La 78e session de l’Assemblée Générale des Nations Unies s’est déroulée dans un contexte marqué par d’importants bouleversements géopolitiques et des conflits sans précédent. Elle a été marquée par plusieurs absences, et non des moindres. Sur 5 membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU (Organisation des Nations Unies), un seul était représenté par son président: les États-Unis. Les quatre autres l’étaient par leurs ministres des affaires étrangères. Que se passe-t-il ?
L’absence des chefs d’Etat et de gouvernement des quatre autres membres permanents ( Xi Jinping, Vladimir Poutine, Emmanuel Macron , Rishi Sunak) et bien d’autres comme Narendra Modi à la 78e session de l’Assemblée générale des Nations unies à New York est un signal inquiétant envoyé par les principaux dirigeants du monde. On a rarement vu ce raout annuel majeur snobé à ce point. Et ce ne sont pourtant pas les crises globales qui manquent, de l’Ukraine à la Libye, du Soudan au Niger, sans oublier le changement climatique. Ces absences témoignent des tensions qui pèsent sur les relations entre plusieurs grandes puissances, mais aussi d’un fait que plusieurs observateurs ont noté: les Nations Unies n’arrivent plus à rassembler et à atteindre une grande partie des objectifs pour lesquelles elles ont été constituées après la Seconde Guerre Mondiale, à savoir la préservation de la paix, ou encore la lutte contre la pauvreté. De plus, son système actuel est jugé, par certains, trop favorable à l’ancien ordre mondial où les États-Unis et l’Occident règnent en maîtres. Ces défections en disent long sur l’état de la coopération entre Etats.
Le président chinois avait beau faire l’éloge d’un multilatéralisme nouveau et inclusif à l’ONU à Genève en 2017, il promeut de fait un multilatéralisme à la carte. Sa récente absence du G20 en Inde fut très remarquée. Pour lui, l’ONU n’est pas le seul forum où il peut avancer les pions de Pékin. D’autres organisations, dont les BRICS, servent aussi bien ses intérêts.
Le Président français, quant à lui, semble séduit par la notion de multilatéralisme de projets. Ces formulations révèlent une crise majeure de la coopération. Le président de la Confédération, Alain Berset, s’en est fait l’écho à New York, mettant en garde contre un «désordre mondial». Il a martelé la nécessité impérative d’avoir une ONU forte.
Depuis le Covid-19 et la guerre en Ukraine, l’érosion de la confiance entre Etats s’est accélérée. De gros doutes apparaissent quant à la capacité des Nations unies à mener un jour les réformes nécessaires pour leur donner une représentativité qui ne reflète pas les rapports de force de 1945, mais ceux d’aujourd’hui. L’émergence d’un monde multipolaire qui ravit certaines puissances désireuses de contrer l’ordre mondial d’après-guerre marqué du sceau des Etats-Unis n’est pas encore un garant de paix, a averti au sommet des BRICS Antonio Guterres. Le secrétaire général de l’ONU le rappelait: l’Europe de 1914 était multipolaire…
Il faut signaler que la montée en puissance d’autres organisations au niveau desquelles beaucoup se sentent considérés contribue de plus en plus à l’isolement de l’ONU. Des regroupements comme les NON-ALIGNÉS, les BRICS, le G77, le G20 sont en train de s’imposer et d’avoir la confiance de plusieurs États. En tout cas, si l’ONU veut survivre, elle a intérêt à être au service de tous les pays du monde au même titre d’égalité.
Mariam Konaré
Nouveau Réveil