Au bout d’un long bras de fer à rebondissements, l’instance supérieure de la magistrature a fini par s’offrir temporairement la tête de l’intrépide magistrat, Cheick Chérif Koné. Ciblé par un cumul de procédures disciplinaires au forceps, en tant qu’avocat général de la Cour suprême puis comme président d’un mouvement à vocation citoyenne, le président de Refsyma et de l’APPM n’a pas échappé aux rafales et tirs groupés du Conseil de la magistrature.
Sa comparution, mercredi dernier, s’est conclue par un verdict à la sauvette, qui lui paraîtrait bien plus disgracieuse s’il ne trouvait pas consolation dans la flagrance de la procédure de sa radiation. Au nombre des aspérités criantes relevées par l’avocat du célèbre magistrat, Me Kassoum Tapo, figure, en effet, une violation flagrance des prescriptions en rapport avec les compétences ainsi que les collusions d’intérêts évidentes dans les mécanismes judiciaires du jugement par les pairs. Poursuivi pour manquement à ses devoirs de réserve, l’ancien avocat général comparaîtra devant une formation présidée par magistrat du parquet sans relever du ministère public tel que l’exigent les textes en vigueur. Il était plutôt magistrat en attente de redéploiement, depuis son refus d’abjurer sa vocation de sentinelle des procédures et son refus de cautionner leur violation dans le célèbre dossier de Soumeylou B. Maiga. Plus qu’un simple limogeage, son objection de conscience lui coûtera une retraite forcée, qui fait de lui un magistrat ne relevant ni du parquet ni du siège et ne répondant à aucune des compositions possibles de formation disciplinaire.
C’est dans le sillage de la même affaire que Cheick Cherif Koné est l’auteur d’une plainte pour forfaiture contre l’un de ses confrères magistrats. Il s’agit de l’actuel Procureur général, lequel devrait en être logiquement disqualifié pour toutes affaires qui concernent le plaignant. Les avocats de ce dernier l’ont d’ailleurs requis et obtenu avec force argument, lors d’une précédente procédure disciplinaire, sans le moindre soupçon d’un possible bouleversement de la règle pour des jeux similaires. C’est donc avec sidération que Me Tapo et son client seront confrontés à la trivialité d’un refus catégorique du Conseil d’accéder à la même exception qui avait naguère justifié la récusation du Procureur Mahamoudou Timbo. Un revirement dépourvu de toute vergogne, à leurs yeux, et qui les conduira à se retirer d’un spectacle dont l’issue sautait déjà aux yeux. C’est par les réseaux sociaux que Cheick Cherif Koné et son conseil prendront connaissance de la décision d’une radiation qui viennent sanctionner un attachement singulier aux vertus de la profession de magistrat ainsi qu’un combat farouche contre le dévoiement et la désacralisation des valeurs sans lesquelles une justice est plus un instrument du plus puissant qu’un refuge du citoyen ordinaire. Fidèle à ce caractère trempé, l’intéressé n’est visiblement pas du genre à accueillir sa radiation avec résignation. Il se prépare, selon nos sources, à recourir avec les mêmes arguments de droit aux instances internationales où, à quelques encablures de sa retraite et du terme de sa brillante carrière, sa réputation de magistrat intègre pourrait être très mieux récompensée.
A KEÏTA
Le Témoin