« Les États-Unis sont prêts à envisager des sanctions ciblées contre ceux qui déstabilisent encore davantage la situation ou poursuivent leurs propres intérêts en favorisant ou encourageant la violence », a indiqué, dimanche 26 avril, le secrétaire d’Etat américain, John Kerry.« Empêcher la violence de se propager et de prendre d’autres vies nécessitera que les dirigeants de Centrafrique, passés et actuels, soient clairs en la condamnant », a-t-il ajouté.
Bangui a de nouveau été dimanche le théâtre de violences entre chrétiens et musulmans, en dépit de l’élection de la présidente Catherine Samba Panza, censée pacifier le pays. Le nouveau gouvernement « offre au peuple de la Centrafrique une opportunité pour reconstruire la société et restaurer sa tradition de tolérance », a encore souligné M. Kerry. Ce dernier a prévenu les fauteurs de troubles des deux camps que les Etats-Unis et ses alliés« continueraient à travailler sans relâche pour juger et punir tous ceux qui se sont rendus responsables d’atrocités en Centrafrique ».
UNE FEUILLE DE ROUTE POUR LE NOUVEL EXÉCUTIF
A peine nommé samedi par la présidente, le nouveau premier ministre, André Nzapayeké, a fixé la feuille de route du futur gouvernement, dont la composition devrait être annoncée rapidement. Priorité numéro un :« arrêter les exactions » dans le pays, a-t-il indiqué. Il souhaite aussi en urgence faciliter « le retour » des déplacés chez eux, et « mettre en place une équipe qui va se charger de la question de la réconciliation nationale ».
L’ex-président Michel Djotodia a été contraint à la démission le 10 janvier à cause de son incapacité à mettre fin à ces tueries interreligieuses, qui ont plongé le pays dans une crise humanitaire sans précédent, avec des centaines de milliers de déplacés, dont 400 000 à Bangui, soit la moitié de la population de la ville. Il avait renversé en mars 2013 le régime de François Bozizé, en s’appuyant sur la coalition rebelle Séléka, à dominante musulmane, dont les combattants ont multiplié pendant des mois les exactions en toute impunité contre la population majoritairement chrétienne du pays, déclenchant une spirale de violences intercommunautaires.
Depuis décembre, date du début de l’intervention militaire française aux côtés de forces africaines pour rétablir la sécurité dans le pays, les violences ont fait plus de 2 000 morts et un million de déplacés selon l’ONU.
PILLAGES À BANGUI
Dans la capitale centrafricaine, violences, tirs et tentatives de pillages se concentraient dimanche autour du quartier du PK-5, au centre-ville, le poumon commercial de la capitale, avec ses centaines de magasins appartenant pour la plupart à des musulmans. Ces commerces – alimentation, téléphonie, pièces détachées pour automobiles, etc. – attisent depuis des jours la convoitise des pillards et miliciens chrétiens « anti-balaka », qui lancent des raids, entraînant la riposte de jeunes musulmans aidés d’ex-Séléka.
Des tirs ont encore été entendus dans la nuit de samedi à dimanche dans le quartier de Miskine, patrouillé par les soldats français de l’opération Sangaris et africains de la Misca. « Les ‘anti-balaka’ se servent de Sangaris pour progresser derrière eux : quand les Français partent, ils nous attaquent ! », accusait dimanche Adam, un habitant musulman du quartier.
Les militaires français récusent eux toute partialité sur le terrain. Aprèsavoir commencé à les désarmer dès leur arrivée le 5 décembre, ils ont en effet décidé de laisser des moyens de défense à certains ex-Séléka, devenus vulnérables après avoir régné en maîtres et terrorisé Bangui en toute impunité pendant des mois.
SOURCE / LEMONDE