Il n’a suffi qu’un an pour que l’ancien Président de la République, IBK, soit voué aux gémonies par son ancien et dernier Premier ministre Boubou Cissé, qui a fait le choix d’aller militer au sein du principal parti de l’opposition à son régime, à savoir l’URD.
Ce choix, à la fois opportuniste, immoral, indécent, est non seulement politiquement incorrect, mais aussi, et surtout perçu par l’ancienne majorité comme une trahison.
Boubou Cissé, considéré à tort ou à raison comme le dauphin d’IBK, aurait dû défendre ce bilan fut-il chaotique, pour l’honneur et par reconnaissance aux bienfaits de l’ancien président IBK qui l’a élevé au rang de fils bien-aimé, éclipsant du coup le fils biologique, Karim Keita.
Son arrivée au parti de l’ancien chef de file de l’Opposition, Soumaila Cissé, loin d’enthousiasmer les militants et cadres de l’URD, a été perçue par certains comme une insulte à la mémoire du fondateur du parti, car ce dernier a été victime de la mauvaise gouvernance du duo IBK-Boubou.
Pris désormais entre deux feux, celui de l’ancienne majorité et des faucons de l’URD, Boubou Cissé va-t-il renoncer à être candidat à la présidentielle prochaine ?
De quel projet pourrait-il être porteur et qu’il n’a pas eu le temps de mettre en œuvre pendant les huit ans qu’il a passés au pouvoir ?
Prend-il le peuple pour un mouton de Panurge qui est prêt à le suivre malgré les bévues qu’il a commises ?
Boubou Cissé n’aura-t-il pas des ennuis judiciaires qui l’empêcheront d’être candidat ?
Le mercredi 18 Août 2021, jour pour jour, sera le premier anniversaire de la chute du régime IBK. C’est ce jour qu’une junte militaire est descendue de Kati à bord des véhicules 4X4 pour conduire le Président de la République et son Premier ministre Boubou Cissé au camp Soundiata de Kati.
Les images de leur arrestation ont ensuite fait le tour du monde. Nombreux étaient les Maliens, au-delà de l’émotion, à saluer la fidélité du PM Boubou qui était resté aux côtés d’IBK quand son fils Karim, sentant le coup venir, avait pris la poudre d’escampette, direction la Côte d’Ivoire. Et beaucoup avaient même pensé trouver un avocat défenseur du bilan, bien que chaotique, d’IBK, en l’occurrence Boubou Cissé pour avoir été, non seulement, au cœur de la gestion de l’État sous IBK, mais aussi, pour avoir accepté de tomber avec lui.
Un troisième groupe d’observateurs de la scène politique avaient plutôt estimé que la fidélité de Boubou Cissé à IBK était due à la promesse que ce dernier avait prise à son PM en faisant de lui son dauphin, c’est pourquoi d’ailleurs il lui a donné le plein pouvoir.
Cette troisième thèse semble être la plus plausible quand on sait le revirement à 180 degrés quand tout espoir de récupérer le pouvoir, y compris par le biais d’un coup d’État, s’est évanoui. Elle est d’autant plus probable que c’est vers l’URD, le principal parti de l’opposition qu’il a combattu, que Boubou Cissé s’est tourné pour certainement assouvir son dessein machiavélique.
En faisant le choix d’aller militer à l’URD, Boubou Cissé a commis une double faute politique.
La première est de se démarquer purement et simplement du bilan de 7 ans de gestion du régime IBK, dont il était l’un des chefs d’orchestre.
La deuxième faute politique grave qu’il a commise était d’aller militer au sein d’un parti dont il a été l’un des bourreaux, à savoir l’URD de Soumaila Cissé. Pour rappel Soumaila Cissé a été enlevé en pleine campagne pour les législatives dans sa région, quand Boubou Cissé était PM, libéré six mois plus tard, après la chute du régime, Soumaila Cissé n’a pas survécu à ses conditions horribles de détention. Ne faudrait-il pas rappeler au dernier PM d’IBK que l’URD bâtira sa prochaine campagne présidentielle sur les erreurs commises par l’ancien régime dont il était l’une des têtes pensantes ?
Avec l’obsession et la boulimie du pouvoir que Boubou Cissé a, il serait prêt à un retournement incroyable de veste pour s’adapter à la nouvelle donne, sauf que le peuple malien n’est pas dupe et la grande plaie laissée béante par leur régime ne s’est pas encore cicatrisée. Il ne serait nullement surprenant de voir ou d’entendre celui qui a choisi d’adhérer au parti qu’il a combattu, critiquer son propre bilan pour le besoin de la cause, il s’est même livré à cet exercice lors de la conférence régionale de l’URD de Mopti où il n’a nullement fait cas du régime défunt en assumant sa part de responsabilité dans le chaotique bilan.
Si IBK était mort avant d’assister à une telle ignominie, il se serait retourné dans sa tombe.
Aujourd’hui, il semble regretter d’avoir fait la promotion de certains, car presque personne n’a le courage de défendre son bilan, ou leur bilan commun et pourtant ils ont tous fait la java ensemble en se taillant des milliards.
Quant au nouvel adhérent de l’URD, à savoir Boubou Cissé, les dés semblent pipées pour lui, car il ne fera pas, non seulement, l’unanimité au sein de l’URD, pour ne pas dire qu’il cassera le parti s’il venait à être choisi, mais aussi, il ne pourra pas mobiliser au-delà de l’URD, pas en tout cas les partis de l’ex-majorité.
Alors, autant revoir à la baisse son ambition, à défaut de se faire oublier, pour ne pas attirer sur lui la foudre du peuple qui n’a pas encore fini de pleurer ses nombreux morts civils et militaires dus à la mauvaise gouvernance avec son corollaire de corruption, de concussion et de népotisme. Boubou Cissé est en train de rater une occasion historique de se taire pendant au moins cinq ans. Il s’expose désormais et il est fort probable que la justice s’intéresse à sa gestion, surtout que ses partisans le font passer pour un grand fortuné prêt à financer la campagne à des coups des milliards. IBK doit tirer toutes les leçons de sa gestion passée, un an après son départ du pouvoir. Joyeux anniversaire ; IBK en paix à la maison.
Salif MACALOU
Source : Info-Matin