre encore davantage de retard, et ce, à une phase cruciale qui devrait voir lancés les grands, notamment la révision constitutionnelle», selon Ahmed Boutache.
La CMA, dans son communiqué, en plus de dénoncer la décision d’annuler la tenue du CSA à Kidal sur la seule demande de la partie gouvernementale, demande aux organisations et pays membres de la médiation d’observer une stricte neutralité́ vis à vis des parties. « Il y va de leur crédibilité́ », précise le mouvement signataire de l’Accord.
Pour rappel, le Niger, afin de protester contre la gestion de Kidal par la CMA, a suspendu sa participation, le 13 septembre dernier, aux travaux du Comité de Suivi de l’Accord. Cette décision a été précédée par une série de sortie médiatique du président nigérien Mahamadou Issoufou contre le statut actuel de Kidal. De son avis, la situation hors de contrôle à Kidal contribue à la propagation du terrorisme dans la région. Il a ainsi déclaré, samedi 7 septembre dernier, lors d’une visite au Mali que le statut de Kidal, aux mains des ex-rebelles, est une menace pour le Niger et que des actes terroristes sont parfois commis avec la complicité de certains signataires de l’accord de paix d’Alger.
Quid des problèmes internes au sein de la Plateforme ? Chacune des trois composantes de la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014 signataires de l’Accord d’Alger est traversée par une crise aigue. Conséquence : la dernière session mensuelle du Comité de suivi de l’accord (CSA) s’est tenue sans un représentant de la Plateforme. Les efforts du gouvernement malien et la médiation algérienne pour désamorcer cette crise n’a pas encore aboutie. « La crise que connait la Plateforme est toujours en attente d’une solution, les initiatives prises à cet égard n’ayant pas pu aboutir, jusque-là », explique Ahmed Boutache.
Madiassa Kaba Diakité
Source: Lerepublicainmali