Célébrer un mariage sans uniforme au Mali, particulièrement à Bamako devient rare. Depuis quelque temps les femmes ont instauré cette pratique dans l’optique d’être en harmonie en fin qu’il n’y ait pas de distinction entre elles lors des célébrations de mariage. Cependant cette pratique a pris une autre connotation et est devenue un problème social.
Le mariage un lien sacré entre deux personnes, deux famille est un moment de joie et de bonheur. Les familles le célèbrent dans la paix, l’harmonie. C’est pourquoi les femmes avaient jugé nécessaire ou du moins bon de donner la chance à toutes d’être vu de la même manière le jour j.
Toutes les femmes se mettaient en uniforme lors des célébrations de mariage afin de mettre en avant la paix et l’attente qui règne dans leurs familles : « On faisait l’uniforme dans le but de montrer aux autres familles, qu’il y a la paix et l’attente chez nous, qu’on s’aime et qu’on est soudé » nous explique Assitan Traoré secrétaire.
Cet uniforme ne couvrait-il pas celles qui n’avaient pas de moyen de s’acheter des vêtements de marque pour les mariages ?
À cette question Oumou Kanté dira que « l’uniforme avant faisait en sorte que les femmes pauvres ne soient pas isolées d’un côté et celles qui sont riches de l’autres coté. On ne voyait plus cette différence de classe, et on ne se souciait plus de ce qu’on devait porter le jour j pour ne pas être vu d’un mauvais œil ».
Pour Baro Kanté l’uniforme avait apporté du nouveau dans la célébration de mariage et l’arrangeait beaucoup « avant qu’on ne commence avec cette idée d’uniforme, j’empruntais les habits d’une cousine ou d’une grande sœur pour les mariages, car je n’ai pas de moyen pour m’acheter ces vêtements empruntés. Mais avec l’uniforme j’arrive à l’acheter et je n’avais plus honte de moi » confie-t-elle.
Cependant cette pratique, qui faisait l’affaire de toutes est devenue un véritable facteur de conflit, de propagande et d’injustice. Elle est devenue une obligation pour toutes les femmes à chaque célébration de mariage. Elle a perdu son sens premier.
Selon Koniba Samaké, étudiante en droit « l’uniforme de nos jours est devenu obligatoire. Quant on m’annonce souvent les mariages au lieu que je sois contente de l’apprendre, je pense d’abord aux dépenses de l’uniforme car en plus d’être une obligation, le choix des vêtements choisis coutent chers et on peut avoir deux à trois mariages dans le mois. S’il faut payer tous cela et cotiser encore le jour j, franchement c’est trop ».
Et oui en plus d’être une obligation, l’uniforme de nos jours coute plus que ceux d’avant. Il n’est plus choisi à l’unanimité mais par quelque femmes en fonction de la nouveauté. Ce qui n’est pas profitable à toutes mais aussi en fonction de la classe sociale chose que ces initiatrices avaient tenté de briser « on choisit l’uniforme maintenant en fonction de la famille. Si je suis riche je ne vais pas accepter qu’au mariage de ma fille, les femmes fassent uniforme avec un wax de 4000f ou 5000f CFA mais plutôt des Bazins qui coutent 10000f CFA par mètre. C’est pour montrer que la famille n’est pas n’importe quelle famille ». Avoue M.T commerçante.
Une question de classe sociale qui va amener à son tour des conflits entre sœurs, amies, voisines, et collègues « Mon amie ne me parle plus depuis le jour du mariage de sa sœur, car je n’ai pas pu acheter toutes les uniformes. C’étaient trois uniformes, et j’en ai acheté deux, le troisième je n’ai pas pu l’acheter car je devais lui donner de l’argent aussi pour contribution et me faire belle pour la journée. Le jour j, je lui ai remis l’argent mais en disant que je n’ai pas pu acheter le troisième uniforme, elle a hué sur moi et m’a dit que je devais rembourser tout ce qu’elle m’a donné quand mon grand frère s’est marié. » Dénonce Djénéba Dembélé
Certes il est vrai que l’uniforme coute cher mais il est à signaler que ce n’est plus un uniforme qu’on choisit mais deux ou trois pour un seul mariage, si l’on tient compte du nombre de mariage par mois ces femmes dépensent à un seul mariage plus de 100.000F CFA dans les uniformes seulement.
Elles doivent aussi penser en acheter pour leurs enfants car c’est une affaire de concurrence aussi entre belles-sœurs, coépouses et voisines « J’achète les uniformes à tous mes enfants même si je n’ai pas les moyens, je demande à mes frères et je fais des prêts que je rembourse après. Si je fais tout ça c’est pour que ma coépouse et ma belle-sœur ne se moquent pas de mes enfants et de moi ». Habiba mère de quatre enfants.
Face à ce phénomène qui détruit des couples, des familles, des amitiés, certaines ont décidé de laisser cette pratique nuisible « nous avons décidé de laisser cette histoire d’uniforme car cela a causé des dégâts au sein de la famille. Les enfants qui ne se parlaient plus, des coépouses qui ne faisaient que dépenser le peu de leurs maris, des amies devenues des ennemis, tous cela nous a poussé à réagir et aujourd’hui on célèbre bien nos mariages sans uniformes et tout le monde est content » dit Badiallo l’ainée d’une grande famille.
Selon Ali Traoré la solution à ce problème est l’abandon : « Si se mettre en uniforme devient un problème le mieux c’est de laisser tomber une bonne fois. Avant cette histoire nos parents célébraient les mariages et il n’y avait pas de soucis de ce genre. »
En tout cas les avis sont partagés et il ne reste plus qu’à se poser une question : Peut-on réussir à se développer en dépensant plus qu’on ne reçoit ?
AFANOU KADIA DOUMBIA Stagiaire
Malijet