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Campagne agricole : C’EST LA MAIN-D’OEUVRE QUI MANQUE LE PLUS

La fin de l’hivernage occasionne des déplacements massifs de jeunes bras valides vers les grandes agglomérations ou les sites d’orpaillage traditionnel à la recherche d’une hypothétique ressource monétaire

programme campagne productivite agricole champs vergeLes pluies avaient suscité beaucoup d’inquiétudes légitimes en début d’hivernage et préoccupaient sérieusement les paysans qui ne cessaient de scruter le ciel à la recherche de la moindre averse pour arroser le sol. Fort heureusement ces inquiétudes se sont estompées quand la pluviométrie s’était installée de façon permanente et a arrosé le pays de long en large.

Les paysans ont pu faire face aux entretiens indispensables des parcelles. Actuellement l’hivernage tend vers sa fin et les pluies se font de plus en plus rares, mais quelques averses continuent à mouiller les épis des céréales et les capsules de coton. Ce qui occasionnent d’autres inquiétudes pour qui sait que par exemple les capsules de coton n’ont plus besoin de cette humidité en quantité.
En effet, la direction générale de la Holding Compagnie de développement des textiles (CMDT), la direction générale de l’Office de la haute vallée du Niger (OHVN) et les paysans ne voient pas d’un bon œil ces dernières pluies. A juste raison, car l’humidité que ces dernières pluies occasionnent contribue à ternir la qualité du coton récolté. Or, les deux structures d’encadrement de la filière cotonnière mènent depuis quelques années une intense campagne de sensibilisation et d’information des paysans sur les bénéfices qu’ils peuvent tirer de la qualité du coton malien sur le marché international.
De leur côté, les cultures vivrières et même celles de rente comme l’arachide, le sésame ou le soja n’ont pas besoin eux aussi de ces dernières pluies. Dans tous les cas, les épis de cultures vivrières et les capsules de coton souffrent de l’humidité occasionnée par ces eaux.
Le spectacle des champs, où des gerbiers sont disposés pour faire sécher convenablement au soleil les épis, est courant.
Nous sommes en pleine période de récolte des champs.
Ballafing Diarran, paysan de Faragnègnè de la zone de production cotonnière de Faladié (OHVN) s’est réjoui de la fin heureuse de l’hivernage. L’hivernage a accusé un retard en raison de la rareté des pluies qui d’habitude, selon lui, tombent en mai, et au plus tard début juin. Après les pluies ont été bien réparties dans le temps et l’espace, a constaté le paysan Ballafing Diarra. Il a assuré que depuis des décennies, il n’a pas vu des pluies qui tombent jusqu’en début novembre.

RESULTATS SATISFAISANTS. Les récoltes sont prometteuses. Mais, ces résultats sont à inscrire, selon le paysan, au compte de la subvention des engrais et des semences. Il a salué le geste et le maintien de la mesure. La subvention des engrais et des semences a suscité un engouement pour la culture du maïs. Ainsi, grâce à la précocité de certaines variétés de maïs, les paysans ont pu faire face avec sérénité à la période de soudure qui s’est installée.
Aussi, Sékou Traoré du village de Néguébabougou Bossofala a demandé à l’OHVN de promouvoir à côté du coton, la culture de la pastèque qui est un fruit très rentable. Ce fruit permet aux paysans de disposer de ressources monétaires intéressantes avant les récoltes de coton et des autres cultures vivrières, s’est défendu le paysan Sékou Traoré.

Balla Coulibaly du village de Daban a relevé les cas d’inondations de parcelles jusqu’à 21 hectares de coton, 31 hectares d’arachide et 28 hectares de sorgho, selon ses estimations. Néanmoins, il estime que les récoltes seront prometteuses et appelle déjà ses collègues à éviter la divagation des animaux dans les champs qui sont en plein stade de récoltes. Il recommande que les éleveurs et les bergers soient vigilants pour éviter que les bêtes ne saccagent les champs en les faisant paître au beau milieu des gerbiers ou des épis sur tiges.
La paysanne Mme Doumbia Mariam fait figure de pionnière dans le paysage des hommes qui cultivent le coton dans la zone de Ouéléssébougou. Au décès de son mari, il y a 4 ans, cette brave dame a hérité des champs de coton et autres cultures vivrières qu’elle exploite pour le plus grand bonheur de la dizaine de personnes à sa charge. « Quand la première année, j’ai voulu cultiver le coton, mon premier garçon s’est opposé, craignant, comme il me l’a dit que je n’aggrave l’endettement de la famille. Malgré mon insistance, il a refusé de m’épauler, alors je me suis engagée seule avec l’aide de Dieu. Et mes efforts ont été couronnés de succès », a-t-elle expliqué à la délégation du directeur général, le Dr Mamadou Kané qui s’est rendu dans son champ de coton lundi dernier dans son village de M’Pièbougou.
« Aujourd’hui le premier garçon est revenu à de meilleurs sentiments et le deuxième garçon qui était en exode en Côte d’Ivoire est rentré définitivement. Avec leurs autres frères et sœurs, ils m’aident à exploiter les parcelles de coton sur 3 hectares, de riz, de niébé et d’arachide sur un demi hectare chacun, de maïs sur 2 hectares, de mil sur 5,5 hectares », a expliqué la dame. Mme Doumbia Mariam ne dispose en tout et pour tout équipement agricole que d’une charrue sans âne, un seul bœuf et le second est emprunté au beau-frère de son mari défunt et de deux semoirs.
Pour davantage l’encourager, l’OHVN l’a inscrite sur la liste des femmes qui devraient recevoir une distinction lors de la dernière journée mondiale des femmes rurales célébrée cette année à San en octobre dernier.

Des centres de prestation de services agricoles. Wa Traoré, paysan du village de Gouani dans la commune rurale de Mountougoula est, comme beaucoup d’autres collègues, confronté à l’insuffisance de main d’œuvre pour récolter à temps les cultures (coton et céréales). En effet, le paysage des épis qui voguent au gré des vents et des capsules de coton qui attendent d’être récoltés est courant. Nous avons remarqué des paysans qui étaient tout seul en train de récolter leurs champs de sorgho et ou de coton. Cet état de fait s’est expliqué par l’absence ou l’insuffisance de main d’œuvre pour épauler les chefs de ménage.
La fin de l’hivernage occasionne des déplacements massifs de jeunes bras valides qui envahissent les grandes agglomérations ou qui se ruent sur les sites d’orpaillage traditionnel à la recherche d’une hypothétique ressource monétaire. Les jeunes filles se divisent en deux clans, celles qui viennent trouver de quoi constituer leur trousseau de mariage en effectuant les travaux domestiques et d’autres qui préfèrent partir apporter une main secourable aux indispensables besoins de nettoyage de gravas de terre à la recherche de pépites d’or sur les sites d’orpaillage.
Tout ce beau monde déserte du coup les villages au moment où, les parents impuissants sont confrontés entre la nécessité de laisser partir les enfants à la recherche de ressources monétaires supplémentaires et le besoin de les retenir pour achever les récoltes. Cette situation de désertion des villages à cette période n’est guère nouvelle, mais elle s’intensifie de plus en plus et affecte même les périodes de travaux champêtres, où les producteurs sont régulièrement confrontés à l’insuffisance de main d’œuvre.
Les parents se sentent impuissants à freiner le phénomène. L’installation et la promotion des centres de prestation de services agricoles pour assurer tous les travaux champêtres qui vont du labour, aux différents entretiens, fertilisation, repiquage, récolte, et battage etc pourront soulager les paysans et pallier cette défaillance qui ne s’estompera pas de si tôt.
Ces centres ont pour avantage de maintenir les jeunes sur place d’une part et de leur assurer une source de revenus viable et rentable, d’autre part. Ils pourront également être le levier pour une mécanisation assez poussée de l’agriculture malienne. D’autant plus qu’ils pourront être une réponse aux effets du changement climatique avec la variabilité pluviométrique que nous connaissons de plus en plus.

M. COULIBALY

source : Essor

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