Quatre mois se sont déjà écoulés depuis que la transition a été décrétée au Mali mais le pays reste en proie aux divisions. Le Conseil national de la transition (CNT) – qui joue le rôle d’un parlement – a été tardivement mis en place début décembre. Mais la formation de cet organe « n’a pas réuni le consensus nécessaire entre les acteurs politiques y compris les représentants de la société civile », a déclaré Mahamat Saleh Annadif, le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU au Mali.
« C’est ce manque de consensus dans la mise en place des institutions de la transition qui alimente la détérioration de la situation socio-économique caractérisée par une multitude de grèves dans les différents secteurs d’activités », a souligné M. Annadif, qui dirige également la Mission des Nations Unies au Mali (MINUSMA).
Le Représentant spécial a déploré les récentes ordonnances d’arrestation impliquant diverses personnalités. Des arrestations qui, selon lui, « sont de nature à occulter la recherche de la vérité si elles ne sont pas menées dans le strict respect de l’État de droit ».
« La période de la transition représente une vraie opportunité pour le Mali de briser le cercle vicieux des crises politiques suivies par des coups d’Etat », a-t-il dit.
La charte de la transition conclue en septembre fixe à 18 mois la durée de cette dernière qui doit aboutir à des élections crédibles. Le CNT a pour mission d’approuver les réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives nécessaires pour la consolidation de la démocratie et la réussite des élections permettant un retour à l’ordre constitutionnel, comme le prévoit la charte.
A 14 mois de la fin de la transition, M. Annadif estime qu’il n’est jamais trop tard pour « atteindre un minimum de consensus sur les fondamentaux de la paix et de la stabilité, parce que l’avenir du Mali est en jeu ». Car malgré des succès importants remportés par les forces internationales contre les terroristes, l’environnement sécuritaire reste toujours préoccupant et imprévisible au Mali et dans la région du Sahel, avec des attaques récurrentes dans la zone des trois frontières. Le 2 janvier dernier, plus d’une centaine de personnes on été tuées dans l’ouest du Niger.
Face à ces défis, la MINUSMA a renforcé ses capacités pour mieux répondre aux
violences intercommunautaires dans le centre du Mali en appuyant la stratégie de stabilisation du gouvernement.
La mission onusienne a obtenu des « résultats significatifs » avec la multiplication de bases temporaires et l’intensification des patrouilles pour protéger les civils.
« Optimisme prudent » sur l’accord de paix
Si l’année 2020 « a été celle de tous les risques », M. Annadif veut croire que 2021 sera placée « par les Maliens d’abord » sous le signe de l’optimisme. « Malgré le manque de consensus tout le long des tractations sur la désignation des membres aussi bien du gouvernement que du Conseil national de transition (…), il y a lieu de noter pour s’en réjouir qu’aujourd’hui, tous les organes de la transition sont opérationnels », a dit l’envoyé onusien.
S’agissant de l’accord pour la Paix, les parties signataires ont adopté le 18 décembre une nouvelle feuille de route révisée des actions prioritaires en vue de diligenter sa mise en œuvre. « L’état d’esprit et le volontarisme qui ont guidé l’élaboration de ce document poussent aussi à un optimisme, même si cet optimisme doit être prudent », a nuancé le chef de la MINUSMA.
Le gouvernement malien de transition a plus d’une fois signalé l’importance qu’il accorde à la tenue des élections dont le travail de préparation est déjà lancé.
« Cependant, il y a lieu de rappeler que la réussite de la transition est conditionnée par l’aboutissement des réformes politiques, institutionnelles, électorales et administratives avec pour finalité des élections inclusives, crédibles, et dont les résultats seront acceptés par la majorité des Maliennes et des Maliens », a dit M. Annadif. Et quel que soit l’accompagnement et le soutien de la communauté internationale au processus de transition, ce dernier, n’est viable que s’il est le produit de la volonté des acteurs politiques maliens, a-t-il ajouté.
« En tant que Représentant spécial pour le Mali et chef de la MINUSMA depuis près de 5 ans, et au-delà de l’impatience et peut être d’une certaine frustration, j’ose espérer que cette fenêtre d’opportunité ne soit pas encore une occasion ratée », a conclu M. Annadif.