Joe Biden s’est adressé au Congrès mardi 1er mars, après une première année de présidence compliquée. Le chef de la Maison blanche a profité de son discours sur l’état de l’union pour tenter de mobiliser les Américains face aux actions de Vladimir Poutine en Ukraine, mais aussi de calmer leurs craintes face à l’inflation.
Un an après son élection et sa promesse de « rétablir la confiance » pour effacer quatre années de présidence de Donald Trump, Joe Biden s’est livré pour la première fois à l’exercice imposé du discours sur l’état de l’union. Une allocution prononcée devant le Congrès (réunion des sénateurs et des membres de la chambre des représentants) et destinée à dresser l’état des lieux de la politique menée par la Maison blanche.
Le président y était appelé à évoquer les problèmes auxquels son administration et la population sont confrontées, ainsi que les idées, solutions ou suggestions de nouvelles lois, qu’il propose à la nation.
Un exercice loin d’être aisé pour le chef de l’État américain, après un début de mandat compliqué.
Le succès et de l’efficacité de sa campagne de vaccination contre le Covid-19 pour mettre un coup d’arrêt à une terrible mortalité (plus de 950 000 décès), ainsi que la baisse du nombre de demandeurs d’emploi n’ont constitué qu’une brève embellie.
Joe Biden a ensuite multiplié les revers : départ catastrophique d’Afghanistan, échec législatif de son plan « Build Back Better » destiné à rénover les infrastructures, polarisation électorale à son paroxysme, inflation et hausse vertigineuse du prix de l’essence.
Une première année d’exercice qui se solde par un maigre taux de satisfaction (37 %), alors que la situation se dégrade en Europe et que les sanctions annoncées contre la Russie sont susceptibles de freiner une économie convalescente.
Fragilisé sur son sol et contraint à l’action sur le plan international, Joe Biden, se devait d’afficher fermeté et volontarisme devant le Congrès.
Poutine pour cible
Sous les yeux d’Oksana Markarova, ambassadrice d’Ukraine à Washington et invitée d’honneur, le président des États-Unis n’a pas retenu ses coups contre Vladimir Poutine, qualifié de « tyran », « menteur » et auteur d’une « attaque injuste sans avoir été provoqué ».
Affirmant son « soutien au peuple ukrainien qui inspire le monde entier par sa résistance », Biden a reproché à son homologue russe d’« avoir tort » et de s’être « profondément trompé » en espérant une guerre éclair. « Nous sommes prêts. Nous sommes unis ».
Il s’est toutefois défendu de vouloir entrer dans un combat direct. « Nos troupes n’entreront pas en conflit avec l’armée russe, mais nous défendrons chaque centimètre des territoires de l’OTAN en Europe ».
Le chef de l’État américain a par ailleurs annoncé une aide « militaire, logistique, financière et humanitaire » à l’Ukraine, en promettant que la « liberté l’emportera toujours sur la tyrannie ».
Outre Poutine « plus isolé que jamais » et n’ayant « aucune idée de ce qui va lui arriver », Biden a affirmé vouloir s’attaquer aux oligarques russes, dont les États-Unis iront saisir leurs « yachts, appartements de luxe et jets ».
Après avoir souligné que les sanctions économiques avaient déjà causé une « chute du rouble de 30 % », il a confirmé l’interdiction de l’espace aérien aux avions russes et promis de nouvelles sanctions.
Contrôler l’inflation
Après avoir consacré les vingt premières minutes de son discours à l’Ukraine, Joe Biden a enchaîné en indiquant que ce conflit n’aurait aucun effet sur le portefeuille des Américains et le coût de l’énergie. « Tout ira bien », a-t-il martelé. « Nous avons déjà sécurisé 60 millions de barils de pétrole avec nos alliés » afin de contrôler l’augmentation du prix de l’essence.
Sous quelques huées timides des républicains, le chef de la Maison blanche a regretté « deux mauvaises années » liées à la pandémie, mais affirmé que son American rescue Plan avait permis de soulager les familles.
Pour continuer à remonter la pente, il s’est une nouvelle fois posé en VRP de son plan pour les infrastructures, lequel permettra selon lui de « construire américain, fabriquer américain, acheter américain. En faisant cela nous allons créer des emplois ». Plus d’un million de kilomètres d’autoroutes et 1 500 ponts devraient ainsi être rénovés au cours des années à venir.
Biden a aussi déclaré vouloir maîtriser le coût de la vie pour les familles. « Ma plus grande priorité est de ramener les prix sous contrôle », assurant que son plan allait permettre de diminuer les coûts et de réduire le déficit et de réduire le chômage.
Selon lui, la tendance est positive, avec 369 000 emplois créés dans l’industrie l’an passé.
Aider les familles
Soulignant l’injustice de traitement entre les plus riches et les classes les plus fragiles, Biden s’est prononcé en faveur d’une réduction des prix des médicaments, des tarifs des services de garde d’enfants, mais aussi d’un meilleur accès à des logements à loyer modéré.
« Nous devons améliorer notre système fiscal, afin que les entreprises et les plus riches participent à l’effort commun. Il ne s’agit pas de punir qui que ce soit, mais de mieux partager ».
Il s’est en outre prononcé pour une meilleure concurrence entre les entreprises, afin que celles en situation de quasi-monopole n’exploitent plus leurs employés et n’écrasent plus les petites entreprises et agriculteurs.
Adressant un long regard aux élus républicains, il a réclamé le vote d’une augmentation à 15 dollars de l’heure du salaire minimum.
Santé, Covid et avortement
Avec un plan de vaccination efficace et un « Covid qui ne contrôle plus nos vies », Biden a indiqué vouloir « continuer à combattre le virus », mais encourager le retour des employés au travail et des enfants à l’école. « Redonnons de la vie à nos enfants, nos entreprises, nos rues, nos commerces ».
Le droit à l’avortement « est attaqué comme jamais auparavant », a-t-il ensuite déploré. « Si nous voulons aller de l’avant, et non en arrière, nous devons protéger l’accès à la santé. Préserver le droit d’une femme à choisir » d’avorter, a-t-il plaidé, bien que la Cour suprême des États-Unis, composée d’une majorité de juges conservateurs, se dise prête à revenir sur ce droit.
Main tendue aux républicains
Biden n’a pas uniquement tenté de faire avancer ses idées, il s’est aussi adressé à ses adversaires politiques. « Nous sommes plus souvent d’accord que nous ne voulons l’admettre. Nous ne pouvons pas changer nos désaccords passés, mais nous pouvons modifier notre façon d’avancer ensemble ».
Le président a ainsi demandé aux élus des deux camps de s’unir sur quatre sujets majeurs : régler la crise des opioïdes, améliorer la prise en charge des problèmes de santé mentale, mieux supporter les anciens combattants, et « combattre le cancer tel que nous le subissons » avec l’objectif de réduire les cas de « 50 % au cours des 25 prochaines années ».
Retour en arrière, selon les républicains
En réponse au tableau dressé par le président démocrate, l’opposition républicaine était appelée, plus tard dans la soirée, à livrer sa propre analyse du pays et de la politique de la Maison blanche.
Figure montante du parti conservateur, il appartenait à la gouverneure de l’Iowa, Kim Reynolds, de répliquer. L’intéressée a donc critiqué Joe Biden, coupable selon elle de la hausse de l’inflation, mais surtout du retrait chaotique des troupes américaines d’Afghanistan.« Au lieu de faire avancer l’Amérique, nous avons l’impression que le président Biden et son parti nous ont renvoyés dans le temps à la fin des années 70 et au début des années 80. Lorsque l’inflation galopante martelait les familles, une vague de crimes violents s’abattait sur nos villes, et l’armée soviétique essayait de redessiner la carte du monde », a déploré Reynolds.
Les républicains ont concentré leurs attaques sur l’inflation élevée et la frustration face aux restrictions contre le Covid-19, espérant ainsi rallier leurs partisans contre les démocrates avant les élections de mi-mandat, en novembre prochain.
La gouverneure de l’Iowa a notamment mis en avant ses propres actions pour marquer son opposition au chef de l’État, soulignant sa décision d’arrêter l’enseignement à distance et d’exiger l’ouverture des écoles, en dépit de la virulence du variant Omicron. « J’ai été attaqué par la gauche, j’ai été attaqué par les médias. Mais ce n’était pas un choix difficile. C’était le bon choix », a-t-elle affirmé.