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Chronique du vendredi : Mara face à l’engrenage de la com

Les médias internationaux sont aux politiques africains ce qu’est l’aimant pour l’acier, même s’il arrive à nos chefs d’avoir des colères homériques quand ils sont égratignés par ces médias qu’ ils ont, pour certains, contribué à valider, financer, fait rayonner. Serpent qui peut se mordre la queue ou fatale attraction, les dégâts du micro continueront encore. En attendant que se répande l’exemple de pays en train d’émerger sans tambours ni trompettes, qu’il s’agisse du lointain Bostwana ou du voisin Cap-verdien encore primé cette année par la Fondation Moh Ibrahim pour la qualité de sa gouvernance. Et en attendant que se forgent, sous nos cieux, les ripostes citoyennes à la tradition du fait accompli, ce ya foyi à Abidjan, ce ma tey à Dakar ou ce nyake para à Bamako. L’engrenage de la communication ? Il existe et dans les démocraties vigilantes, les gouvernants en tiennent compte sans esquiver leur devoir de rendre compte. De peur d’être plombés par la surcommunication ou la mauvaise communication, le politique occidental gère « sa rareté » dans les médias. C’est rarement le cas en Afrique. Pourtant, la surexposition peut être source d’erreurs. Et Moussa Mara qui rentre de France pour la seconde fois en une semaine vient,d’en commettre, quatre à notre avis.

adam thiam

Première erreur : sur la garde à vue de Soumeylou Boubeye Maiga qui était, en fin de semaine dernière, entendu par la brigade financière de Nanterre en France, le Premier ministre, interrogé par la presse hexagonale n’a pas cru devoir s’esquiver, comme il est de coutume et ce, à travers les formules consacrées connues de tout le monde. Prenant le taureau par les cornes, il a rappelé les efforts que l’Etat malien a fournis pour assister Sbm, via la mobilisation de l’ambassadeur du Mali à Paris et la proposition de commettre un avocat.   Sbm n’étant pas ministre au moment de son interpellation, et étant un justiciable comme tout le monde, la communication du Premier ministre conforte la piste de l’affaire Tomi alors qu’aucune déclaration officielle française ne permettait d’invoquer cette piste.

 

Deuxième erreur : toujours en relation avec Tomi, Mara croit savoir que ce dernier n’était pas intermédiaire dans l’histoire de l’achat de l’avion présidentiel ou des contrats d’arme. A moins, relativisa t-il, que Tomi n’ait présenté ses mandants « X ou Y » au ministre de la Défense qu’était Soumeylou Boubeye Maiga à l’époque. Un tel propos ne sied pas, les motifs de la garde à vue n’ayant pas été donnés officiellement, mais par la presse, même s’il est plausible que celle-ci ait été briefée en « off » par des sources crédibles. En clair, ce que le Premier ministre dit est que Tomi n’est pas obligé d’être lui-même l’intermédiaire ?

 

Troisième erreur : dans l’affaire des surfacturations, le chef du gouvernement dit qu’il ne fera pas de quartier. Tous ceux qui ont trempé paieront, y compris les ministres, « le cas échéant » ajoutera t-il. Telle communication pose problème : elle peut vouloir dire, ce qui serait d’une tragique gravité pour le pays que des lampistes seulement peuvent être responsables des énormes surfacturations détectées. Elle peut aussi insinuer qu’un ministre ou des ministres sont incriminés. Ici la seule communication qui vaille c’est l’action pour éviter les perceptions de procès d’intention ou en sorcellerie.

 

Quatrième erreur : c’est l’exhortation faite à la communauté internationale de plus s’impliquer dans la traque des terroristes au Nord du Mali. Non pas que ce ne soit pas la solution, car seule une Onu mieux outillée peut arriver à vaincre l’hydre terroriste dans notre pays. Mais qu’un Chef de gouvernement ne peut pas dire ce qu’il a dit, sans aussi préciser qu’il engageait l’armée nationale. D’ailleurs, la presse africaine n’a pas attendu pour réagir, comme l’a fait le journal le Pays au Burkina Faso, en des termes douloureux pour notre dignité de Maliens.

 

Passons les commentaires tenus à Paris par le Premier ministre sur l’état moral de notre justice. Mara n’est sans doute pas responsable de la corruption des juges qu’il a décriée. Mais il n’est pas l’opposition qui elle a le pouvoir de la dénonciation. Il est un gouvernant et c’est à l’action qu’il est invité. Celle-ci est non seulement possible mais requise dans l’efficacité qu’assure la discrétion. Mais, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain : retenons la promesse faite de publier sur le site de la primature, avant la fin de cette semaine le rapport de la Section des Comptes sur les contrats querellés par le Fmi, en attendant que celui du Vérificateur général soit définitif. Il y aura beaucoup de clics sur le site primatorial ce soir, avec l’espoir d’y trouver le rapport promis.

 

Adam Thiam

SOURCE: Le Républicain  du   10 oct 2014.
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