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Au Mali, la guerre n’a rien réglé

Traversant la Méditerranée au péril de leur vie, les migrants africains défient l’Union européenne dans ses valeurs proclamées. Ils fuient la misère, mais aussi l’insécurité qui gagne l’ensemble du Sahel en dépit de l’émergence de coopérations militaires régionales. Au Mali, où se profile l’élection présidentielle fin juillet, l’effondrement de l’État fait le jeu des groupes djihadistes.

La nuit venue à Konna, près de Mopti, au centre du Mali, des dizaines d’hommes vêtus d’un gilet jaune et d’un pantalon multipoche se retrouvent devant la maison des jeunes. Ils se répartissent en groupes de huit ou neuf, s’arment d’un bâton, d’un coupe-coupe, se distribuent des talkies-walkies, puis se séparent pour patrouiller à moto dans les rues ensablées de la ville jusqu’à l’aube. Près de cinq cents volontaires, jeunes pour la plupart, forment la «brigade». Le groupe s’est mis en tête de sécuriser la ville, que les gendarmes ont abandonnée il y a neuf mois et que l’armée, stationnée à cinquante kilomètres, ne visite qu’en de rares occasions. Sa crainte : une attaque de bandits armés qui grouillent dans la région.

La brigade est née de la frustration des habitants, impuissants devant la recrudescence des vols et des assassinats et irrités par l’inaction des forces de l’ordre, bien avant que la gendarmerie ne soit désertée. «Le 23 mars 2016, un marabout a été tué en plein centre-ville. Le lendemain, c’est un commerçant qui a été assassiné dans sa boutique, explique M. Yaya Traoré, l’un des dirigeants de la brigade, également premier adjoint au maire de la commune. Les gendarmes n’ont rien fait. C’est à ce moment-là qu’on a décidé de prendre les choses en main.»

M. Traoré assure que l’initiative porte ses fruits : «Quand ils attrapent un voleur, nos hommes l’amènent à notre quartier général de la maison des jeunes, et, le lendemain, on l’envoie à la justice, où on lui dit de ne plus revenir.» «Les voleurs ont compris le message,pense-t-il. Ils se font plus rares.» Les combattants islamistes aussi. «Ils ont peur de nous, donc ils ne viennent pas», assure-t-il. Selon lui, c’est grâce à la brigade que les trois écoles de Konna accueillent toujours les enfants. Ce que l’on ne peut pas dire des villages voisins, où les établissements ont été fermés les uns après les autres sous la pression des djihadistes.

 

Source: monde-diplomatique

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